Cour de cassation: Arrêt du 20 janvier 2003 (Belgique). RG S020018N

Date :
20-01-2003
Language :
French Dutch
Size :
7 pages
Section :
Case law
Source :
Justel F-20030120-4
Role number :
S020018N

Summary :

La clause de non-concurrence figurant dans un contrat de travail qui ne remplit pas à la condition de validité prévoyant le paiement d'une indemnité unique et de caractère forfaitaire par l'employeur a pour conséquence que l'employé ne doit pas respecter cette clause de non-concurrence et peut toujours en invoquer la nullité; cette nullité est relative et ne peut être invoquée que par l'employé (1). (1) Voir Cass., 2 mai 1988, RG n° 8004, n° 530.

Arrêt :

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N° S.02.0018.N
CISCO SYSTEMS BELGIUM, s.p.r.l.,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,
contre
N. S.,
Me Jean-Marie Nelissen Grade, avocat à la Cour de cassation.
I. La décision attaquée
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 15 juin 2001 par la cour du travail de Bruxelles.
II. La procédure devant la Cour
Le conseiller Eric Stassijns a fait rapport.
L'avocat général Anne De Raeve a conclu.
III. Les moyens de cassation
La demanderesse présente deux moyens dans sa requête.
1. Premier moyen
Dispositions légales violées
- articles 3, spécialement alinéa 1er, 6, 1134 et 1135 du Code civil ;
- articles 6, 65, spécialement ,§ 2, alinéas 5, 6 et 9, et 86, ,§ 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail.
Décision attaquée
La cour du travail déclare l'appel principal du défendeur fondé, annule le jugement a quo et, statuant à nouveau, déclare la demande du défendeur recevable et en majeure partie fondée et condamne la demanderesse à payer au défendeur une somme de 52.468, 23 euros (2.116.563 francs belges), majorée des intérêts compensatoires à partir du 30 avril 1995 et des intérêts judiciaires et condamne la demanderesse aux dépens des deux instances, notamment par les motifs suivants :
" En droit :
L'appel principal :
La clause de non-concurrence prévue par l'article 13 du contrat de travail ne prévoit pas dans le chef de l'employeur le paiement d'une indemnité en cas d'application de la clause ;
La demanderesse invoque en ordre principal que la clause de non-concurrence est sans effet parce qu'elle a licencié le défendeur sans motif grave ;
Les parties ne contestent pas que le congé donné par la demanderesse est nul.
La nullité du préavis n'entache toutefois pas la validité du congé, de sorte que le contrat de travail est rompu immédiatement (cfr Cass., 23 mars 1981, R.W. 1981-82 ; Cass. 14 février 1992, R.W. 1992-93, 1193).
La Cour constate que, nonobstant le licenciement (immédiat) les parties ont continué à exécuter le contrat de travail après le 9 février 1995 et que le défendeur n'a donc mis fin au contrat que par un congé signifié le 28 février 1995.
Les conditions donnant lieu à appliquer la clause de non-concurrence sont dès lors remplies de sorte que cette clause sortit bien ses effets.
Les parties admettent d'autre part que la clause de non-concurrence prévue par le contrat de travail est en principe nulle dès lors qu'une des conditions de validité prévues par la loi n'est pas remplie à savoir les dispositions relatives au paiement par l'employeur d'une indemnité compensatoire forfaitaire.
Les conditions de validité prévues par la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail sont impératives au profit du travailleur de sorte que leur nullité relative peut uniquement être invoquée par le travailleur (cfr. Cass., 2 mai 1988, J.T.T. 1988, 281 ; Massart B., De nietigheid van het niet-concurrentiebding, J.T.T. 433 et svts).
Dès lors que le défendeur n'invoque pas la nullité de la clause la clause de non-concurrence s'applique.
C'est tout à fait à tort que la demanderesse invoque toutefois que, vu que la nullité de la clause de non-concurrence n'a pas été invoquée elle doit sortir tous ses effets de sorte que puisqu'elle ne prévoit pas le paiement d'une indemnité par l'employeur, aucune indemnité n'est due.
Le raisonnement de la demanderesse ne tient d'ailleurs pas compte des dispositions impératives de la loi du 3 juillet 1978 prévues au profit du travailleur auxquelles il ne peut donc être dérogé à son préjudice.
Le défendeur a, dès lors, droit à une indemnité compensatoire forfaitaire prévue par la loi à charge de l'employeur dès lors que la demanderesse n'a pas davantage dérogé à l'application de la clause de non-concurrence " (pages 4-6, alinéa 1er, de l'arrêt attaqué).
Griefs
La cour du travail constate que la clause de non-concurrence prévue par l'article 13 du contrat de travail ne prévoit pas le paiement par la demanderesse d'une indemnité en cas d'application de la clause (page 4, alinéa 2, de l'arrêt attaqué).
L'article 13 du contrat conclu entre les parties qui contient ladite clause de non-concurrence, prévoit en effet :
" Le travailleur s'engage à ne pas exercer pendant une période d'un an après la cessation des ses fonctions pour quel que motif que ce soit, une fonction équivalente en Belgique, ni directement, ni par l'intermédiaire d'un tiers, ni à assumer un intérêt dans une affaire commerciale, financière ou industrielle, susceptible de constituer une concurrence à l'égard de l'employeur.
En cas de violation de cette obligation, le travailleur sera tenu de verser à l'employeur, une indemnité forfaitaire égale à une somme équivalente à 12 fois la rémunération mensuelle gagnée par le travailleur, si le contrat a été résilié, sauf si l'employeur renonce dans un délai de quinze jours à compter du moment de la cessation du contrat, à l'application effective de la clause de non-concurrence " (page 2, milieu, des conclusions d'appel régulièrement déposées au greffe de la cour du travail le 19 mars 2001 par la demanderesse, à savoir " Troisièmes et dernières conclusions complémentaires ").
La cour du travail constate en outre que les parties admettent que la clause de non-concurrence ainsi formulée est en principe nulle, parce que la condition de validité, à savoir la disposition relative au paiement par l'employeur d'une indemnité compensatoire forfaitaire (page 5, alinéa 3, de l'arrêt attaqué) n'est pas remplie et que le défendeur n'invoque pas la nullité de la clause de non-concurrence, de sorte qu'elle s'applique (page 5, alinéa 5 de l'arrêt attaqué).
En vertu de l'article 6 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail toute stipulation contraire aux dispositions de la présente loi est nulle pour autant qu'elle vise à restreindre les droits des travailleurs ou à aggraver leurs obligations.
La clause de non-concurrence qui figure dans un contrat d'emploi et qui ne prévoit pas le paiement d'une indemnité compensatoire unique et de caractère forfaitaire par l'employeur comme prévu aux articles 65, ,§ 2, alinéa 5, 4° et 86, ,§ 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, est dès lors nulle.
Les articles 65, ,§ 2, alinéa 5, 4° et 86, ,§ 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail sont impératifs et sont des lois de police et de sûreté au sens de l'article 3, alinéa 1er, du Code civil mais ne sont pas d'ordre public.
Une disposition légale de droit impératif interdit qu'il soit dérogé préalablement et de manière valable au droit résultant de cette disposition et empêche que l'application du droit résultant de cette disposition soit exclue tant que cette disposition n'a pas cessé d'être impérative au profit du bénéficiaire.
Une disposition légale de droit impératif, tant qu'elle n'est pas une disposition de droit impératif profitant à celui qui bénéficie du droit, est uniquement une disposition de droit complémentaire.
Le travailleur est libre, à partir du moment où son contrat de travail prend fin de conclure tous contrats et notamment de renoncer à la protection qui lui accordée par les dispositions du droit qui étaient impératives jusqu'à ce moment.
La cour du travail constate que les parties ont continué à exécuter le contrat de travail conclu entre les parties après un préavis nul émanant de la demanderesse, qui n'entache toutefois pas la validité du congé, et qu'il a pris fin suite à la résiliation signifiée le 28 février 1995 par le défendeur et qu'au cours de la procédure subséquente le défendeur n'a pas invoqué la nullité de la clause de non-concurrence (page 4, derniers trois alinéas et 5, alinéas 1er et 5 de l'arrêt attaqué).
La clause de non-concurrence qui figure dans le contrat de travail conclue entre les parties, s'applique dès lors entre les parties sans devoir répondre à l'article 65, ,§ 2, alinéa 5, 4° de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail qui, suite à la résiliation du contrat de travail est devenu de droit complémentaire.
L'article 65, ,§ 2, alinéa 5, 4°, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail applicable aux contrats de travail d'employés en vertu de l'article 86, ,§ 1er, de cette même loi, dispose que "toute clause de non-concurrence (...) doit prévoir le paiement d'une indemnité compensatoire unique et de caractère forfaitaire par l'employeur ".
Ce n'est dès lors pas la loi qui prévoit une indemnité, mais c'est la clause de non-concurrence qui doit la prévoir.
Le fait pour l'employeur de ne pas prévoir une indemnité compensatoire forfaitaire n'entraîne pas la nullité de la clause de non-concurrence si le travailleur n'invoque pas cette nullité, comme l'admet la cour du travail, ne signifie donc pas qu'une indemnité serait due sur la base de la clause de non-concurrence.
La couverture ou la confirmation de la nullité de la clause de non-concurrence par le travailleur ne peut en effet, à défaut d'une prescription en ce sens dans la loi elle-même, avoir pour conséquence que la clause de non-concurrence engage l'employeur à ce qui n'est pas stipulé.
Lorsque la cour du travail considère que le défendeur a droit à " l'indemnité compensatoire forfaitaire prévue par la loi " à charge de la demanderesse (page 6, alinéa 1er, de l'arrêt attaqué) elle confère à l'article 65, ,§ 2, alinéa 5, 4° de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail un contenu que cette disposition n'a pas.
En vertu de l'article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise.
La cour du travail méconnaît la force obligatoire du contrat de travail conclu entre les parties spécialement l'article 13, en accordant au défendeur une indemnité compensatoire forfaitaire alors que le contrat de travail ne le prévoit pas.
Il s'ensuit que la cour du travail ne décide pas légalement sur la base des motifs cités par le moyen, que le défendeur a droit à l'indemnité compensatoire forfaitaire prévue par la loi à charge de la demanderesse et condamne la demanderesse à payer au défendeur une somme de 52.468,23 euros (2.116.563 FB) majorée des intérêts compensatoires à partir du 30 avril 1995 et des intérêts judiciaires (violation des articles 3, spécialement alinéa 1er, 6, 1134 et 1135 du Code civil et des articles 6, 65, spécialement ,§ 2, alinéas 5, 6 et 9 et 86, ,§ 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail).
2. Second moyen
Dispositions légales violées
- article 149 de la Constitution coordonnée du 17 février 1994 ;
- article 1153 du Code civil ;
- articles 2, tant dans sa version antérieure que postérieure à l'entrée en vigueur de l'article 32 de la loi du 22 mai 2001 relative aux régimes de participation des travailleurs au capital et aux bénéfices des sociétés, 10 et 23, spécialement 1°, de la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération des travailleurs ;
- articles 65, spécialement ,§ 2, alinéa 5, 4° et 86, ,§ 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail ;
- articles 23, ,§ 1er et 26 de la loi du 27 juin 1969 portant révision de l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs ;
- articles 31, alinéas 1er et 2, 3° et 273, alinéa nique, 1°, remplacé par l'article 16 de la loi du 28 décembre 1992 du Code des impôts sur les revenus 1992.
Décision attaquée
La cour du travail déclare l'appel principal du défendeur fondé, annule le jugement a quo et, statuant à nouveau, déclare la demande du défendeur recevable et en majeure partie fondée et condamne la demanderesse à payer au défendeur la somme de 52.468,23 euros (2.116.563 francs belges) majorée des intérêts compensatoires à partir du 30 avril 1995 et des intérêts judiciaires et condamne la demanderesse aux dépens des deux instances.
2. 1. Première branche
la demanderesse a expressément invoqué dans des conclusions déposées régulièrement devant la cour d'appel que :
" 4. Enfin, le défendeur réclame des intérêts à partir du 30 avril 1995, date prétendue de la rupture effective du lien de subordination.
De tels intérêts ne peuvent incontestablement être réclamés que sur l'indemnité nette à verser éventuellement et pas sur le montant brut " (p. 7 bas de la page des conclusions d'appel de la demanderesse régulièrement déposées au greffe de la cour du travail, à savoir les premières " conclusions " d'appel de la demanderesse) ;
et
" (b)Afin d'être complet il est encore remarqué que des intérêts éventuels ne peuvent encore en tous cas être réclamés que sur les indemnités nettes à verser et pas sur le montant brut " (page 5, au milieu, sous 4, des conclusions d'appel de la demanderesse régulièrement déposées au greffe de la cour du travail le 19 mars 2001, à savoir " les troisième et dernières conclusions complémentaires" prises en degré d'appel par la demanderesse).
La demanderesse a donc invoqué expressément et régulièrement que les intérêts ne peuvent être réclamés et accordés que sur le montant net de l'indemnité à verser éventuellement et pas sur son montant brut.
Il s'ensuit qu'en ne répondant pas aux moyens de défense de la demanderesse selon lesquels les intérêts ne peuvent être réclamés et accordés que sur l'indemnité nette à verser éventuellement et pas sur le montant brut, la cour du travail ne pouvait légalement condamner la demanderesse à payer au défendeur les intérêts compensatoires à partir du 30 avril 1995 et les intérêts judiciaire sur la somme de 52.468,23 euros (2.116.563 francs belges) (violation de l'article 149 de la Constitution coordonnée du 17 février 1994).
2. 2. Seconde branche
Conformément à l'article 31, alinéa 2, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992, les indemnités obtenues en raison ou à l'occasion de la cessation de travail de la cessation de travail ou de la rupture d'un contrat de travail constituent des " rémunérations " des travailleurs sur lesquelles l'employeur est redevable du précompte professionnel conformément à l'article 273, alinéa unique, 1° de ce même code.
L'indemnité compensatoire unique et de caractère forfaitaire qui doit être payée par l'employeur au travailleur, qui quitte l'entreprise, en vertu d'une clause de non-concurrence, conformément à l'article 65, ,§ 2, alinéa 5, 4° de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail applicable au contrat de travail d'employé en vertu de l'article 86, ,§ 1er, alinéa 1er, de cette loi, constitue une indemnité obtenue en raison ou à l'occasion de la cessation du travail ou de la rupture d'un contrat de travail sur laquelle est dû le précompte professionnel.
L'article 10 de la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération des travailleurs qui dispose que la rémunération porte intérêt de plein droit à dater de son exigibilité, ne vise selon ses termes et objet que la rémunération que le travailleur peut exiger de l'employeur.
L'employeur n'est pas redevable d'un intérêt au travailleur sur la partie de sa rémunération qu'il retient à titre de précompte professionnel et de cotisation de sécurité sociale.
L'article 23, ,§ 1er, de la loi du 27 juin 1969 revisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs dispose que la cotisation du travailleur est retenue à chaque paiement par l'employeur et que celui-ci est débiteur envers l'Office national de sécurité sociale de cette cotisation comme de la sienne propre.
La cour du travail ne pouvait, dès lors, pas accorder au défendeur un intérêt sur le montant brut, dès lors que la demanderesse devait retenir le précompte professionnel et les cotisations de sécurité sociale sur ce montant.
Il s'ensuit que la cour du travail ne justifie pas légalement la décision de condamner la demanderesse au paiement des intérêts sur la somme de 52.468,23 euros (2.116.563 francs belges) et ne pouvait dès lors pas condamner légalement la demanderesse à payer au défendeur les intérêts compensatoires à partir du 30 avril 1995 et les intérêts judiciaires sur ce montant brut (violation de l'article 1153 du Code civil, des articles 2, tant dans sa version applicable avant que dans sa version applicable après l'entrée en vigueur de l'article 32 de la loi du 22 mai 2001 relative aux régimes de participation des travailleurs au capital et aux bénéfices des sociétés, 10 et 23, spécialement 1°, de la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération des travailleurs, des articles 65, spécialement ,§ 2, alinéa 5, 4°, et 86, ,§ 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail , des articles 23, ,§ 1er et 26 de la loi du 27 juin 1969 revisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs et des articles 31, alinéas 1er et 2, 3° et 273, alinéa unique, 1°, remplacé par l'article 16 de la loi du 28 décembre 1992, du Code des impôts sur les revenus 1992).
IV. La décision de la Cour
1. Premier moyen
1. 1. Fin de non-recevoir
Sur la fin de non-recevoir opposée par le défendeur et déduite de ce que le moyen oblige la Cour à procéder à un examen des faits pour lequel elle est sans pouvoir;
Attendu que la Cour constate que " la clause de non-concurrence prévue par l'article 13 du contrat de travail ne prévoit pas le paiement d'une indemnité dans le chef de l'employeur en cas d'application de la clause " ;
Que, vu cette constatation, l'examen du moyen ne requiert pas un examen des faits ;
Que la fin de non-recevoir ne peut être accueillie ;
1. 2. Quant au moyen lui-même
Attendu qu'en vertu de l'article 65, ,§ 2, alinéa 5, 4° de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail qui, en vertu de l'article 86, ,§ 1er, de cette loi est applicable au contrat de travail d'employé, la validité de la clause de non-concurrence est subordonnée à la condition qu'elle doit prévoir le paiement d'une indemnité compensatoire unique et de caractère forfaitaire par l'employeur ;
Attendu qu'il résulte du défaut de mention dans la clause de non-concurrence d'une indemnité compensatoire à payer par l'employeur que le travailleur ne doit pas respecter cette clause et peut toujours en invoquer la nullité ; que cette nullité est relative et ne peut être invoquée que par l'employé ;
Attendu que si l'employé n'invoque pas cette nullité, cela ne lui donne pas le droit de prétendre à une indemnité compensatoire minimum ; qu'il ne résulte pas du fait que l'employé a couvert la nullité de la clause de non-concurrence que l'employeur est tenu de payer cette indemnité compensatoire dès lors qu'il ne s'y est pas engagé ;
Que l'article 65 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail n'impose pas à l'employeur de payer l'indemnité minimum si aucune indemnité n'est prévue par la clause de non-concurrence ;
Attendu que l'arrêt constate que l'article 13 du contrat de travail comporte une clause de non-concurrence qui ne prévoit toutefois pas le paiement par l'employeur d'une indemnité compensatoire ; que l'arrêt condamne néanmoins la demanderesse au paiement d'une telle indemnité ;
Que, dès lors, c'est en violant les dispositions légales citées que l'arrêt accorde au contrat de travail une conséquence que la loi du 3 juillet 1978 ne lui reconnaît pas et méconnaît la force obligatoire de ce contrat ;
Que le moyen est fondé ;
2. Autres moyens
Attendu que les autres griefs ne sauraient entraîner une cassation plus étendue ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il condamne la demanderesse à payer au défendeur une indemnité compensatoire de 2.116.563 francs belges majorée des intérêts et qu'il statue sur les dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause ainsi limitée devant la cour du travail d'Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Robert Boes, les conseillers Ernest Waûters, Ghislain Dhaeyer, Greta Bourgeois et Eric Stassijns, et prononcé en audience publique du vingt janvier deux mille trois par le président de section Robert Boes, en présence de l'avocat général Anne De Raeve, avec l'assistance du greffier adjoint principal Lisette De Prins.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric Stassijns et transcrite avec l'assistance du greffier adjoint Christine Danhiez.
Le greffier adjoint, Le conseiller,