Cour d'appel: Arrêt du 3 mars 2005 (Liège). RG 2004/RG/1 638

Date :
03-03-2005
Language :
French
Size :
3 pages
Section :
Case law
Source :
Justel F-20050303-10
Role number :
2004/RG/1 638

Summary :

La décision d'instance considère que les conditions d'octroi du sursis provisoire ne sont pas rencontrées dans le chef du requérant, considérant pour l'essentiel que les activités économiques développées par Monsieur LD ne constituaient pas une entreprise ayant une réelle perspective économique. L'arrêt de la Cour d'appel de Liège confirme cette opinion et la mise en faillite de l'appelant, considérant au surplus que l'intéressé est de mauvaise foi. Cet arrêt est conforme à l'avis très fouillé du Ministère Public qui nous parait intéressant également de reproduire.

Arrêt :

Add the document to a folder () to start annotating it.

N° d'ordre : 523 COUR D'APPEL DE LIÈGE

SEPTIÈME CHAMBRE

ARRET DU 3 mars 2005

répertoire n° 1355

2004/RG/1 638

EN CAUSE

DL, domicilié à XX, inscrit à la Banque Carrefour des Entreprises sous le numéro XX

Partie appelante assistée par Maître BARTHELEMY Yves, avocat à 4960 MALMEDY, place de Rome, 12

CONTRE

Le Procureur général, domiciliée à 4000 LIEGE, palais de Justice, Pl. St-Lambert 16,

Intimé représenté par Monsieur Thierry PIRAPREZ, substitut du Procureur Général

TROXQUET Vincent, Avocat à 4800 VERVIERS, rue des Minières, 15, agissant en qualité de curateur à la faillite de Monsieur D L

Intimé, présent qualitate qua

Vu les feuilles d'audiences des 27 janvier,

3 février et 3 mars 2005

APRES EN AVOIR DELIBERE

Vu l'appel du jugement rendu le 21 octobre 2004 par le tribunal de commerce de Verviers interjeté le 28 décembre 2004 par L D;

Attendu que l'appelant postule la réformation du jugement entrepris qui déclare recevable mais non fondée la requête en concordat qu'il a déposée le 6 octobre 2004 et déclare ouverte sa faillite après qu'il ait été spécialement entendu sur les conditions de celle-ci;

Attendu que c'est à tort que l'appelant a intimé monsieur le procureur général dans la mesure où sa faillite a été prononcée d'office et où le ministère public est intervenu en instance par voie d'avis;

Attendu que "le concordat ne peut être accordé que si la situation financière de l'entreprise peut être assainie, et si son redressement semble possible" (article 9 § 2 de la loi du 17 juillet 1997 relative au concordat judiciaire), que "cette procédure n'est ouverte qu'aux sociétés qui peuvent être sauvées" (E. Cusas et Jean-Pierre Renard, Le nouveau droit du concordat et de la faillite, n° 34, p. 47);

Attendu qu'il importe de relever que l'appelant a d'abord poursuivi une activité commerciale par l'intermédiaire d'une s.p.r.l. qui porte son nom et qui sera déclarée en faillite sur aveu le 18 décembre 2003; que dans ce cadre, l'appelant exercera successivement les activités suivantes, la vente de photographies aériennes, le commerce de vin, de maisons et de matériaux de construction ainsi que le placement de téléphones et d'abonnements téléphoniques (voir p.v. d'audition dressé dans le cadre de cette faillite, dossier du curateur, pièce 5);

Que postérieurement à cette faillite à laquelle il reste devoir 94.658,23 euro dont un compte courant débiteur de 85.600 euro (dossier du curateur, pièces 1 et 5), L D poursuit une activité d'agent commercial dans différentes branches comme la vente de maisons, de vérandas et la distribution de journaux publicitaires (requête en concordat, p. 1); qu'il fait état également de "travaux saisonniers dans les bois" mais également d'une activité nouvelle en tant que vendeur de distributeurs automatiques de cigarettes, friandises, boissons et autres produits à laquelle il faut encore ajouter la vente de matériel de cuisine (voir P.V. VE.20.L2.104545/2004 du 18.11.2004 dressé par la Police de la Zone des Fagnes à charge de l'appelant du chef d'escroquerie; dossier de la procédure d'appel, p.1 1);

Qu'ainsi donc, environ un an après la faillite de la s.p.r.l. L D, société dont le capital n'a été libéré qu'à concurrence d'un tiers et qui laisse un passif de l'ordre de 117.000 euro (dossier du curateur, p. 5), L D se trouve à la tête d'un passif personnel de l'ordre de 400.000 euro , l'appelant se plaisant à souligner cependant qu'un certain nombre de créanciers ont produit dans les deux faillites;

Qu'en tenant compte de l'importance de la créance hypothécaire d'environ 200.000 euro , le passif généré par cette activité en personne physique s'élève donc à 200.000 euro ;

Attendu que l'appréciation émise par les premiers juges qui ont considéré que "ces activités disparates ne constituent pas une entreprise ayant une réelle perspective économique; qu'il s'agit de «petits boulots» destinés à colmater de ci de là les dettes considérables accumulées tant par la sprl D que par l'intéressé en nom propre" doit dès lors être entièrement approuvée;

Que nonobstant les perspectives vantées par l'appelant dans la vente d'appareils distributeurs automatiques et l'exploitation de son immeuble en tant que maison de vacances, le redressement économique de sa situation ne paraît pas possible en raison essentiellement de l'absence de fiabilité de son comportement;

Attendu qu'il eut d'ailleurs suffi pour confirmer la décision des premiers juges qui ont refusé d'ouvrir la procédure concordataire de constater que sa "mauvaise foi manifeste" au sens de l'article 15 § 1er alinéa 1 de la loi sur le concordat judiciaire est avérée;

Qu' « interrogé sur des exemples de mauvaise foi manifeste ... le ministre s'est borné à invoquer des cas susceptibles d'être sanctionnés pénalement par la loi relative au concordat judiciaire, notamment «si le débiteur essaye d'abuser le tribunal ou s'il fait intervenir de prétendus créanciers» »(A. Zenner, Dépistages, faillites et concordats, n° 1214, p. 870);

Que la loi sur le concordat judiciaire sanctionne le comportement

du débiteur qui

- "pour obtenir le concordat, a de quelque manière que ce soit, volontairement, dissimulé une partie de son actif ou de son passif, ou exagéré cet actif ou minimisé ce passif",

- "a fait sciemment une ou plusieurs omissions dans la liste des créanciers",

- "a fait ou laissé faire sciemment au tribunal ou au commissaire au sursis des déclarations inexactes ou incomplètes sur l'état de ses affaires ou sur les perspectives de réorganisation" (article 46, 1°, 3° & 4°);

Qu'en l'espèce, il doit être relevé que l'appelant s'est bien gardé de signaler, lorsqu'il a déposé sa requête en concordat, les différents détournements dont il s'est rendu coupable dans l'exercice de son commerce d'ustensiles de cuisine et de téléphonie, détournements qui ont eu pour effet de porter le passif mentionné à la requête du 6.10.2004 de 191.667,17 euro à 195.248,15 euro (v. lettre du 18.10.2004 du conseil de l'appelant au tribunal, dossier de la procédure concordataire) et qu'il a bien dû reconnaître après que l'existence d'une instruction en cours ait été portée à la connaissance du tribunal par le ministère public lors de l'audience du 14 octobre 2004;

Que l'introduction d'une procédure concordataire exige la plus grande loyauté de la part du débiteur dans ses relations avec le tribunal de commerce; que non seulement la commission par l'appelant de détournements dans le cadre de son activité d'intermédiaire commercial mais encore sa vaine tentative de dissimuler ces malversations sont révélatrices d'une mauvaise foi manifeste qui justifiait à elle seule que sa demande soit rejetée;

Attendu que c'est à bon droit que le tribunal a considéré que les conditions de la faillite étaient réunies dans le chef de l'appelant; que celui-ci reconnaissait

d'ailleurs dans sa requête en concordat qu'il fait l'objet de différentes procédures de recouvrement ce que confirme le dossier déposé par le curateur (pièce 14); que l'intégralité de la quotité saisissable de la pension qui lui est versée par la S.N.C.B. est saisie par le créancier hypothécaire; que les revenus professionnels qu'il promérite sont irréguliers;

Que c'est en vain qu'il se prévaut de l'accord de principe qui lui aurait été octroyé le 3 septembre 2004 par EB-LEASE sur un crédit de 293.000 euro moyennant la reprise de (hypothèque en premier rang sur l'immeuble et des garanties consenties par un ami pour un montant de 50.000 £ (dossier inventorié sous le n° 15, pièce 4); qu'en effet, d'une part, la mise en oeuvre de ce crédit n'a pas été poursuivie dans les six semaines qui ont précédé la faillite et que d'autre part, ce nouveau crédit destiné à remplacer le crédit consenti par CREDIMO qui avait déjà servi à regrouper les dettes de l'appelant ne suffit pas à faire face à son passif actuel;

Que l'appelant se trouve donc dans l'impossibilité de faire face à ses obligations par un comportement normal ce que confirme encore le fait de grivèlerie dont il s'est rendu coupable le 11 octobre 2004 (dossier déposé par le curateur, pièce 7);

Qu'ainsi donc au jour où le tribunal a statué,

l'appelant avait cessé ses paiements de manière persistante et que son crédit était ébranlé;

Que l'existence d'un paiement important effectué le 25 mars 2004 entre les mains du notaire requis de procéder à la vente forcée de l'immeuble (dossier . inventorié sous le n° 15) n'énerve en rien les considérations qui précèdent;

Attendu que l'appelant n'émet aucune objection à la réclamation par le curateur d'une indemnité de procédure;

PAR CES MOTIFS,

Vu l'article 24 de la Loi du 15 juin 1935

LA COUR STATUANT CONTRADICTOIREMENT,

Vu l'avis conforme de monsieur Thierry PIRAPREZ, Substitut du Procureur général, donné à l'audience du 3 février 2005,

Reçoit l'appel,

Confirme le jugement entrepris et condamne l'appelant aux dépens d'appel liquidés pour le curateur Me TROXQUET à 233,02 euro .

Prononcé, en langue française, à 1 'audience publique de la septième chambre de la Cour d'Appel de Liège, palais de justice, le TROIS MARS DEUX MILLE CINQ où étaient présents

Raoul de FRANCQUEN, Président Michel LIGOT, Conseiller,

Ariane JACQUEMIN, Conseiller, Jean-Jacques BOUSSA, Greffier.