Cour constitutionnelle (Cour d'Arbitrage): Arrêt du 20 octobre 2016 (Belgique). RG 134/2016

Date :
20-10-2016
Langue :
Allemand Français Néerlandais
Taille :
7 pages
Section :
Jurisprudence
Source :
Justel F-20161020-7
Numéro de rôle :
134/2016

Résumé :

La Cour rejette le recours.

Arrêt :

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La Cour constitutionnelle,

composée des présidents J. Spreutels et E. De Groot, et des juges A. Alen, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet et R. Leysen, assistée du greffier F. Meersschaut, présidée par le président J. Spreutels,

après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :

I. Objet du recours et procédure

Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 27 juillet 2015 et parvenue au greffe le 28 juillet 2015, un recours en annulation du décret de la Région wallonne du 22 janvier 2015 modifiant la loi du 14 août 1986 relative à la protection et au bien-être des animaux afin d'interdire la détention d'animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure (publié au Moniteur belge du 30 janvier 2015) a été introduit par l'ASBL « Nationale Vereniging van Edelpelsdierenfokkers », l'AISBL « Fur Europe » et Jean-Philippe Marchal, assistés et représentés par Me E. Laevens et Me O. Sasserath, avocats au barreau de Bruxelles.

(...)

II. En droit

(...)

B.1. Le décret de la Région wallonne du 22 janvier 2015 « modifiant la loi du 14 août 1986 relative à la protection et au bien-être des animaux afin d'interdire la détention d'animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure » dispose :

« Article 1er. Dans le chapitre II de la loi du 14 août 1986 relative à la protection et au bien-être des animaux, il est inséré un article 9/1 rédigé comme suit :

' Art. 9/1. La détention d'animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure est interdite. '.

Article 2. L'article 35, alinéa 1er, de la même loi, modifié par la loi du 27 décembre 2012, est complété par le 10° rédigé comme suit :

' 10° contrevient à l'article 9/1. ' ».

B.2.1. Il ressort des travaux préparatoires de ce décret que le législateur décrétal a voulu prendre des mesures en vue de protéger les animaux et de favoriser leur bien-être en exerçant la compétence que lui reconnaît l'article 24 de la loi spéciale du 6 janvier 2014 relative à la Sixième réforme de l'Etat :

« La Wallonie est désormais compétente pour prendre toute mesure en vue de protéger les animaux et favoriser leur bien-être. A cette fin, le Gouvernement wallon s'est engagé dans la déclaration de politique régionale 2014-2019 à interdire l'élevage d'animaux pour la production de fourrure. Ce projet de décret a pour objectif de mettre en oeuvre cette volonté. » (Doc. parl., Parlement wallon, 2014-2015, n° 89/1, p. 2).

« En Belgique, seuls les visons sont élevés pour leur fourrure. Les entreprises sont toutes situées en Flandre, de sorte que le présent projet de décret anticipe le fait de voir de telles entreprises s'implanter en Wallonie. Les demandes y sont bien réelles comme en témoignent quelques projets dans certaines régions de Wallonie » (Doc. parl., Parlement wallon, 2014-2015, nos 51/3 et 89/2, p. 4).

B.2.2. Il ressort également de ces travaux préparatoires que le législateur décrétal a poursuivi un triple objectif. Il a tout d'abord considéré que la détention de visons pour leur fourrure rencontre de sérieuses difficultés pour le bien-être des animaux parce que les visons sont des animaux sauvages qui dans la nature vivent sur un grand territoire et qu'en captivité ils développeraient des problèmes de santé tels que des phénomènes de caudophagie et d'automutilation.

Le législateur décrétal a également pris en compte des considérations éthiques et le fait que l'opinion publique est opposée à ce type d'élevage.

« Une enquête menée par GAIA nous rapporte que 86 % des Belges interrogés sont opposés à ce type d'élevage. Tuer un animal est ici dénué de sens puisqu'il existe des alternatives pour les produits concernés » (Doc. parl., Parlement wallon, 2014-2015, n° 89/1, p. 2).

Il relève à cet égard que l'interdiction de détention d'animaux à fourrure a déjà vu le jour dans plusieurs Etats européens.

Il a enfin pris en compte les nuisances à l'environnement qui résultent des élevages de visons :

« Deux études ont été menées en 2010 et en 2013. Selon celles-ci l'impact environnemental d'un kilo de fourrure de vison est bien plus important que celui d'un kilo de tissu à base de coton, d'acrylique ou de polyester. Le rapport est de dix contre un pour un grand nombre d'effets environnementaux. Le manteau doit pouvoir être porté sept fois plus longtemps pour éviter cette distorsion. De plus, la Belgique est déjà exposée à des excédents de lisier » (ibid.).

Il ressort encore des travaux préparatoires que le législateur a utilisé les termes « à des fins exclusives ou principales » en vue de « ne pas pénaliser les éleveurs qui recycleraient la fourrure des animaux qu'ils exploitent » (Doc. parl., Parlement wallon, 2014-2015, nos 51/3 et 89/2, p. 5).

Quant à la recevabilité du recours

B.3.1. Le Gouvernement wallon, le Gouvernement flamand et la partie intervenante GAIA contestent l'intérêt des parties requérantes.

B.3.2. La Constitution et la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle imposent à toute personne physique ou morale qui introduit un recours en annulation de justifier d'un intérêt. Ne justifient de l'intérêt requis que les personnes dont la situation pourrait être affectée directement et défavorablement par la norme attaquée.

B.3.3. L'ASBL « Nationale Vereniging van Edelpelsdierenfokkers » (ci-après : BEFFA) et l'AISBL « Fur Europe » sont des associations actives dans le domaine de la production de fourrure animale. En interdisant la détention d'animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure sur le territoire de la Région wallonne, le décret attaqué est de nature à porter atteinte directement et défavorablement à leur objet social, même s'il n'y a pas pour l'instant d'éleveurs d'animaux à fourrure installés en Région wallonne. Ces associations justifient de l'intérêt requis pour demander son annulation.

Etant donné que l'intérêt de ces deux parties requérantes est établi, il n'est pas nécessaire d'examiner l'intérêt à agir de la troisième.

B.3.4. Les exceptions sont rejetées.

Quant au premier moyen

B.4. Le premier moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution par les articles 1er et 2 du décret attaqué.

Selon les parties requérantes, ces dispositions instaurent une différence de traitement non raisonnablement justifiée entre, d'une part, les personnes qui détiennent des animaux à fourrure à des fins exclusives ou principales de production de fourrure et, d'autre part, les personnes qui détiennent des animaux à fourrure ou d'autres animaux à d'autres fins, comme la production de viande destinée à la consommation.

B.5.1. Le Gouvernement wallon estime que le premier moyen est irrecevable parce que les parties requérantes ne démontrent pas appartenir à une des catégories qu'elles identifient.

B.5.2. Lorsqu'une partie requérante justifie de l'intérêt requis pour demander l'annulation des dispositions attaquées, elle ne doit pas justifier en outre d'un intérêt aux moyens qu'elle invoque.

B.6. Il ressort des travaux préparatoires mentionnés en B.2 que le législateur décrétal a eu pour objectif, en instaurant une interdiction de détention d'animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure, de respecter le bien-être animal, de protéger l'environnement et de prendre en compte des considérations éthiques dont il est constaté qu'elles sont partagées par une majorité de la population.

La protection du bien-être animal est un but légitime d'intérêt général, dont l'importance a déjà été relevée, notamment lors de l'établissement, par les Etats membres européens, du Protocole n° 33 sur la protection et le bien-être des animaux, annexé au Traité instituant la Communauté européenne (JO 1997, C 340, p. 110), dont le contenu a été repris en grande partie dans l'article 13 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

B.7.1. La différence de traitement entre les personnes qui détiennent des animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure et les personnes qui détiennent des animaux à d'autres fins repose sur un critère objectif.

B.7.2. Cette interdiction peut, pour le surplus, être considérée comme pertinente pour garantir une protection efficace du bien-être de ces animaux. Cette interdiction répond également aux objectifs de protection de l'environnement poursuivis par le législateur décrétal en ce qu'elle permet d'éviter la production de déchets d'animaux à fourrure et aux considérations éthiques qui fondent cette interdiction.

B.8. Le législateur décrétal dispose, en matière socioéconomique, d'un pouvoir d'appréciation étendu. A la lumière des objectifs qu'il poursuit, il pouvait raisonnablement conclure qu'il existe entre la détention d'animaux à fourrure à des fins exclusives ou principales de production de fourrure et la détention d'animaux à d'autres fins des différences telles qu'une interdiction de détention doit être édictée dans la première hypothèse. Le fait que la peau des animaux qui sont élevés pour d'autres raisons que la production de fourrure peut être utilisée n'y change rien, dès lors qu'il ne s'agit en pareil cas que d'un sous-produit.

B.9. Contrairement à ce que soutiennent les parties requérantes, le fait qu'elles contestent le choix politique du législateur décrétal n'a pas pour conséquence qu'elles seraient discriminées en tant que minorité idéologique, au sens de l'article 11, alinéa 2, de la Constitution. L'article 11 de la Constitution n'interdit pas au législateur décrétal de prendre des dispositions en faveur du bien-être animal malgré l'opinion d'une minorité qui serait en désaccord avec le choix politique qu'il pose, choix qui relève de son pouvoir d'appréciation.

B.10. Le premier moyen n'est pas fondé.

Quant au deuxième moyen

B.11. Le deuxième moyen est pris de la violation, par les articles 1er et 2 du décret attaqué, de l'article 16 de la Constitution combiné avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

Les parties requérantes relèvent que l'interdiction décrétale de détenir des animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure constitue une restriction de l'usage du droit de propriété sur ces animaux, ainsi qu'une restriction de l'usage des propriétés immobilières dans lesquelles ces animaux sont détenus.

B.12.1. Le Gouvernement wallon estime qu'aucune des parties requérantes n'a intérêt au moyen, à défaut d'être propriétaire d'une installation située en Région wallonne.

B.12.2. Lorsqu'une partie requérante justifie de l'intérêt requis pour demander l'annulation des dispositions attaquées, elle ne doit pas justifier en outre d'un intérêt aux moyens qu'elle invoque.

B.13. L'article 16 de la Constitution dispose que nul ne peut être privé de sa propriété pour cause d'utilité publique que dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une juste et préalable indemnité.

B.14.1. L'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme offre non seulement une protection contre une expropriation ou une privation de propriété (premier alinéa, deuxième phrase) mais également contre une ingérence dans le droit au respect des biens (premier alinéa, première phrase) et contre une réglementation de l'usage des biens (deuxième alinéa).

B.14.2. En ce que l'article 16 de la Constitution et l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme protègent le droit de propriété, les garanties qu'ils contiennent forment un ensemble indissociable, de sorte que la Cour doit tenir compte, lors de son contrôle au regard de l'article 16 de la Constitution, de la protection plus large offerte par l'article 1er de ce Protocole.

B.15. L'article 1er du Premier Protocole additionnel ne garantit pas le droit d'acquérir des biens (CEDH, 13 juin 1979, Marckx c. Belgique, § 50; 28 septembre 2004, Kopecky c. Slovaquie, § 35). Dans certaines circonstances, des attentes fondées relatives à la réalisation de futurs titres de propriété peuvent certes relever de la protection de la disposition conventionnelle précitée. Cela implique toutefois qu'il soit question d'un titre ayant force obligatoire et qu'il existe une base suffisante en droit national avant qu'un justiciable puisse invoquer une espérance légitime. Le simple espoir d'obtenir la jouissance d'un droit de propriété ne constitue pas pareille espérance légitime (CEDH, 28 septembre 2004, Kopecky c. Slovaquie, § 35).

B.16. Il ressort des travaux préparatoires qu'avant l'adoption du décret attaqué, il n'existait pas d'élevages d'animaux à fourrure en Région wallonne, de sorte qu'il n'est pas porté atteinte au droit de propriété.

Il ne peut pas davantage être admis que des justiciables pouvaient légitimement espérer qu'ils seraient autorisés à détenir en Région wallonne des animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure, ni qu'ils pourraient à l'avenir en retirer des revenus.

Il n'est dès lors pas question d'une ingérence dans le droit de propriété au sens de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

B.17. Le deuxième moyen n'est pas fondé.

Quant au troisième moyen

B.18.1. Le troisième moyen est pris de la violation, par les articles 1er et 2 du décret attaqué, des articles 11 et 23 de la Constitution, combinés avec les articles 34, 35 et 49 du TFUE.

Selon les parties requérantes, l'interdiction de détenir des animaux destinés principalement ou exclusivement à la production de fourrure doit être considérée comme une mesure d'effet équivalent à des restrictions à l'importation ou à l'exportation. L'interdiction serait donc contraire aux articles 34 et 35 du TFUE. Elle serait également contraire à l'article 49 du TFUE, qui prévoit une interdiction des restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans le territoire d'un autre Etat membre.

B.18.2. Les parties requérantes n'exposent pas suffisamment, dans leur requête, en quoi les dispositions attaquées violeraient l'article 23 de la Constitution.

Le troisième moyen est irrecevable en ce qu'il est pris de la violation de l'article 23 de la Constitution. La Cour limite par conséquent son examen à l'article 11 de la Constitution combiné avec les articles 34, 35 et 49 du TFUE.

B.19. Les articles 34, 35, 36 et 49 du TFUE disposent :

« Article 34

Les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les Etats membres.

Article 35

Les restrictions quantitatives à l'exportation, ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les Etats membres.

Article 36

Les dispositions des articles 34 et 35 ne font pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation ou de transit, justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux, de protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique ou de protection de la propriété industrielle et commerciale. Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres ».

« Article 49

Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans le territoire d'un autre Etat membre sont interdites. Cette interdiction s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un Etat membre établis sur le territoire d'un Etat membre.

La liberté d'établissement comporte l'accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d'entreprises, et notamment de sociétés au sens de l'article 54, deuxième alinéa, dans les conditions définies par la législation du pays d'établissement pour ses propres ressortissants, sous réserve des dispositions du chapitre relatif aux capitaux ».

B.20. Les dispositions décrétales interdisant la détention d'animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure sont de nature à entraver, tout au moins indirectement, le commerce intracommunautaire de tels animaux et doivent dès lors être considérées comme une mesure d'effet équivalent à une restriction quantitative en principe interdite par les articles 34 et 35 du TFUE (Voir arrêt CJCE, 17 septembre 1998, C-400/96, Harpegnies, point 30; 19 juin 2008, C 219/07, Nationale Raad van Dierenkwekers en Liefhebbers VZW e.a., point 22).

Il y a dès lors lieu d'examiner si l'interdiction de principe peut être justifiée sur la base de l'article 36 du même Traité ou sur la base d'autres impératifs, compte tenu de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne.

B.21. Comme il est dit en B.6, en interdisant de détenir des animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure, le législateur décrétal a voulu garantir le bien-être de ces animaux et protéger l'environnement.

La protection du bien-être animal est un but légitime d'intérêt général, dont l'importance a déjà été relevée, notamment lors de l'établissement, par les Etats membres européens, du Protocole n° 33 sur la protection et le bien-être des animaux, annexé au Traité instituant la Communauté européenne (JO 1997, C 340, p. 110), dont le contenu a été repris en grande partie dans l'article 13 du TFUE.

Conformément à l'article 36 du TFUE, les dispositions des articles 34 et 35 ne font pas obstacle aux interdictions ou restrictions justifiées par des raisons de protection de la santé et de la vie des animaux, à condition que ces interdictions ou restrictions ne constituent ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres.

Conformément à la jurisprudence constante de la Cour de justice, il est en outre possible de justifier des restrictions à la libre circulation des biens par des impératifs tels que la protection de l'environnement (CJCE, 14 juillet 1998, C-341/95, Bettati, point 62; 12 octobre 2000, C-314/98, Snellers, point 55; 19 juin 2008, C-219/07, Nationale Raad van Dierenkwekers en Liefhebbers VZW e.a., point 29).

B.22. L'interdiction de principe de détenir des animaux à des fins exclusives ou principales de production de fourrure peut être considérée comme nécessaire pour garantir une protection efficace du bien-être de ces animaux et pour exclure tout risque de maltraitance physique ou psychique.

Le fait que d'autres Etats membres de l'Union européenne appliquent des règles moins strictes que celles qui sont appliquées en Belgique ne signifie pas en soi que l'interdiction de principe est disproportionnée et, partant, incompatible avec le droit de l'Union européenne. La seule circonstance qu'un Etat membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par un autre Etat membre ne saurait avoir d'incidence sur l'appréciation de la nécessité et de la proportionnalité des dispositions attaquées (CJCE, 1er mars 2001, C-108/96, Mac Quen e.a., points 33 et 34; 19 juin 2008, C-219/07, Nationale Raad van Dierenkwekers en Liefhebbers VZW e.a., point 31).

La Commission européenne a considéré que, eu égard au Protocole sur la protection et au bien-être des animaux, annexé au Traité d'Amsterdam, la protection des animaux est un sujet sensible sur lequel les opinions des populations des Etats membres peuvent être très différentes, selon les caractéristiques sociales, culturelles et religieuses de la société concernée, de sorte que les Etats membres sont les mieux placés pour prendre des mesures adaptées (Decision of the European Ombudsman closing his inquiry into complaint 3307/2006/(PB)JMA against the European Commission, http://www.ombudsman.europa.eu/cases/decision.faces/en/4653/html.bookmark, points 25 et 35).

B.23. Contrairement à ce que font valoir les parties requérantes, le législateur décrétal a pu raisonnablement constater que le fait d'imposer des mesures moins extrêmes, comme des conditions de détention d'animaux à fourrure, ne permet pas de garantir le niveau minimum de bien-être qu'il souhaitait atteindre, et qu'il faut attacher à la prémisse selon laquelle détenir et tuer des animaux à fourrure à des fins exclusives ou principales de production de fourrure n'est pas admissible, la conséquence logique qu'une interdiction s'impose en la matière.

B.24. L'interdiction décrétale ne viole pas non plus l'article 11 de la Constitution, combiné avec l'article 49 du TFUE. En ce qui concerne la liberté d'établissement, les dispositions décrétales n'utilisent pas un critère basé sur la nationalité ou l'Etat d'origine et poursuivent l'objectif du bien-être animal visé spécifiquement par l'article 13 du TFUE.

B.25. Le troisième moyen n'est pas fondé.

Par ces motifs,

la Cour

rejette le recours.

Ainsi rendu en langue française, en langue néerlandaise et en langue allemande, conformément à l'article 65 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 de la Cour constitutionnelle, le 20 octobre 2016.

Le greffier,

F. Meersschaut

Le président

J. Spreutels