Cour de cassation: Arrêt du 15 mars 2011 (Belgique). RG P.11.0443.N

Date :
15-03-2011
Langue :
Français Néerlandais
Taille :
2 pages
Section :
Jurisprudence
Source :
Justel F-20110315-8
Numéro de rôle :
P.11.0443.N

Résumé :

Ensuite d’une décision judiciaire d’internement rendue par défaut, lorsque l’inculpé ou le prévenu est interné à l’expiration du délai ordinaire d’opposition, sur décision de la Commission de Défense sociale, il ne peut demander sa mise en liberté provisoire en vertu de l’article 27, §2, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive.

Arrêt :

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N° P.11.0443.N

LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL D'ANVERS,

demandeur,

contre

J. L.,

demandeur en libération conditionnelle, interné,

demandeur,

Me Karl Wijnen, avocat au barreau de Malines.

I. LA PROCEDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi en cassation est dirigé contre un arrêt rendu le 3 mars 2011 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle siégeant en chambre du conseil.

Le demandeur présente un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Luc Van hoogenbemt a fait rapport.

L'avocat général Marc Timperman a conclu.

II. LA DECISION DE LA COUR :

Sur le moyen :

1. Le moyen invoque la violation des articles 149 de la Constitution, 27, § 2, de la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive et 18 de la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l'égard des anormaux, des délinquants d'habitude et des auteurs de certains délits sexuels, ainsi que la méconnaissance du principe de droit lex specialis derogat generalibus : l'arrêt rendu le 26 mai 2010 par défaut a ordonné l'internement du défendeur ; l'opposition signifiée par le défendeur n'ayant pas encore été déclarée irrecevable, cet arrêt rendu par défaut subsiste ; l'article 27, § 2, de la loi du 20 juillet 1990 n'est pas applicable en cas d'internement ; ainsi, les juges d'appel ont appliqué, à tort, la loi du 20 juillet 1990 alors que la loi de défense sociale prévoit une procédure en l'espèce.

2. L'article 33, § 2, alinéa 1er, de la loi du 20 juillet 1990 dispose que, lorsqu'ils condamnent le prévenu ou l'accusé à un emprisonnement principal d'un an ou à une peine plus grave, sans sursis, les cours et les tribunaux peuvent ordonner son arrestation immédiate, sur réquisition du ministère public, s'il y a lieu de craindre que le prévenu ou l'accusé ne tente de se soustraire à l'exécution de la peine.

Cet article ne permet pas l'arrestation immédiate en cas d'internement.

Il résulte de l'article 14 de la loi de défense sociale que, lorsque le juge ordonne l'internement de l'inculpé ou du prévenu, l'intéressé ne peut plus, en exécution de la décision rendue sur l'action publique exercée à sa charge, être soumis au régime pénitentiaire ordinaire mais sera admis dans l'annexe psychiatrique d'un centre pénitentiaire.

La Commission de Défense sociale indique l'établissement où s'effectue l'internement.

L'article 27, § 2, de la loi du 20 juillet 1990 dispose que la mise en liberté provisoire peut aussi être demandée par celui qui est privé de sa liberté en vertu d'un ordre d'arrestation immédiate décerné après condamnation, à la condition qu'appel, opposition ou pourvoi en cassation ait été formé contre la décision de condamnation elle-même. Elle peut dans les mêmes conditions être demandée par celui qui est privé de sa liberté sur le fondement d'une condamnation par défaut, contre laquelle opposition est formée dans le délai extraordinaire.

Si l'inculpé ou le prévenu n'est pas arrêté en la cause et que son internement a été décidé, il n'est plus possible de procéder à une arrestation ou à une exécution immédiate. En pareil cas, la mise en liberté provisoire ne peut être demandée en vertu de l'article 27, § 2, de la loi du 20 juillet 1990.

L'article 18, dernier alinéa, de la loi de défense sociale dispose qu'en cas d'urgence, le président de la commission peut ordonner, à titre provisoire, la mise en liberté de l'interné ; il en donnera immédiatement information au procureur du Roi. Sa décision est soumise à la commission qui statue lors de sa prochaine séance.

3. Le défendeur qui, à ce moment, ne se trouvait pas en détention préventive dans le cadre de la cause en attente d'une décision, a fait l'objet d'un ordre d'internement par l'arrêt rendu par défaut le 26 mai 2010 par la cour d'appel d'Anvers.

Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que :

- cet arrêt rendu par défaut a été signifié le 28 juin 2010, mais pas à personne ;

- la Commission de Défense sociale a décidé, par décision du 11 janvier 2011, que le défendeur devait être signalé pour être arrêté ;

- en exécution de quoi, le défendeur a été privé de liberté ;

- le 21 février 2011, le défendeur a signifié opposition contre l'arrêt précité rendu par défaut ;

- l'examen de cette opposition a été, à sa demande, reporté de l'audience du 2 mars 2011 à l'audience du 30 mars 2011 ;

- le 2 mars 2011, le défendeur a introduit une demande de mise en liberté provisoire, adressée à la chambre de la cour d'appel appelée à se prononcer sur son opposition.

4. Les juges ont décidé que, sur la base des articles 7 et 31 de la loi de défense sociale et de l'article 27, § 2, de la loi du 20 juillet 1990, ils étaient compétents pour se prononcer sur la demande de mise en liberté du défendeur. Ils ont ensuite décidé que le défendeur sera libéré sous réserve de l'observation d'une condition.

Ainsi ont-ils, à tort, appliqué la loi du 20 juillet 1990 et n'ont pas légalement justifié leur décision.

Le moyen est fondé.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse l'arrêt attaqué ;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;

Laisse les frais à charge de l'Etat ;

Renvoie la cause à la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle, autrement composée.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Etienne Goethals, les conseillers Paul Maffei, Luc Van hoogenbemt, Koen Mestdagh et Filip Van Volsem, et prononcé en audience publique du quinze mars deux mille onze par le président de section Etienne Goethals, en présence de l'avocat général Marc Timperman, avec l'assistance du greffier délégué Véronique Kosynsky.

Traduction établie sous le contrôle du président de section Frédéric Close et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le président de section,