Cour du Travail: Arrêt du 11 octobre 2007 (Mons (Mons)). RG 17361

Datum :
11-10-2007
Taal :
Frans
Grootte :
3 pagina's
Sectie :
Rechtspraak
Bron :
Justel F-20071011-4
Rolnummer :
17361

Samenvatting :

Le taux majoré n'est plus accordé dès que le père survivant ou la mère survivante est engagé dans les liens d'un mariage ou est établi en ménage. Il n'y a pas lieu d'exiger que le mariage soit concrétisé dans les faits par une cohabitation, ni d'avoir égard aux conséquences économiques de l'événement.

Arrest :

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COUR DU TRAVAIL DE MONS

ARRET

AUDIENCE PUBLIQUE DU 11 OCTOBRE 2007

R.G.17.361

5ème Chambre

Sécurité sociale des travailleurs salariés - Allocations familiales - Orphelin - Taux majoré - Conditions.

Article 580, 2°, du Code judiciaire.

Arrêt contradictoire, définitif.

EN CAUSE DE :

L'OFFICE NATIONAL D'ALLOCATIONS FAMILIALES POUR TRAVAILLEURS SALARIES, en abrégé O.N.A.F.T.S., établissement public dont le siège administratif est établi à 1000 Bruxelles, rue de Trèves, 70,

Appelant au principal, intimé sur incident, comparaissant par son conseil Maître Jadot loco Maître Brotcorne, avocat à Leuze ;

CONTRE :

H. D.,

Intimée au principal, appelante sur incident, représentée par Mr F. Deleu, délégué syndical dont la procuration repose au dossier ;

*******

La Cour du travail, après en avoir délibéré, rend ce jour l'arrêt suivant :

Vu l'appel interjeté contre le jugement contradictoire prononcé le 20 juin 2000 par le tribunal du travail de Tournai, appel formé par requête reçue au greffe de la Cour le 13 mars 2001 ;

Vu, produites en forme régulière, les pièces de la procédure légalement requises, et notamment la copie conforme du jugement entrepris ;

Vu les conclusions de Mme D. H. reçues au greffe le 3 mars 2003 ;

Vu les conclusions de l'O.N.A.F.T.S. reçues au greffe le 28 juillet 2006 ;

Entendu les conseil et représentant des parties, en leurs dires et moyens, à l'audience publique du 13 septembre 2007 ;

Vu le dossier de l'O.N.A.F.T.S. déposé à cette audience ;

Entendu le ministère public en son avis oral donné à cette audience ;

* * * *

RECEVABILITE DES APPELS

L'appel principal, régulier en la forme et introduit dans le délai légal, est recevable. Le jugement entrepris n'a été notifié qu'à Mme D. H. et au conseil de l'O.N.A.F.T.S., par pli simple, de sorte que le délai d'appel n'a pu commencer à courir.

L'appel incident, introduit conformément aux articles 1054 et 1056 du Code judiciaire, est recevable.

* * * *

ELEMENTS DE LA CAUSE

Suite au décès de Mr G. M. survenu le 17 avril 1988, l'O.N.A.F.T.S. a versé à Mme D. H. les allocations familiales majorées d'orphelin en faveur des enfants, en application de l'article 56bis, § 1er, des lois relatives aux allocations familiales pour travailleurs salariés, coordonnées le 19 décembre 1939.

Mme D. H. s'est remariée le 27 juillet 1997.

Par lettre recommandée du 16 janvier 1998, l'O.N.A.F.T.S. invita Mme D. H. à lui rembourser la somme de 64.875 BEF représentant les sommes perçues indûment de août 1997 à décembre 1997, considérant que le remariage constituait un obstacle à l'octroi des allocations familiales majorées.

Mme D. H. contesta cette décision par un recours introduit le 5 février 1998 auprès du tribunal du travail de Tournai. Par conclusions du 15 mai 2000, l'O.N.A.F.T.S. introduisit une demande reconventionnelle ayant pour objet la condamnation de Mme D. H. à lui rembourser la somme de 64.875 BEF.

Par le jugement entrepris du 20 juin 2000, le premier juge déclara la demande principale irrecevable et la demande reconventionnelle recevable mais non fondée, au motif que Mme D. H. n'avait cohabité avec son époux, de nationalité togolaise, qu'à partir du 21 décembre 1997, date de l'arrivée de celui-ci en Belgique.

L'O.N.A.F.T.S. a relevé appel de ce jugement. Il fait valoir que l'article 56bis, § 1er, des lois coordonnées le 19 décembre 1939 est de stricte interprétation, et que le simple fait d'être engagé dans les liens du mariage suffit pour que les allocations familiales ne soient plus octroyées au taux majoré à dater du 1er jour du mois qui suit ce mariage, soit en l'espèce le 1er août 1997.

Mme D. H. conclut à la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce que sa demande principale a été déclarée irrecevable, objet de son appel incident.

* * * *

DECISION

Appel incident

La notification d'un indu est une décision qui se subdivise en deux parties : la première constate l'origine de l'indu et la seconde invite le destinataire à rembourser le montant indûment perçu. Tel est manifestement le cas en l'espèce : la décision du 16 janvier 1998 explicite la raison pour laquelle les allocations ont été payées à un taux non adapté (mariage) ainsi que la disposition légale applicable, et invite Mme D. H. à rembourser la somme de 64.875 BEF.

Une telle décision qui statue sur le droit de l'assuré social peut faire l'objet d'un recours devant le tribunal du travail. Cette possibilité est d'ailleurs expressément exprimée dans la décision du 16 janvier 1998.

C'est à tort que le premier juge a déclaré la demande principale irrecevable. L'appel incident est fondé.

Appel principal

Dans sa version applicable aux faits, l'article 56bis, § 2, des lois coordonnées le 19 décembre 1939 dispose que :

« Les allocations familiales prévues au § 1er sont toutefois accordées aux taux prévus à l'article 40, lorsque le père survivant ou la mère survivante est engagé dans les liens d'un mariage ou est établi en ménage. Pour l'application du présent paragraphe, il y a présomption d'établissement en ménage, lorsqu'il y a cohabitation entre personnes de sexe différent, sauf lorsque ces personnes sont parentes ou alliées jusqu'au troisième degré inclusivement. Cette présomption peut être renversée par la preuve contraire.

Le bénéfice du § 1er peut être invoqué à nouveau si les causes d'exclusion prévues à l'alinéa 1er ont cessé d'exister ou si le mariage de l'auteur survivant, non établi en ménage, est suivi d'une séparation de corps ou d'une séparation de fait consacrée par une ordonnance judiciaire assignant une résidence séparée aux époux.

Le présent paragraphe n'est pas applicable lorsque l'orphelin est abandonné par son auteur survivant ».

Cette disposition prévoit clairement que le taux majoré n'est plus accordé dès que le père survivant ou la mère survivante est engagé dans les liens d'un mariage ou est établi en ménage.

En considérant que la réalité juridique du mariage ne peut, à elle seule, entraîner la perte du taux majoré lorsque ce mariage n'est pas concrétisé dans les faits par la cohabitation, le premier juge ajoute à l'article 56bis, § 2, une condition qui n'y figure pas.

Il n'y a pas lieu de retenir l'argumentation de Mme D. H. selon laquelle aucun élément modificatif de sa situation sociale et financière n'est venu accompagner le mariage.

Lorsque les conditions de l'article 56bis, § 2, sont remplies, il n'y a pas lieu de rechercher en outre si la cohabitation a procuré à l'allocataire un avantage économique (Cass., 13 janvier 1992, Chr. D.S. 1992, 293).

Par ailleurs, la Cour d'arbitrage a statué en ce sens que l'article 56bis ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution, lus isolément ou en combinaison avec l'article 191 de la Constitution, au motif notamment que dès lors que les allocations sont majorées à la suite du décès d'un des parents, quelle que soit la situation économique dans laquelle le décès place l'orphelin mineur, il n'est déraisonnable ni de retirer cette majoration si le parent survivant fonde un nouveau ménage, ni de l'octroyer à nouveau si cette situation prend fin et ce, sans avoir égard aux conséquences économiques de cet événement (Cour d'arbitrage, 24 mars 2004, Juris, JX043O1).

L'appel principal est fondé. Il doit être fait droit à la demande reconventionnelle à concurrence de la somme de 1.483,15 euro , une retenue de 125,06 euro ayant été opérée sur les allocations de janvier 1998.

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PAR CES MOTIFS,

La Cour du travail,

Statuant contradictoirement,

Vu la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire, notamment l'article 24,

Vu l'avis oral conforme de Monsieur le Substitut général délégué Christophe Vanderlinden ;

Reçoit les appels principal et incident ;

Les dit fondés ;

Réforme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a reçu la demande reconventionnelle et statué quant aux dépens ;

Dit la demande principale recevable et non fondée ;

Dit la demande reconventionnelle fondée dans la mesure ci-après ;

Condamne Mme D. H. à payer à l'O.N.A.F.T.S. la somme de 1.483,15 euro ;

En application de l'article 1017, alinéa 2, du Code judiciaire, met à charge de l'O.N.A.F.T.S. les frais et dépens de l'instance d'appel non liquidés par Mme D. H. ;

Ainsi jugé et prononcé, en langue française, à l'audience publique du 11 octobre 2007 par le Président de la 5ème Chambre de la Cour du travail de Mons composée de :

Madame J. BAUDART, Président,

Monsieur P. ODY, Conseiller social au titre d'employeur,

Monsieur A. DANIAUX, Conseiller social au titre de travailleur employé,

Monsieur S. BARME, Greffier.