Tribunal du Travail: Jugement du 16 octobre 2001 (Mons (Mons)). RG 543/00/M

Datum :
16-10-2001
Taal :
Frans
Grootte :
4 pagina's
Sectie :
Rechtspraak
Bron :
Justel F-20011016-7
Rolnummer :
543/00/M

Samenvatting :

Le paiement de la pension de retraite et de survie est suspendu pendant l'incarcération à l'étranger.

Vonnis :

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AUDIENCE PUBLIQUE DU 16 OCTOBRE 2001 RG n° 543/00/M Rép. A.J.N° La troisième chambre du Tribunal du travail de Mons, section de Mons, après en avoir délibéré a rendu le jugement suivant :
EN CAUSE DE :B.
demandeur, comparaissant en personne et assisté de Maître BEDORET, avocat, CONTRE :L'OFFICE NATIONAL DES PENSIONS (ONP), établissement public ayant son siège à 1060 Bruxelles, Tour du Midi, 3, défendeur, représenté par Madame SPECOGNA, Conseiller adjoint, déléguée par l'administrateur général avec l'accord du comité de gestion, dont la procuration figure au dossier, Vu les pièces de la procédure et, notamment, le recours reçu au greffe le 22 février 2000 ;
Vu l'article 704 du code judiciaire dont il a été fait application en vue de la fixation de la cause à l'audience publique du 11 septembre 2000, date à laquelle elle fut remise contradictoirement au 9 octobre 2000 ;
Vu, pour le demandeur, les conclusions déposées au greffe le 19.02.2001 ;
Vu, pour le défendeur, les conclusions reçues au greffe le 5.03.2001 ;
Vu, pour le demandeur, les conclusions reçues au greffe le 15.03.2001 et se substituant à celles déposées le 19.02.2001 ;
Vu l'article 750 § 1er du code judiciaire dont il a été fait application en vue de la fixation de la cause à l'audience publique du 11 juin 2001 ;
Entendu le conseil du demandeur et la mandataire du défendeur en leurs dires et moyens à l'audience publique du 11 juin 2001;
Vu les dossiers des parties ;
Vu l'avis du Ministère Public déposé au greffe le 6.07.2001 et notifié aux parties le 6.07.2001 ;
1. Objet de la demande.
Attendu que la demande a un double objet :
-d'une part, le demandeur conteste que le versement de sa pension de retraite (34.490 frs/an) et sa rente de vieillesse (9.163 frs/an) ait été suspendu du 1er août 1993 au 31 octobre 1999 c'est-à-dire durant son incarcération en France ; il réclame une somme de 255.960 francs au titre d'arriérés ;
-d'autre part, il reproche au défendeur d'avoir retenu illégalement une somme de 101.453 francs pour la verser au CPAS de Mons ; il sollicite paiement de cette somme ;
2. Les éléments de la cause.
Attendu que par décision du 17 février 1995, le défendeur a accordé, avec effet au 1er août 1993, au demandeur une pension de retraite de salarié d'un montant annuel de 34.490 francs ainsi qu'une rente de vieillesse d'un montant annuel de 9.193 francs ;
Que cependant à cette époque, le demandeur était incarcéré en France ;
Que le défendeur n'effectuera pas de versement durant cette incarcération, couvrant la période du 22 juillet 1992 au 16 octobre 1999, et le droit au paiement de la pension de retraite ne sera reconnu qu'à dater du 1er novembre 1999 ;
Que le demandeur fut informé de cette suspension de paiement et s'en plaignit auprès du défendeur mais aussi du Roi ;
Qu'il est à noter qu'une régularisation est intervenue en ce qui concerne la rente de vieillesse ; que le 17 avril 2000, le défendeur régla celle-ci y compris pour la période d'incarcération ;
Attendu qu'à dater de janvier 2000, le demandeur commença à percevoir sa pension de retraite mais sous déduction de retenues effectuées au profit du CPAS de Mons ;
3. La recevabilité.
Attendu que la demande a été introduite par requête reçue au greffe le 22 février 2000 ;
Que la question de la recevabilité se pose dès lors que le litige remonte à 1995 ;
Qu'il y a lieu de relever que le défendeur a pris, le 17 février 1995, une décision concernant l'octroi d'une pension de retraite et d'une rente de vieillesse ; qu'il n'y est pas prévu que les paiements seraient suspendus pour incarcération ; que du contraire, il y est expressément stipulé que " toutes les disposition utiles sont prises pour assurer le paiement " ; qu'il ne peut donc être reproché au demandeur de n'avoir pas formé recours contre cette décision qu'il ne conteste d'ailleurs pas ; que du contraire, il poursuit son exécution ;
Que certes, le demandeur s'est inquiété de la situation et s'en est ouvert au défendeur qui lui a répondu par courrier du 27 février 1995 ; que par celui-ci, il est attiré son attention sur le fait qu'étant incarcéré il ne percevra pas sa pension en application de l'article 70, §1 et 2 de l'A.R. du 21 décembre 1967 ;
Que ce courrier peut difficilement être considéré comme une décision ; que de toute façon, si il devait l'être, il convient de noter qu'il ne précise pas la possibilité d'introduire un recours, les délais pour ce faire, ..., en manière telle que la notification est entachée d'irrégularité et par conséquent nulle ;
Que le demandeur était toujours en droit de former recours le 22 février 2000 ; que la demande est donc recevable ;
4. Discussion.
Quant à la suspension des paiements de la pension de retraite :
Attendu que le demandeur soutient que la suspension du paiement de sa pension de retraite d'août 1993 à octobre 1999 est irrégulière ; que selon lui, l'article 70 susvisé permet la suspension du paiement uniquement lorsque l'incarcération a lieu en Belgique ;
Attendu que le Tribunal ne peut suivre cette position ;
Que l'article 70, §1er de l'A.R. du 21 décembre 1967 dispose que les pensions de retraite et de survie sont suspendues pour la durée de leur incarcération à l'égard des bénéficiaires détenus dans les prisons ;
Que le texte évoque une incarcération en prison sans autre précision ; qu'il faut en conclure que toute incarcération est visée sans limite de territoire, par exemple ;
Que prétendre que l'article 70, §1er vise les incarcérations en Belgique revient à ajouter une condition de suspension que la réglementation ne prévoit pas ;
Que la circonstance que le droit pénal - fondement de l'incarcération - est essentiellement territorial est sans effet puisqu'il s'agit ici d'appliquer une réglementation de sécurité sociale ;
Attendu que c'est à bon droit que le défendeur a suspendu le paiement de la pension de retraite du demandeur durant son incarcération d'août 1993 à octobre 1999 ;
Que la demande sera dite non fondée ;
Quant aux retenues :
Attendu que le défendeur a procédé à diverses retenues au profit du CPAS de Mons ; que ces retenues atteignent un montant de 101.453 francs (deux versements ont été opérés en faveur du CPAS : 80.453 francs le 7 août 2000 et 21.000 francs le 11 octobre 2000) ;
Que le demandeur conteste ces retenues en invoquant deux motifs : d'une part, le défendeur n'a pas respecté l'article 1410, § 4 du code judiciaire et d'autre part, les montants réclamés par le CPAS de Mons sont contestés (4 procédures opposent le demandeur au CPAS et sont actuellement pendantes devant une autre chambre du Tribunal de céans) ;
Attendu que l'article 1410, § 4 ne peut s'appliquer à la présente cause ; qu'en effet, cette disposition concerne la récupération des prestations payées indûment ; qu'or en l'espèce, il ne s'agit pas pour le CPAS de Mons de récupérer une aide payée indûment mais bien de récupérer une aide faite à titre d'avance ;
Que cette question est réglée par l'article 12 de la loi du 7 août 1974 selon lequel :
" Lorsqu'une personne vient à disposer de ressources en vertu de droits qu'elle possédait pendant la période pour laquelle un minimex lui a été payé, le CPAS récupère les sommes payées par lui jusqu'à concurrence du montant des ressources qui auraient dû être prises en considération pour le calcul du minimex à payer si l'intéressé en avait déjà disposé à ce moment.
Par dérogation à l'article 1410 du Code judiciaire, le CPAS est subrogé de plein droit, jusqu'à concurrence des sommes visées à l'alinéa 1er, dans les droits que le bénéficiaire peut faire valoir aux ressources susvisées. " Que le CPAS est donc subrogé dans les droits de l'assuré social - qui a bénéficié de son intervention via des avances récupérables - qui finit par disposer de ressources avec effets rétroactifs ;
Qu'il s'agit bien du cas d'espèce puisque le demandeur a bénéficié de l'intervention du CPAS de Mons à partir de son installation à Mons après sa sortie de prison, c'est-à-dire à partir de novembre 1999 ; que le défendeur reconnaît bien un droit au paiement de la pension de retraite du demandeur à partir du 1er novembre 1999 ;
Attendu que ces retenues faites en application de la subrogation prévue en faveur d'un CPAS ne peuvent être arbitraires et sont soumises au contrôle du pouvoir judiciaire ; qu'en théorie, l'intéressé peut soit invoquer une faute dans le chef de l'organisme qui procède à la retenue soit contester la subrogation telle que pratiquée par le CPAS ;
Que dans le cadre de la présente procédure, le Tribunal ne peut qu'examiner le comportement du défendeur ;
Qu'il appert des éléments de la cause que le défendeur a reçu une demande, datée du 28 juin 2000, de retenue du CPAS de Mons pour un montant de 145.130 francs (cf pièce 3j du dossier de l'Auditorat du travail) ; qu'immédiatement, il en a informé le demandeur (cf réponse de celui-ci du 3 juillet - pièce 3k) ;
Que le demandeur ne s'est opposé ni au principe des retenues ni au montant tel que fixé par le CPAS ;
qu'il semble même admettre des retenues à concurrence d'un montant de 170.672 francs ;
Que dès lors, le défendeur n'a pu commettre aucune faute en retenant une somme de 101.453 francs et en la versant au CPAS de Mons ; qu'il agit avec prudence en interpellant le demandeur avant toute exécution de la subrogation ; que son comportement est exempt de toute faute ;
Attendu qu'il convient de préciser que cette appréciation ne concerne que l'attitude du défendeur et en rien celle du CPAS de Mons ; que les litiges opposant le demandeur au CPAS de Mons ne ressortent pas de la compétence de la présente chambre du Tribunal de céans ; qu'il appartiendra à la chambre compétente et saisie de se prononcer sur le contentieux existant entre le demandeur et le CPAS de Mons ;
Attendu que la demande n'est pas fondée ;
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL STATUANT CONTRADICTOIREMENT, Vu la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire et ses modifications dont il a été fait application;
Vu l'avis écrit de Monsieur C. HANON, Substitut de l'Auditeur du travail, déposé au greffe le 6 juillet 2001 ;
Vu l'absence de répliques des parties à l'avis du Ministère Public ;
Dit la demande recevable mais non fondée.
En déboute le demandeur ;
Condamne, conformément à l'article 1017, alinéa 2 du code judiciaire, le défendeur aux frais et dépens de l'instance, liquidés dans le chef du demandeur à 3.960 francs étant l'indemnité de procédure taxée à ce montant ;
Ainsi jugé et prononcé, en langue française, à l'audience publique tenue au Palais de Justice-extension, rue de Nimy, 70 à 7000 Mons, par la troisième chambre du Tribunal du travail de Mons, section de Mons, en date du seize octobre 2001, où étaient présents :
Philippe LECOCQ, Juge de complément présidant la troisième chambre, José FAGOT, Juge social au titre d'employeur, Nadine MARCQ, Juge social au titre de travailleur employé, Marie-Anne COLLET, Greffier,