Cour de cassation: Arrêt du 27 octobre 1994 (Belgique). RG D940003F

Date :
27-10-1994
Language :
French Dutch
Size :
3 pages
Section :
Case law
Source :
Justel F-19941027-4
Role number :
D940003F

Summary :

Le conseil provincial de l'Ordre des médecins au tableau duquel est inscrit un médecin a, en règle, compétence pour exercer contre lui des poursuites disciplinaires et le médecin poursuivi ne peut, durant la procédure, se soustraire à cette juridiction, si ce n'est pour des raisons linguistiques et dans les limites des articles 36 et 38 de l'arrêté royal du 6 février 1970.

Arrêt :

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LA COUR,
Vu la décision attaquée, rendue le 21 décembre 1993 par le conseil d'appel d'expression française de l'Ordre des médecins;
Sur le moyen pris de la violation des articles 3, alinéa 4, de la loi du 25 juillet 1938 créant l'Ordre des médecins, 2, 5, alinéa 1er, 6, spécialement primo, alinéa 1er, de l'arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 relatif à l'Ordre des médecins, modifié par l'arrêté royal du 26 décembre 1985, 21, spécialement alinéa 2, alinéa 2, de l'arrêté royal du 6 février 1970 réglant l'organisation et le fonctionnement des conseils de l'Ordre des médecins, 1319, 1320 et 1322 du Code civil,
en ce que la décision attaquée confirme la décision dont appel en tant qu'elle diffère l'inscription du demandeur au tableau de l'Ordre provincial du Brabant d'expression française aussi longtemps qu'il n'a pas été statué sur les poursuites dont il fait l'objet de la part du conseil de l'Ordre des médecins d'expression néerlandaise de la province du Brabant au tableau duquel il est inscrit et dit qu'à ce moment il sera vérifié si le demandeur réunit toutes les conditions d'agréation à l'Ordre des médecins, aux motifs "que, contrairement à l'opinion de la décision dont appel, n'est plus litigieuse la question de savoir si la loi permet le transfert d'un médecin à l'un des Ordres de la province du Brabant alors qu'il se trouve inscrit au tableau de l'autre; que cette question a en effet été résolue le 26 janvier 1993 dans le sens de l'affirmative par notre conseil d'appel et que le pourvoi dirigé contre cette décision a été rejeté par l'arrêt du 21 octobre 1993 de la Cour de cassation, lequel arrêt décide expressément qu'aucune des dispositions légales indiquées dans le moyen ne permet de décider que le choix d'un des deux conseils provinciaux du Brabant est irrévocable'; qu'il n'en résulte cependant pas que la demande d'un tel transfert doive toujours être accueillie; qu'en effet, elle ne peut l'être lorsque l'intéressé fait l'objet de poursuites; que tel est le cas en l'espèce puisque le (demandeur) reconnaît qu'il fait actuellement l'objet de poursuites disciplinaires intentées par l'Ordre au tableau duquel il est inscrit; que les faits à l'origine de ces poursuites échappent à la compétence d'un autre conseil en raison de ce que le pouvoir disciplinaire appartient exclusivement à l'Ordre au tableau duquel le médecin objet des poursuites est inscrit; que ce principe se déduit de la ratio legis même de l'institution d'un Ordre professionnel des médecins et interdit dès lors l'admission d'un transfert d'un Ordre à un autre durant des poursuites en cours; que s'il en était autrement, quod non, une sanction disciplinaire pourrait ainsi être infligée à un médecin ne faisant plus partie de l'Ordre qui la prononce et au mépris de l'autorité disciplinaire exclusive de l'Ordre auquel il aurait déjà été transféré; que, contrairement à l'interprétation erronée qu'en donnent les conclusions déposées devant notre conseil, l'avis du Conseil national publié dans son Bulletin n° 60, de juin 1993, page 22, n'infirme nullement l'argumentation qui précède; qu'à bon droit, la déclaration d'appel relève que le motif de re
jet de la demande, à tout le moins provisoire, invoqué par la décision dont appel ne résulte pas de l'article 2 de l'arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967; que ce motif résulte de ladite ratio legis qui constitue en outre le fondement de l'article 9 du code de déontologie médicale lequel impose au médecin de s'abstenir même en dehors de l'exercice de sa profession, de tout acte de nature à entacher l'honneur ou la dignité de celle-ci",
alors que, première branche, la sanction des fautes disciplinaires commises par un médecin et faisant l'objet d'une information à sa charge au moment où il sollicite et obtient son admission puis demande son inscription auprès d'un autre Ordre est de la compétence exclusive du conseil de cet Ordre; que l'institution d'un Ordre professionnel des médecins n'emporte pas en lui-même la ratio legis selon laquelle des poursuites en cours interdiraient l'admission d'un transfert d'un Ordre à un autre; qu'en cas de demande de transfert, le dossier à charge de l'inculpé est transmis à l'Ordre de destination en l'état pour la continuation des poursuites, à sa seule diligence; que pareil transfert n'est d'ailleurs pas exclu par l'article 21, alinéa 2, alinéa 2, de l'arrêté royal du 6 février 1970 réglant l'organisation et le fonctionnement des conseils de l'Ordre des médecins; d'où il suit qu'en décidant que l'existence de poursuites en cours empêche le transfert d'un Ordre à un autre au motif que ce principe se déduirait de la ratio legis même de l'institution d'un Ordre professionnel des médecins, le conseil d'appel ne justifie pas légalement sa décision et viole les dispositions visées au moyen;
seconde branche, l'avis du Conseil national publié dans son Bulletin n° 60 de juin 1993, expose que : "Le Conseil National a, en sa séance du 20 février 1993, pris connaissance de votre lettre du 25 novembre 1992 relative à un problème de compétence qui vous oppose au conseil provincial de Flandre Orientale concernant le cas du Dr. X. Le Conseil national est d'avis que le conseil provincial au tableau duquel l'inculpé est inscrit au moment des poursuites, est seul compétent pour connaître des infractions déontologiques commises par ce dernier, même si, au moment des faits, celui-ci était inscrit au tableau d'un autre conseil provincial." (Bulletin du Conseil national, juin 1993, Vol. II, n° 60, p. 22); que l'avis du Conseil national publié dans son Bulletin n° 60 prévoit la possibilité pour un membre inculpé d'être transféré d'un Ordre à un autre en cours de procédure; d'où il suit que la décision attaquée, qui décide que cet avis du Conseil national n'infirme nullement l'argumentation selon laquelle l'interdiction de transfert d'un Ordre à un autre durant les poursuites en cours se déduirait de la ratio legis même de l'institution d'un Ordre professionnel des médecins, est contraire au sens et à la portée de la communication du Conseil national et viole par conséquent la foi due à cet acte (violation des articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil) :
Quant à la première branche :
Attendu qu'en vertu de l'article 5 de l'arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 relatif à l'Ordre des médecins, il est établi dans chaque province un conseil provincial de l'Ordre des médecins qui a autorité et juridiction sur les médecins qui sont inscrits, conformément à l'article 2, au tableau de l'Ordre de cette province;
Qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 25 juillet 1938 créant l'Ordre des médecins, il est créé dans la province de Brabant, deux conseils de l'Ordre : l'un utilise la langue néerlandaise, l'autre utilise la langue française;
Attendu qu'en vertu de l'article 6 de l'arrêté royal n° 79 précité, chaque conseil provincial doit veiller au respect des règles de la déontologie médicale et au maintien de l'honneur, de la discrétion, de la probité et de la dignité des médecins visés à l'article 5 et est chargé, à cette fin, de réprimer disciplinairement les fautes de ces médecins;
Attendu que l'article 36 de l'arrêté royal du 6 février 1970 réglant l'organisation et le fonctionnement des conseils de l'Ordre des médecins prévoit, en matière disciplinaire, la possibilité pour tout médecin qui ne comprend pas suffisamment la langue du conseil provincial dont il dépend, de demander son renvoi à un conseil provincial utilisant l'autre langue;
Que l'article 38 du même arrêté refuse cette possibilité aux médecins domiciliés dans l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale et qui, pour l'inscription au tableau de l'Ordre, ont porté leur choix sur un des conseils provinciaux du Brabant;
Attendu qu'il résulte de ces dispositions qu'en règle, le conseil provincial où est inscrit le médecin a compétence pour exercer contre lui des poursuites disciplinaires et que le médecin poursuivi ne peut, durant la procédure, se soustraire à cette juridiction, si ce n'est pour des raisons linguistiques et dans les limites des articles 36 et 38 précités;
Que l'article 21, alinéa 2, du même arrêté, qui dispose que le bureau du conseil où le demandeur est inscrit adresse le dossier au conseil saisi de la demande de la nouvelle inscription, ne vise que le dossier décrit au paragraphe 1er de cet article, sans modifier les règles de la compétence en matière disciplinaire;
Attendu que la décision attaquée constate que le demandeur fait l'objet de poursuites disciplinaires devant le conseil de l'Ordre d'expression néerlandaise de la province de Brabant, au tableau duquel il est inscrit;
Qu'en décidant de différer l'inscription du demandeur au tableau de l'Ordre provincial du Brabant d'expression française aussi longtemps qu'il n'a pas été statué sur les poursuites dont il fait actuellement l'objet devant le conseil de l'Ordre des médecins d'expression néerlandaise de la province de Brabant au tableau duquel il est inscrit, le conseil d'appel a fait une exacte application des dispositions légales invoquées par le demandeur;
Qu'en cette branche, le moyen ne peut être accueilli;
Quant à la seconde branche :
Attendu qu'il ressort du Bulletin n° 60 du Conseil national, régulièrement déposé, que ce conseil, dans son avis du 20 février 1993, a considéré "que le conseil provincial au tableau duquel l'inculpé est inscrit au moment des poursuites est seul compétent pour connaître des infractions déontologiques commises par ce dernier même si, au moment des faits, celui-ci était inscrit au tableau d'un autre conseil provincial";
Qu'en énonçant que cet avis n'infirme nullement l'argumentation qu'elle développe, la décision attaquée ne viole pas les articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil;
Qu'en cette branche, le moyen manque en fait;
PAR CES MOTIFS,
Rejette le pourvoi;
Condamne le demandeur aux dépens.