Cour de cassation: Arrêt du 6 juillet 2016 (Belgique). RG P.16.0717.F

Date :
06-07-2016
Language :
French Dutch
Size :
1 page
Section :
Case law
Source :
Justel F-20160706-4
Role number :
P.16.0717.F

Summary :

Si le risque de fuite doit être justifié par des éléments objectifs et sérieux, l'administration dispose d'une large marge d'appréciation quant à l'évaluation de ceux-ci; de la circonstance qu'un étranger en séjour illégal et interdit d'accès a refusé d'obtempérer aux différents ordres de quitter le territoire qui lui ont été notifiés, il peut se déduire que l'intéressé n'obtempérera pas volontairement à un nouvel ordre de même nature, et qu'il soit tenté de prendre la fuite pour éviter d'être appréhendé en vue de son rapatriement.

Arrêt :

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N° P.16.0717.F

ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d'Etat à la Politique de migration et d'asile, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, WTC II, chaussée d'Anvers, 59B,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Didier Matray et Sophie Matray, avocats au barreau de Liège,

contre

B. O., étranger, privé de liberté,

défendeur en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 7 juin 2016 par la cour d'appel de Mons, chambre des mises en accusation.

Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Benoît Dejemeppe a fait rapport.

L'avocat général Dirk Thijs a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le moyen :

Quant à la première branche :

Le moyen soutient qu'en levant la mesure de rétention du défendeur, l'arrêt viole les articles 1, 11°, 7, alinéa 3, et 62 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. Le demandeur allègue en substance que le principe de subsidiarité visé à l'article 7, alinéa 3, précité, a été respecté par l'autorité administrative et qu'en décidant du contraire, la chambre des mises en accusation a violé cette disposition.

L'article 1, 11°, de la loi du 15 décembre 1980 dispose qu'il faut entendre par risque de fuite, « le fait pour un ressortissant d'un pays tiers visé par une procédure d'éloignement de présenter un risque actuel et réel de se soustraire aux autorités. Pour ce faire, le ministre ou son délégué se base sur des éléments objectifs et sérieux. ». En vertu de l'article 7, alinéa 3, à moins que d'autres mesures suffisantes mais moins coercitives puissent être appliquées efficacement, l'étranger peut être maintenu aux fins de son éloignement pendant le temps nécessaire à l'exécution de la mesure, en particulier lorsqu'il existe un risque de fuite ou lorsque le ressortissant du pays tiers empêche ou évite la préparation du retour ou de l'éloignement.

Si le risque de fuite doit être justifié par des éléments objectifs et sérieux, l'administration dispose d'une large marge d'appréciation quant à l'évaluation de ceux-ci. De la circonstance qu'un étranger en séjour illégal et interdit d'accès a refusé d'obtempérer aux différents ordres de quitter le territoire qui lui ont été notifiés, il peut se déduire que l'intéressé n'obtempérera pas volontairement à un nouvel ordre de même nature, et qu'il soit tenté de prendre la fuite pour éviter d'être appréhendé en vue de son rapatriement.

L'autorité administrative a justifié la mesure contestée par le fait que le défendeur demeure sur le territoire sans être porteur des documents requis, qu'il ne respecte pas la réglementation en vigueur, qu'il n'a pas donné suite à deux mesures d'éloignement, dont la seconde lui a été notifiée en octobre 2015, et qu'il est peu probable qu'il obtempère à un nouvel ordre de quitter le territoire. La décision de maintien dans un lieu déterminé ajoute que, son éloignement ne pouvant être effectué immédiatement, la rétention du demandeur s'impose pour permettre l'octroi par ses autorités nationales d'un titre de voyage.

En considérant, sur le fondement de cette motivation, que l'autorité administrative n'a pas vérifié le principe de subsidiarité, la chambre des mises en accusation n'a pas légalement justifié sa décision.

Il n'y a pas lieu d'examiner les autres branches du moyen, qui ne sauraient entraîner une cassation dans des termes différents du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse l'arrêt attaqué ;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;

Laisse les frais à charge de l'Etat ;

Renvoie la cause à la cour d'appel de Mons, chambre des mises en accusation, autrement composée.

Lesdits frais taxés à la somme de cent quarante-trois euros quatre-vingt-huit centimes dus.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, chambre des vacations, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, premier président, Eric Dirix, président de section, Benoît Dejemeppe, Mireille Delange et Koenraad Moens, conseillers, et prononcé en audience publique du six juillet deux mille seize par le chevalier Jean de Codt, premier président, en présence de Dirk Thijs, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.

F. Gobert K. Moens M. Delange

B. Dejemeppe E. Dirix J. de Codt