Arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles dd. 11.12.1998
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Précompte mobilier,Attribution de revenus mobiliers,Inscription à un compte régularisation
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Arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles dd. 11.12.1998
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Document type : Belgian justice Title : Arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles dd. 11.12.1998 Tax year : 2005 Document date : 11/12/1998 Document language : FR Name : B 98/28 Version : 1 Court : appeal
ARRET B 98/28 Arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles dd. 11.12.1998 Le Courrier Fiscal 1999/216 Précompte mobilier - Attribution de revenus mobiliers - Inscription à un compte régularisation L'inscription au passif du bilan d'une société, dans les comptes de régularisation, d'un compte 'Intérêts à payer', n'est pas la traduction d'une prise en charge d'intérêts échus mais peut être, comme en l'espèce, la traduction comptable d'une dette incontestable et certaine portant sur des intérêts qui deviendront exigibles, de l'accord des parties, dans un avenir proche et dont le terme est le jour où la société viendra à meilleure fortune. L'inscription sur ce compte du passif ne peut être considérée comme une attribution au sens de l'art. 171, al. 2 CIR, étant donné qu'il ne s'agit pas d'un compte individualisé ouvert au seul profit d'un bénéficiaire donné. Il n'y a pas non plus, au sens de cette même disposition, et à défaut de preuve par le fisc d'une simulation, d'accord sur l'indisponibilité éventuelle d'un compte individualisé ouvert au profit du bénéficiaire: les éléments de fait révèlent plutôt l'existence forcée, par la situation préoccupante de la société débitrice, d'un accord dont la finalité est de suspendre l'échéance des intérêts jusqu'à ce que la société vienne à meilleure fortune, ce qui justifie la comptabilisation opérée. Sixième chambre fiscale N° de la cause: 1990/FR/537 EN CAUSE DE: La S.A. SIPRO, dont le siège social est établi à 1332 Genval, avenue de la Tasnière, 11; inscrit au registre de commerce de Nivelles sous le n° 37918, requérante, représentée par Maître Jacques Malherbe, avocat, (1060 Bruxelles, rue Henri Wafelaerts, 47-51) CONTRE: L'ETAT BELGE, représenté par Monsieur le Ministre des Finances, en la personne de Monsieur le Directeur régional des contributions directes de Namur, dont les bureaux sont établis à 5000 Namur, rue des Bourgeois, 7, bloc C 60, représenté par Maître Dominique Leonard, avocat, (1370 Jodoigne, avenue des Commandants Borlée, 43) ***** La cour, après délibéré, prononce en audience publique l'arrêt suivant: Vu le recours fiscal déposé, en même temps que sa dénonciation à l'administration, au greffe de la cour le 9 novembre 1990, dirigé contre la décision directoriale rendue le 3 octobre 1990, rejetant la réclamation introduite contre les cotisations au précompte mobilier, enrôlées sous les articles 688451, 688441, 688431, 688421 et 788022 des exercices d'imposition 1981, 1982, 1983, 1984 et 1985 pour des montants de 123.684 frs, 179.160 frs, 192.008 frs, 131.560 frs et 151.904 frs; Le recours fiscal est recevable. La procédure de taxation suivie est celle prévue par l'art. 256 du CIR/64. LES FAITS Madame Stinglhamber B. consentit un prêt de 6.489.000 fr. à la société anonyme Sipro à partir de mai 1976, moyennant un intérêt de 10 % l'an. La requérante paya les intérêts jusqu'en fin novembre 1978 par virement à son compte bancaire et versa le précompte mobilier relatif à ces intérêts à l'administration sur base des déclarations 273 établies. A partir de l'année 1979 les intérêts de ce prêt ne furent plus payés. Le 6 avril 1979 Mme B. Stinglhamber protesta par écrit, au motif que les intérêts ne lui parvenaient plus et menaça de reprendre une partie de son prêt à défaut d'un paiement régulier de ses intérêts. Le 5 septembre 1979 la société anonyme SIPRO régla la tranche d'intérêts portant sur la période des mois de décembre 1978 à février 1979 et paya le précompte mobilier correspondant. A dater du 1er mars 1979, plus aucun montant n'a été versé à Mme Stinglhamber B. Cette situation a été comptabilisée par la requérante de la sorte. Le capital prêté se retrouve au passif du bilan: sous "VIII", "Dettes à plus d'un an", "H", "Mme B. Stinglhamber" 6.489.000 Fr. Au bilan du 31 décembre 1984 le montant du capital sera ramené à 3.490.113 Fr. En ce qui concerne les intérêts échus à partir du 1er mars 1979 la requérante a comptabilisé cette dette au passif de son bilan sous le poste "X", intitulé "Comptes de régularisation", "Intérêts à payer". L'évolution de ce compte entre 1979 et 1985 révèle les opérations suivantes (en Fr.):
Madame Stinglhamber B. effectua à partir du 1er mars 1979 divers prélèvements repris dans la comptabilité sous un compte courant au nom de Mme Stinglhamber à l'actif du bilan de la société anonyme Sipro, sous le poste VII "créances à un an au plus sous", "B", "Autres créances", C/C Stinglhamber". Ce compte exclusivement débiteur relève au
Au bilan du 31 décembre 1985 ne figure plus de créance à l'égard de Mme Stinglhamber à l'actif. Par contre au compte de régularisation sous la rubrique X du passif figure toujours un compte "intérêts à payer" d'un montant de 3.341.515 Fr. constitué des intérêts à payer à Mme B. Stinglhamber. Il résulte de la situation comptable de la société anonyme Sipro telle qu'elle apparaît des bilans des années 1978 à 1984 que la requérante encaisse diverses pertes et qu'elle dispose de liquidités importantes. Selon la requérante ces liquidités disponibles ne reflètent qu'une partie de la réalité. Les mêmes bilans renseignent que la société était débitrice de montants importants envers des sociétés de crédit pendant cette période. Au bilan 31.12.1978 les disponibles à l'actif se chiffrent à 1.611.139 fr. tandis que les dettes envers les établissements de crédits au passif se chriffrent à 17.130.000 Fr., au bilan du 31.12.1979, le rapport est de 5.925.605 à 21.539.704 fr., au bilan du 31.12.1980, de 5.853.949 à 6.494.307, au bilan du 31.12.1981 de 7.365.315 à 6.824.280 Fr., au bilan du 31.12.1982 de 11.686.779 à 7.350.511 au bilan du 31.12.1983, de 5.718.162 à 6.647.264 et au bilan du 31.12.1984 de 4.322.304 à 6.844.048 Fr. Il y a lieu également selon la requérante de mettre en face des valeurs disponibles de l'actif les sommes dues aux établissements de crédit. Cette comparaison permettrait de démontrer que les liquidités qui apparaissent au bilan proviennent en large partie des emprunts destinés à des projets précis dont ils ne pouvaient être détournés. LA TAXATION En réponse à deux demandes de renseignements envoyées le 28 septembre 1982 à la société anonyme Sipro relatifs aux exercices 1981 et 1982, dans deux lettres qu'il adresse au contrôleur en chef des contributions de Wavre sociétés le 25 octobre 1982 le comptable de la société anonyme Sipro J. EVRAERTS soutient que la situation débitrice du compte courant de Mme Stinglhamber B. correspond à une avance sur les intérêts dus par la société anonyme Sipro sur le prêt qui lui a été consenti par Mme Stinglhamber, raison pour laquelle il n'y a pas lieu d'imposer l'octroi d'un avantage en nature par la mise à disposition d'un prêt sans intérêt, par l'intermédiaire du compte courant, dans le chef de Mme B. Stinglhamber. Aucun avantage de toute nature n'a été retenu dans le chef de Mme Stinglhamber B. sur le compte courant débiteur par le contrôleur en chef de Wavre sociétés pour les exercices 1981 et 1982. *** Le 24 janvier 1985 le contrôleur annonce une visite pour procéder à l'examen de la situation fiscale de la société anonyme SIPRO relative aux exercices 1983 et 1984. Cette visite s'effectue le 7 février 1985. Cette visite est suivie d'un avis de rectification de la déclaration du 4 mars 1985 émanant du contrôle des sociétés de Wavre. Dans cet avis de rectification le contrôleur soutient que les montants des "intérêts à payer" repris au passif concourent à la formation des bénéfices sociaux imposables étant donné que la date d'attribution ou de mise en paiement des intérêts à payer à Mme Stinglhamber n'a pas encore été fixée au moment où doit être établie la cotisation à l'impôt des sociétés de l'exercice d'imposition afférent à la période imposable envisagée. Ces montants seront repris comme provision taxable sous le couvert de l'art. 22 du Code des impôts sur les revenus (ancien). Suite à cet avis, l'administration a incorporé les sommes litigieuses dans l'assiette imposable sous forme de provisions taxables pour les exercices d'imposition 1983 et 1984. L'imposition fut théorique étant donné que cette incorporation a servi à éponger des pertes antérieures qui s'élevaient à 1.681.016 fr. et 1.247.517 fr. Après quoi le montant des pertes encore reportables a été ramené à 461.696 fr. *** Un nouveau contrôle de l'Inspection Spéciale de Impôts de Nivelles a débuté le 3 avril 1986 pour se terminer le 6 janvier 1987. Dans le cadre de cette vérification diverses demandes de renseignements ont été envoyés à la requérante. En réponse à ces demandes le requérante a repondu dans ses lettres du 23 juin 1986 et du 21 août 1986 "Il n'existe pas de convention écrite entre la société anonyme SIPRO et Mme Stinglhamber au sujet des intérêts ... Les intérêts n'ont été ni attribués, ni mis en payement. Si la dette n'est pas exigée immédiatement, c'est grâce à la compréhension de Mme Stinglhamber et par faute de liquidités. Aucun actionnaire n'a intérêt à exiger l'accessoire au détriment du principal. Il existe un accord tacite en ce sens, sans plus." Une notification d'imposition d'office pour absence de déclaration est envoyée le 12 novembre 1986 par l'Inspection Spéciale des Impôts de Nivelles au sujet des intérêts relatifs aux années 1980 à 1984. Dans cette notification le taxateur notifia son intention d'enrôler au précompte mobilier, le précompte mobilier sur les intérêts actés pendant les différentes années au compte "intérêts à payer" (1) du passif repris ci-dessus. Pour établir les impositions afférentes aux exercices 1981 à 1984 l'administration a invoqué l'art. 263 par 2, 1°, du Code des impôts sur les revenus (ancien). A la page 3 de cette notification d'imposition d'office le taxateur fit valoir qu'il était apparu qu'existait un accord tacite entre la société anonyme Sipro et Mme Stinglhamber pour la comptabilisation des intérêts à payer à un compte distinct du passif du bilan (réponses aux demandes de renseignements du 23/6/1986). Une notification d'imposition d'office est envoyée le 5 février 1987 par le contrôleur en chef à Ottignies - Sociétés au sujet des intérêts de l'année 1985. Les cotisations relatives au précompte mobilier des exercices 1981 à 1984 ont été enrôlées le 30 décembre 1986. Celle relative à l'exercice 1985 a été enrôlée le 24 mars 1987. LES RECLAMATIONS Par ses réclamations reçues le 27 mars 1987 pour les exercices 1981, 1982, 1983, et 1984 et le 15 décembre 1987 pour l'exercice 1985, la requérante a reclamé contre les cotisations. Elle invoqua une violation de l'art. 259 al 2 du Code des impôts sur les revenus (ancien) étant donné que la notification d'imposition d'office spécifiait que le délai spécial d'imposition était applicable sans avoir déterminé avec précision les indices de fraude et postula l'annulation des cotisations relatives aux exercices 1981, 1982, 1983. Elle invoqua également que les conditions d'application de l'art. 171 du Code des impôts sur les revenus (ancien) n'étaient pas réunies en l'espèce par l'inscription des intérêts à un compte repris au passif du bilan intitulé "intérêts à payer à Mme Stinglhamber", une telle inscription ne pouvant être considérée comme une attribution. L'accord de Mme Stinglhamber quand à l'indisponibilité invoquée par l'administration est selon la requérante sans incidence à défaut d'attribution. En outre les prélèvements de la requérante de son compte courant ne peuvent pas être considérés non plus comme attributions. La requérante a dans sa lettre du 8 novembre 1988 développé le grief qu'en l'absence de mention de la date du début du délai prévu par l'art. 263 du Code des impôts sur les revenus (ancien), le taxateur ne pouvait pas se prévaloir dudit délai et que l'administration n'avait pas apporté la preuve du point de départ du délai invoqué, ni communiqué cette date à la requérante, de sorte qu'elle ne pouvait dès lors se prévaloir dudit délai. L'inspecteur instructeur a relevé dans son rapport à ce sujet qu'effectivement le contrôleur en chef de l'Inspection Spéciale des Impôts avait perdu de vue les instructions administratives reprises dans la Comm. I.R. sous le n° 263/8 et avait omis dans la notification d'imposition d'office du 12 novembre 1986 de mentionner la date du document établi spécialement par le fonctionnaire qui avait constaté l'infraction. Pour l'inspecteur l'imposition ne peut être maintenue pour les exercices 81, 82 et 83 étant donné que l'omission de l'administration a mis le redevable dans l'impossibilité de vérifier la légalité de la taxation quant au délai fixé au § 2 de l'art. 263 du Code des impôts sur les revenus (64). La taxation lui paraît illégale à défaut de cette mention qui tend à démontrer le début du délai et il propose l'annulation des cotisations avec réenrôlement sur pied de l'art. 260 Code des impôts sur les revenus (ancien). Ce point de vue est contesté par l'inspecteur de l'Inspection Spéciale des Impôts qui fait valoir qu'aucune disposition légale ne prévoit l'établissement du document visé au com.IB et que l'omission ne peut dès lors pas entraîner l'illégalité des cotisations d'une part et que le taxateur a, en faisant référence aux documents sur base desquels le taxateur a constaté les infractions commises en matière de précompte mobilier, apporté la preuve de l'application du délai. Le directeur régional a confirmé qu'aucune des cotisations n'est assise sur l'art. 259 al 2 du Code des impôts sur les revenus (ancien). Les cotisations ont été enrôlées en application de l'art. 263, § 2, 1° du Code des impôts sur les revenus (ancien) et la preuve du délai incombe selon lui à l'administration. Il ne contesta pas l'omission invoquée concernant la mention préalable du début du délai de 12 mois prévu par l'art. 263, § 2, 1° du Code des impôts sur les revenus (ancien) mais a considéré que, cette omission n'engendre pas l'illégalité des cotisations établies et que la preuve du début pouvait être administrée. Le directeur régional poursuivit en relevant qu'il résulte de l'examen du dossier que les services de l'Inspection Spéciale des Impôts n'ont débuté l'examen de la situation fiscale de la société anonyme SIPRO qu'entre le 26 febrier 1986 et le 3 avril 1986 pour terminer ledit examen en janvier 1987 et qu'il ne fait dès lors aucun doute que les services de l'Inspection Spéciale des Impôts n'ont pas pu constater les infractions avant le 3 avril 1986, donc dans le délai de 12 mois de l'enrôlement le 30 décembre 1986 des cotisations relatives aux exercices 1981 à 1983. Cet examen portait selon lui sur l'exercice comptable clôturé le 31.12.1984. et a permis de constater l'absence de déclaration au précompte mobilier la première quinzaine de janvier de l'année 1985 au précompte mobilier dû sur les intérêts attribués à Mme Stinglhamber B. et a permis de conclure que pareille infraction avait été commise pour les exercices précédents ce qui permettait la possibilité d'utiliser le délai extraordinaire prévu à l'art. 263, § 2, 1°, Code des impôts sur les revenus (ancien). LA DISCUSSION Quant à la forclusion La requérante fait grief à l'administration d'avoir violé le prescrit de l'art 263, § 2, 1° dans la mesure où le taxateur a omis de mentionner le début du délai de 12 mois dans la notification d'imposition d'office du 12 novembre 1986. Elle fait valoir que les instructions administratives (Comm.IR 263/7 et 8) enjoignent aux services de taxation de mentionner la date de début du délai sur ... "un document établi spécialement par le fonctionnaire qui a constaté l'infraction et de mentionner la date de ce document dans la première communication faite au contribuable en cause et relative à la taxation envisagée". Ces directives trouvent leur origine selon la requérante dans les travaux préparatoires de la loi du 5 janvier 1976 et plus spécialement dans la réponse du ministre à une question de la Commission des Finances du Sénat "qu'il va de soi que le contribuable auquel on opposera le nouvel article 263 aura le droit de connaître la date qui est le point de départ spécial et que c'est à l'administration qu'incombera la preuve de cette date (2)". * La requérante invoque que l'administration a par la non observation par l'administration de la directive dans son commentaire violé le principe de bonne administration qui veut que le fisc observe ses directives et en assure le respect. Par cette omission l'administration aurait violé les droits de la défense de la requérante étant donné qu'elle n'a pas pu avant la cotisation et dans la phase administrative contrôler le début du délai. Le texte de la loi ne prévoit pas l'obligation de notifier dès la notification d'imposition d'office, le début du délai prévu par l'art. 263, § 2, 1° du Code des impôts sur les revenus (ancien). L'absence de ce renseignement ne peut dès lors pas avoir pour conséquence la nullité de la cotisation basée sur l'art. 263 du Code des impôts sur les revenus (ancien). Ceci n'empêche que l'absence de cette mention met l'administration dans une situation délicate quant à l'administration de la preuve qui lui incombe du fait que la cotisation a été enrôlée dans le délai extraordinaire de 12 mois prévu à peine de forclusion par l'art. 263 du Code des impôts sur les revenus (ancien). L'inobservation du prescrit du Comm/I.R. par l'administration n'a pas eu pour conséquence une méconnaissance des droits de la défense étant donné que la requérante a pu lors de phase administrative comme devant la Cour contester l'inobservation alléguée du délai prévu par l'art 263, § 2, 1° du Code des impôts sur les revenus (ancien) et profiter de la situation peu confortable dans laquelle se trouve l'administration, par l'omission du taxateur, pour administrer la preuve qu'au jour de l'enrôlement 12 mois ne s'étaient pas étaient pas écoulés à partir du constat de l'infraction. La requérante invoque également le fait que directeur a depuis la loi du 16 mars 1976 perdu le pouvoir administratif de compléter l'oeuvre de taxation qu'il détenait pour ne maintenir qu'un pouvoir juridictionnel et qu'en administrant lui même la preuve du début du délai, c'est oeuvre de taxation que le directeur aurait commise. Le directeur régional appelé à exercer son pouvoir juridictionnel doit examiner tous les éléments du dossier administratif. Lorsque en statuant sur le fondement d'un grief invoqué, après l'analyse des pièces du dossier administratif soumis à son appréciation, il arrive à la conclusion que l'enrôlement du 30 décembre 1986 est intervenu dans le délai de 12 mois parce que l'Inspection Spéciale des Impôts ne pouvait pas avoir constaté l'infraction avant le 3 avril 1986 et que ce service avait nécessairement fait le constat avant le 12 novembre 1986, il ne complète aucunement l'oeuvre de taxation mais examine dans le cadre de son pouvoir juridictionnel la légalité de l'impôt au regard d'un grief relatif à la forclusion du droit d'imposer invoqué par le redevable. * L'inspecteur à l'Inspection Spéciale des Impôts J. Dewael a notifié dans la notification d'imposition d'office ce qui suit: "Lors de l'examen de votre déclaration à l'impôt des sociétés de l'exercice d'imposition 1985 revenus 84 il est apparu: ... qu'il existait un accord tacite entre la société anonyme Sipro et Mme Stinglhamber pour la comptabilisation des intérêts à payer à un compte distinct du passif du bilan (réponses aux demandes de renseignements du 23 juin 1986). Selon l'administration l'infraction a été constatée par elle le 22 août 1986 date à laquelle se rapporte la constatation par l'Inspection Spéciale des Impôts de "l'accord tacite" qui aurait existé entre Mme B. Stinglhamber et la société anonyme SIPRO. La requérante invoque en conclusions l'illégalité de ce constat par l'Inspection Spéciale des Impôts provoquée par l'inobservation de l'obligation prescrite par l'art. 240, al. 3 du Code des impôts sur les revenus (ancien) étant donné que les agents de l'Inspection Spéciale des Impôts auraient investigé sur les exercices 1981 à 1983 sans notifier au préalable par écrit et de manière précise les indices de fraude en ce qui la concernait. L'administration conteste la recevabilité du grief qui est selon elle tardif car invoqué après l'expiration du délai de 60 jours après le dépôt du dossier administratif prévu sous peine de déchéance par l'art. 279 du Code des impôts sur les revenus (ancien). Vainement la requérante réduit le grief relatif à la violation de l'art. 240 al 3 du Code des impôts sur les revenus (ancien) au niveau d'un moyen nouveau élaboré dans le cadre du grief visant la violation de l'art. 263, § 2, 1° du Code des impôts sur les revenus (64) en ce sens que ce moyen se limite à une tentative d'empêcher l'administration de se prévaloir des contestations de l'infraction faites par le service de l'Inspection Spéciale des Impôts qui sont considérées par l'administration comme le début du délai du droit d'enrôler. L'inobservation de l'art. 240, al 3 du Code des impôts sur les revenus (64) et l'impossibilité pour l'administration de se prévaloir des constatations faites lors de l'investigation effectuée sans la notification légale préalable des indices de fraude est une question nouvelle posée par la requérante à la Cour. Cette question se divise en une branche principale relative à la violation de l'art. 240 al 3 du Code des impôts sur les revenus (ancien) et une subsidiaire concernant les conséquences juridiques de la nullité que pourrait engendrer l'inobservation dudit article. Il est sans incidence que la réponse à cette question subsidiaire puisse avoir pour conséquence d'infirmer des constatations prises par l'administration comme point de départ d'un délai prévu à peine de forclusion par l'art. 263, § 2, 1° du Code des impôts sur les revenus (ancien) pour la qualification de grief nouveau ou de moyen nouveau de la question relative à la violation de l'art. 240, al. 3 du Code des impôts sur les revenus (ancien). Le fait que la violation de l'art. 240 al 3 du CIR pourrait avoir pour conséquence d'infirmer des pièces nécessaires à la démonstration d'un délai prévu par l'art. 163, § 2, 1° ne peut pas enlever à la question posée à la Cour sa véritable nature à savoir celle d'un grief relatif à l'illégalité d'investigations suite à l'inobservation alléguée d'une obligation prévue par l'art. 240 al 3 du Code des impôts sur les revenus (ancien) et le réduire à un moyen nouveau invoqué dans le cadre de l'inobservation de l'art. 263, § 2, 1° du Code des impôts sur les revenus (64) tel que la requérante le présente erronément. Le grief nouveau invoqué après l'expiration du délai de forclusion prévu à l'art. 282 du Code des impôts sur les revenus (64) est tardif et partant irrecevable. * La requérante conteste l'affirmation de l'administration selon laquelle les infractions au précompte mobilier n'ont pu être constatées avant l'intervention de l'Inspection Spéciale des Impôts en 1986. L'administration était, selon la requérante, au courant de tous les éléments du dossier tel que le démontre l'avis rectificatif du 4 mars 1985 mais elle n'avait pas estimé qu'il y avait matière à infraction à l'art. 171 du Code des impôts sur les revenus (ancien). Après avoir constaté qu'il n'y avait selon elle eu ni attribution ni mise en paiement des intérêts pour 1982 et 1983, malgré le fait qu'elle ne pouvait pas ignorer que cette situation n'avait pas donné lieu à une discorde au sein de la société du fait de la qualité de Mme Stinglhamber, et du fait que le précompte mobilier n'avait pas été réglé, l'administration aurait en fait donné aux éléments une autre qualification sur le plan de la taxation en incorporant les montants litigieux comme provisions taxables en vertu de l'art. 22 du CIR dans la base taxable et décidé de taxer les provisions constituées par l'inscription au compte. Lorsque l'administration a, en décembre 1986, imposé les sommes au précompte mobilier elle s'est limité à charger le point de vue adopté dans l'avis de rectification de la déclaration du 4 mars 1985 et a décidé qu'il y avait eu attribution au sens de l'art. 171 al 2, sans d'ailleurs revoir à la hausse les pertes reportables pour les exercices ultérieurs. La requérante donne une interprétation exacte du contenu de la lettre du 21 août 1986 quand elle soutient qu'elle a seulement par cette lettre relevé que Madame Stinglhamber, mise en face des difficultés de trésorerie de la société anonyme SIPRO avait été contrainte d'accepter qu'à partir de 1979 ses intérêts ne lui soient plus payés pour n'être plus que comptabilisés comme restant à payer et qu'elle n'avait aucun intérêt à accroître les difficultés de la société, et par la même occasion mettre en péril le capital du prêt qu'elle lui avait consenti. L'administration ne démontre pas que l'accord donné par la requérante serait à l'origine de l'indisponibilité. Les bilans renseignent par contre une indisponibilité qui a contraint Mme Stinglhamber d'accepter que les intérêts soient comptabilisés de cette manière au passif du bilan. L'élément nouveau dont se prévaut l'administration n'existe pas étant donné que l'administration a donné à la réponse de la requérante une portée qu'elle n'avait pas en se saissisant d'une partie de la lettre datée du 21 août 1986 pour en déduire un accord de Mme Stinglhamber B., alors qu'il résulte de son ensemble que celle-ci a consenti afin d'éviter le pire, d'accepter cette situation alors que l'administration ne pouvait pas ignorer cette situation après le contrôle effectué en début de l'année 1985. L'indisponibilité résulte de la situation précaire de la requérante, débitrice des intérêts, dont Mme Stinglhamber n'entendait pas accroître les difficultés. Le fait que Mme Stinglhamber, forcée par la situation précaire de la société, ait consenti à ne pas se voir attribuer l'intérêt pendant les exercices concernés, n'a pas pu échapper aux contrôleurs du service contrôle des sociétés de Wavre lors de la vérification annoncée le 24 janvier 1985 et ayant abouti à l'avis de rectification de la déclaration du 5 mars 1985. C'est dès lors à juste titre que la requérante fait valoir que l'enrôlement du 30 décembre 1986 est entâché de forclusion pour les exercices 1981, 1982 et 1983. En ce qui concerne l'exercice 1984 la cotisation a été enrôlée dans le délai de 3 ans prévu par l'art. 259 du Code des impôts sur les revenus (ancien) et est dès lors établie dans le délai légal. Quant à l'application de l'art. 171 al 2 du Code des impôts sur les revenus (ancien) L'art. 171 du Code des impôts sur les revenus (ancien) dispose: L'attribution ou la mise en paiement des revenus entraîne la débition du précompte mobilier. Est notamment considérée comme attribution, l'inscription d'un revenu à un compte ouvert au profit du bénéficiaire, même si ce compte est indisponible, pourvu que l'indisponibilité résulte d'un accord exprès ou tacite avec le bénéficiaire. La requérante conteste qu le compte de régularisation, "intérêts à payer" figurant au passif du bilan puisse être qualifié comme un compte ouvert au profit de Mme Stinglhamber B. Il résulte du prêt ainsi que de son exécution que les parties ont donné audit prêt avant avril 1979 la signification que Mme Stinglhamber a mis à la disposition de la requérante un capital moyennant un intérêt annuel de 10 % et venant annuellement à échéance. Il résulte de l'ensemble des éléments en ce compris la lettre du 21 août 1986 que Mme Stinglhamber a consenti à partir de 1979 à suspendre l'exigibilité des intérêts aux échéances dudit prêt lorsqu'elle était confrontée aux difficultés que rencontrait la requérante. L'administration ne démontre pas que la dette de la société anonyme Sipro n'était assortie d'aucun terme et que le payement devait se faire, en vertu de la convention, d'une manière annuelle. S'il est vrai que la société a versé annuellement des intérêts en 1977 et 1978, cela ne fait que démontrer que pendant ladite période les intérêts venairent annuellement à échéance, mais ne permet pas pour autant d'exclure que, confronté à la situation précaire de son débiteur, Mme Stinglhamber ait accepté de suspendre l'exigibilité des intérêts jusqu'à ce qui celui-ci retrouve meilleure fortune. Puisque Mme Stinglhamber n'a pas renoncé au payement des intérêts la requérante était tenue de les comptabiliser. Il s'agit en effet d'une dette certaine - le prêt et l'obligation de payer un intérêt déterminé n'est pas contesté - payable dans un avenir proche, en raison des difficultés financières rencontrées par la société, telle que le déclare la requérante dans la lettre du 21 août 1986. En ne comptabilisant pas cette dette la requérante n'aurait pas donné une image exacte de sa situation. Il résulte de l'analyse des bilans de toute la période que le compte de régularisation repris au passif du Bilan n'est pas intitutlé "intérêts à payer à Mme B. Stinglhamber" comme le reprend constamment, mais à tort, l'administration et comme l'a également à tort soutenu la requérande pendant la phase administrative mais bien "intérêts à payer". Il ne s'agit dès lors pas d'un compte ouvert au nom de Mme Stinglhamber. L'inscription au passif du bilan dans un compte repris sous le poste "X", intitulé "Comptes de régularisation", "Intérêts à payer" subdivisés en trois postes dont l'un concernait Mme Stinglhamber, n'est pas la traduction d'une prise en charge d'intérêts échus comme le soutient l'administration mais peut, comme en l'espèce, être la traduction comptable d'une dette incontestable et certaine portant sur des intérêts qui deviendront exigibles, de l'accord des parties, dans un avenir proche et dont le terme est le jour où la société viendra à meilleure fortune. Il n'est donc nullement établi comme le soutient l'administration que le compte "intérêts à payer" recueillait les intérêts échus à Mme Stinglhamber. La requérante pouvait dès lors inscrire dans le compte "intérêts à imputer" le prorata des charges d'intérêts dont elle savait qu'elles viendraient à échéance au cours de l'exercice ultérieur pendant lequel elle viendrait à meilleure fortune, mais qui sont à rattacher à l'exercice écoulé (3). L'inscription sur ce compte du passif ne peut pas être considéré comme une attribution en vertu du second alinéa de l'art. 171 Code des impôts sur les revenus (ancien) étant donné qu'il ne s'agit pas d'un compte individualisé ouvert au seul profit de Mme Stinglhamber qui est indisponible suite à un accord entre Mme Stinglhamber, bénéficiaire du compte, et la requérante, débiteur des sommes se trouvant sur le compte. En l'espèce aucun accord sur une indisponibilité éventuelle intervenu après l'échéance des intérêts et après leur inscription sur un compte individualisé n'est démontré. Ce que la requérante soutient, sans être contredite par les éléments de fait, est l'existence forcée par la situation préoccupante du débiteur, d'un accord dont la finalité est de suspendre l'échéance des intérêts jusqu'à ce que la société débitrice, dont elle est l'actionnaire, vienne à meilleure fortune, ce qui est tout autre chose et permet dès lors de comptabiliser la dette comme le fit la requérante. Prise dans son ensemble le texte de la lettre et la façon de comptabiliser de la société sans aucune opposition de Mme Stinglhamber qui était elle aussi actionnaire de la société ne permet, sauf simulation démontrée, aucune autre explication raisonnable que celle-ci, à savoir que Mme B. Stinglhamber confrontée à la situation précaire de la société s'est vu forcée de suspendre l'exigibilité des intérêts afin de ne pas risquer de perdre la société, le capital prêté à la société et les intérêts. * L'administration invoque la simulation. C'est à tort que l'administration conteste la situation difficile de la requérante qui accumule des pertes et dont la disponibilité de liquidités n'est qu'apparente. L'administration reste sans réponse à la critique énoncée par la requérante depuis ses premières conclusions et basée sur les bilans desquels résulte que les disponibilités renseignées provenaient de prêts hypothécaires qui ne permettaient qu'une affectation bien déterminée des disponibilités reprises dans les bilans et que dès lors la requérante, bien que disposant de liquidités, n'était pas en mesure d'honorer ses obligations envers Mme B. Stinglhamber. Il ne résulte pas non plus de l'analyse des comptes que le compte "intérêts à payer" ait été un compte ouvert destiné spécialement à attribuer à la seule Mme B. Stinglhamber les intérêts échus sur le prêt qu'elle avait consenti à la requérante. Ceci résulte de l'analyse du compte permise par la production de l'ensemble des bilans concernant la période litigieuse. Les sommes reprises sur ce compte n'engendrent pas eux mêmes d'intérêts ce qui devrait être la cas s'il s'agissait d'intérêts attribués. Il est sans incidence que pendant un ou même plusieurs exercices seul des intérêts échus au profit de Mme Stinglhamber aient figuré audit compte de régularisation. Le fait qu'une seule créance figure dans un compte déterminé ne peut pas avoir pour conséquence d'en changer la nature à défaut de la démonstration de la volonté des parties de celer la nature véritable dudit compte. Le requérante était tenue de reprendre dans son bilan une dette certaine d'un créancier même si la dette n'était pas venue à échéance vu la situation précaire dans laquelle se trouvait la société et l'accord du créancier de suspendre l'obligation de payer les intérêts. * C'est en vain que l'administration invoque la corrélation entre le compte courant débiteur de Mme Stinglhamber et le compte "intérêts à payer" en se prévalant d'une déclaration écrite du 25 octobre 1982 faite par le comptable de la requérante J. Evrearts qui entendait démontrer que les avances consenties à Mme B. Stinglhamber n'étaient pas constitutives dans son chef d'avantages de toute nature taxables à concurrence des intérêts fictifs. Cette déclaration pour le moins étonnante et contestée par la requérante, ne se confirme pas dans la réalité. L'évolution des deux comptes contredit toute corrélation entre l'évolution du compte courant et celle du compte "intérêts à payer". Tout d'abord le compte courant débiteur engendre des intérêts dus par la requérante sur le solde négatif dudit compte et la mise à disposition des sommes peut dès lors difficilement être considérée comme un avantage à concurrence des intérêts qu'aurait du obtenir Mme Stinglhamber. C'est à tort que les agents de l'Inspection Spéciale des Impôts se sont saisis d'un solde presque identique des deux comptes à un instant bien défini pour démontrer la corrélation qui ne se confirme pas à la lecture de l'ensemble des opérations des comptes. La compensation entre le Compte courant de Mme B. Stinglhamber de l'actif et le compte "IX Dettes à plus d'un an" "H", " Autres dettes" reprenant le capital avancé per Mme Stinglhamber B. met fin à toute équivoque concernant une corrélation possible entre ledit compte courant et le compte de régularisation "intérêts à payer". L'administration reste en défaut de démontrer la simulation dont elle se prévaut. PAR CES MOTIFS, LA COUR, statuant contradictoirement; Vu l'article 24bis de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire; Entendu en audience publique Monsieur K. Van Herck, président, en son rapport; Déclare le recours recevable et fondé. Annule les cotisations relatives aux exercices 1981, 1982 et 1983. Ordonne le dégrèvement de la cotisation relative à l'exercice 1984. Ordonne le remboursement de toutes sommes indûment perçues, augmentés des intérêts moratoires conformément aux articles 308 CIR/64 et 418 CIR/92. Condomne l'Etat belge aux frais du recours, liquidés comme en matière pénale à 1.423 frs. Ainsi jugé et prononcé en audience publique de la sixième chambre fiscale de la cour d'appel de Bruxelles, le 11-12-1998 où étaient présents et siégeaient: - K. Van Herck, président, - Y. De Ruyver, conseiller, - I. Diercxsens, conseiller, - C. De Nollin, greffier. __________ (1) Sous le poste "X", intitulé "Comptes de régularisation", "Intérêts à payer" (2) Doc. parl. Sénat 1975-76, n° 742/2 Pasin. 1976, P 124 (3) AR 8 octobre 1976, Chap. II, section 1, rubriques X |
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