Commission pour l'aide financière aux victimes d'actes intentionnels de violence et aux sauveteurs occasionnels: Décision du 3 janvier 2013 (Belgique). RG M11-4-1326
- Section :
- Jurisprudence
- Source :
- Justel F-20130103-14
- Numéro de rôle :
- M11-4-1326
Résumé :
Sommaire 1
Decision :
Exposé des faits
La fratrie composée de Cédric X., Gaëtan Y. et Lindsay Y., a été victime, alors qu'ils étaient tous les trois mineurs d'âge, de faits de mœurs perpétrés par les sieurs Charles Z. et Eric W.. Z. est l'oncle paternel des victimes tandis que W. est le fils d'une famille amie de celle de la fratrie X./Y..
Les faits qui se sont déroulés à ... entre octobre 1995 et novembre 1997 seront dénoncés en novembre 1997.
Suites judiciaires
Le requérant s'est constitué partie civile.
Par jugement du 30 Janvier 2001, le Tribunal Correctionnel de ... a
- suspendu le prononcé de la condamnation pendant 5 ans pour Z. ;
- condamné W. à une peine de 3 ans d'emprisonnement avec sursis pour ce qui excède la détention préventive.
Au civil, le Tribunal Correctionnel de ... a condamné :
- in solidum Z. et W. à payer la somme provisionnelle de 100.000 BEF au couple Z./Y. agissant pour leur fille Lindsay Y. ;
- W. à payer la somme provisionnelle de 100.000 BEF au couple Z./Y. agissant pour leur fils Gaëtan Y. ;
- W. à payer la somme provisionnelle de 100.000 BEF au couple Z./Y. agissant pour leur fils Cédric X..
M. D. a été désigné en qualité d'expert.
Préventions retenues :
- viols avec violences et attentats à la pudeur avec violences sur Lindsay Y. (faits retenus contre Z.) ;
- viols avec violences et attentats à la pudeur sur Cédric X., Gaëtan Y. et Lindsay Y. (faits retenus contre W.).
Par arrêt du 28 février 2002, la Cour d'Appel de ... a condamné Z. à une peine de 3 ans d'emprisonnement avec sursis pour les ¾ de la peine et a porté la condamnation de W. à 4 d'emprisonnement avec sursis pour la moitié de la peine.
Par jugement du 15 Janvier 2009, le Tribunal Correctionnel de ... a condamné :
- Z. (condamné par défaut) et W., solidairement, à payer 13.636 euros (+ intérêts) à Lindsay Y. ;
- W. à payer 15.737 euros (+ intérêts) à Gaëtan Y. ;
- W. à payer 68.092,77 euros (+intérêts) à Cédric X..
Séquelles médicales
Dans son rapport de mai 2004, l'expert D. conclut :
- que Cédric X. a connu des difficultés scolaires antérieures aux faits et en lien avec des carences d'étayage parental ;
- que la victime présente un fonctionnement caractérisé par l'irritabilité et l'agressivité avec d'importantes failles narcissiques ;
- que la victime présente des grosses difficultés dans les relations à autrui et une propension au passage à l'acte sans grandes capacités de représentation ;
- que les faits d'abus sexuels ont alourdi une situation en soi déjà problématique du fait du vécu familial ;
- qu'il y a lieu de retenir une incapacité permanente de 15%.
- Vu le dossier de la procédure,
- Vu le mémoire en réponse du Délégué du Ministre déposé en date du 1er octobre 2012,
- Vu le rapport établi le 3 septembre 2012,
- Vu les notifications aux parties des divers actes ;
Vu la feuille d'audience du 14 décembre 2012,
Entendus à cette audience :
Madame A. DELHEZ, présidente en son rapport,
Le requérant assisté par Me D., en leurs moyens et explications
Le délégué du Ministre de la Justice n'était pas présent et pas représenté.
Objet de la demande
Lors de l'audience, le requérant et son conseil s'en sont remis à la jurisprudence de la commission quant au montant à allouer.
Recevabilité de la demande
Il résulte des éléments du dossier que les conditions de recevabilité pour une demande d'aide principale sont remplies.
Fondement de la décision
Tenant compte,
- de ce que l'article 31 1° de la loi du 1er août 1985 stipule que la Commission peut octroyer une aide aux personnes qui ont subi un préjudice physique ou psychique important suite à un acte intentionnel de violence;
- de ce que l'article 32 de la loi du 1er août 1985 précise que pour l'octroi de l'aide la Commission se fonde exclusivement sur les éléments suivants du dommage : le dommage moral (tenant compte de l'invalidité temporaire ou permanente), les frais médicaux, l'invalidité temporaire ou permanente, la perte/diminution de revenus, le dommage esthétique, les frais de procédure, les frais matériels et le dommage résultant de la perte d'année(s) de scolarité;
- de ce que le requérant, mineur d'âge au moment des faits, a subi un dommage moral et conserve à ce titre selon l'expert D. une incapacité permanente de 15% ;
- de ce qu'il y a eu 2 échecs scolaires dans le cycle primaire et réorientation en section professionnelle comme l'attestent la position de l'expert D. et le Tribunal Correctionnel de ...;
- de ce que suite aux débats à l'audience, la Commission entend tenir du courage du requérant pour s'en sortir malgré les séquelles profondes provoquées dans son quotidien par les faits subis ;
- de ce qu'aucun justificatif de frais n'a été exposé ;
- de ce que l'article 31 bis §1 5° de la loi du 1er août 1985 stipule que « l'aide financière visée à l'article 31 est octroyée si la réparation du préjudice ne peut pas être assurée de façon effective et suffisante par l'auteur ou le civilement responsable, par un régime de sécurité sociale ou par une assurance privée, ou de toute autre manière » ;
- de ce que l'aide financière octroyée par la commission, qui consiste en un geste de solidarité sociale, relève d'un souci d'équité et a un caractère subsidiaire tant par rapport à l'indemnisation par le ou les auteurs des faits que par rapport à l'intervention d'un régime d'assurance ;
- de ce qu'au vu des enquêtes de solvabilité des deux auteurs des faits, la réparation du préjudice du requérant par les deux auteurs des faits ne peut être garantie de manière suffisante et effective ;
- de ce que l'assureur du requérant a versé une somme de 3.509 euros ;
- de ce que le montant de l'aide est fixé en équité et ne correspond pas nécessairement à la réparation intégrale du préjudice subi ;
- de ce que les postes « frais d'avocat », « efforts accrus » et « intérêts » ne figurent pas dans l'énumération limitative de l'article 32 de la loi du 1er août 1985 et ne sont donc pas pris en compte par la Commission ;
la Commission statuant ex aequo et bono, estime devoir accorder au requérant une aide principale de 50.000 euros.
PAR CES MOTIFS :
Vu les articles 30 à 41 de la loi du 1er août 1985 portant des mesures fiscales et autres modifiés par les lois des 26 mars et 22 avril 2003, par la loi du 27 décembre 2004, par la loi du 30 décembre 2009 et les articles 28 à 32 de l'arrêté royal du 18 décembre 1986 relatif à la Commission pour l'aide aux victimes d'actes intentionnels de violence, les articles 39 à 42 des lois coordonnées du 18 juillet 1966 sur l'emploi des langues en matière administrative,
La Commission, statuant contradictoirement à l'égard du requérant et par défaut à l'égard du délégué du Ministre, en audience publique,
- déclare la demande recevable et fondée ;
- alloue au requérant une aide principale de 50.000 euros.
Ainsi fait, en langue française, le 3 janvier 2013.
Le secrétaire, a.i. La Présidente,
O. LAUWERS A. DELHEZ