Cour de cassation: Arrêt du 9 mars 1992 (Belgique). RG 9283
Summary :
Le subrogé n'exerce pas des droits personnels mais les droits du subrogeant acquis par la subrogation. ( Code civil, art. 1251, 3°; Loi du 11 juin 1874, art. 22. )
Arrêt :
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LA COUR; - Vu l'arrêt attaqué, rendu le 24 octobre 1990 par la cour d'appel de Liège;
Vu l'ordonnance du 29 novembre 1991 du premier président renvoyant la cause devant la troisième chambre;
Sur le moyen pris de la violation des articles 1134, 1135, 1251, 3°, 1382 et 1384, alinéa 3, du Code civil, 807 et 1138, 2°, du Code judiciaire, 46, spécialement paragraphe 1er, et 273 de la loi maritime (Livre II, titre II et titre X du Code de commerce contenant ces textes avant leur modification par la loi du 11 avril 1989), 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances en général, du principe général du droit de l'autorité de la chose jugée en matière répressive consacré par l'article 4 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale, du principe général du droit dit principe dispositif, du principe général du droit du respect des droits de la défense et de l'article 97 de la Constitution,
en ce que, pour rejeter l'action des demanderesses tendant au payement par la défenderesse de la différence entre l'indemnité versée par elles (la seconde demanderesse étant l'assureur de la responsabilité civile de la première) à la victime de l'accident en réparation de son entier dommage et la valeur d'abandon du bateau-pousseur, l'arrêt attaqué estime d'une part que "les considérations émises par les (demanderesses) justifient qu'à l'égard des tiers, en l'espèce l'Office de la navigation, le propriétaire de la barge, ici (la défenderesse), et le propriétaire du pousseur, ici la première (demanderesse), soient tenus in solidum de la réparation des dégâts causés par l'unité de poussage aux portes intérieures de l'écluse Nord à Genk", et, après avoir constaté que "la (défenderesse), qui admet ce principe à l'égard des tiers, conteste aux (demanderesses) qui ont indemnisé l'Office de la Navigation le droit de lui réclamer le remboursement de la part de l'indemnité excédant la valeur d'abandon du pousseur alors qu'elle est exempte de toute faute", décide "qu'il convient de rechercher quel peut être le fondement de ce recours que ne peut suffire à expliquer la subrogation légale de celui qui, tenu avec d'autres, a effectué le payement aux créancier"; que l'arrêt, après avoir écarté les articles 1213 et suivants du Code civil qui ne concernent que la subrogation conventionnelle, estime d'autre part que la contribution à la dette entre les parties litigantes, tenues à l'égard des tiers à la réparation intégrale, doit être déterminée en fonction du contrat de poussage avenu entre elles, et après avoir constaté "que le dossier répressif, clôturé par un jugement du tribunal de police de Tongres, démontre que (l'accident du 20 février 1978 est survenu) à la suite d'une défaillance humaine de l'équipage ou d'une défaillance mécanique du pousseur" et "qu'aucun grief n'est formulé à l'égard de (la défenderesse)", rejette le recours des demanderesses pour le motif que "l'article 46, paragraphe 1er, de la loi maritime applicable à la navigation intérieure, aux termes duquel le propriétaire du navire est civilement responsable des faits du capitaine, de l'équipage et des préposés qui en font office dans l'exercice de l
eurs fonctions, n'a pas pour effet à la suite de la conclusion du contrat de poussage de faire de l'un des propriétaires, ou de son équipage, le préposé de l'autre; que chaque partie reste à l'égard de l'autre responsable des fautes et manquements de son personnel ainsi que des vices du matériel mis en oeuvre",
alors que,
deuxième branche, les considérations émises par les demanderesses, approuvées par l'arrêt comme justifiant que la défenderesse et la première demanderesse, parties au contrat de poussage en tant que propriétaires respectivement de la barge et du pousseur, étaient tenues in solidum de la réparation de l'entier dommage causé à l'Office de la navigation, sont, aux termes des conclusions régulièrement prises par les demanderesses dans l'instance d'appel, que le principe de l'unité du convoi implique l'unité de l'équipage mis au service de l'ensemble barge-pousseur, que l'article 46, paragraphe 1er, de la loi maritime, applicable à la navigation intérieure en vertu de l'article 273, rend tous les participants à "l'aventure commune" civilement responsables des faits de l'équipage et "qu'ainsi, eu égard au principe de la solidarité, la valeur d'abandon d'une unité isolée du convoi poussé n'a aucune incidence sur l'exigibilité de la créance entière"; que l'obligation in solidum admise par l'arrêt, qu'il déclare expressément être un principe également admis par la défenderesse "à l'égard des tiers", se rattache à la responsabilité plurale qui existe lorsque plusieurs personnes, ici les parties au contrat de poussage et au convoi formé en exécution de ce contrat par l'ensemble constitué par la barge "CO 24" de la défenderesse et le pousseur "Jean" de la première demanderesse, ont causé un dommage; que lorsque la personne, tenue avec d'autres in solidum, acquitte la totalité de la dette et indemnise le créancier, elle est légalement et de plein droit subrogée dans les droits de ce dernier puisqu'elle acquitte non seulement sa dette personnelle mais libère en même temps par ce payement le codébiteur de l'obligation à la réparation du dommage (article 1251, 3°, du Code civil); que par ailleurs "l'assureur qui a payé le dommage est subrogé à tous les droits de l'assuré contre les tiers du chef de ce dommage" (article 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances en général); qu'ainsi, par l'effet de ces subrogations légales dont l'arrêt ne constate pas qu'elles auraient été conventionnellement écartées par les parties, les demanderesses, après avoir réparé l'entier dommage de l'Office de la Navigation, avaient acquis les droits que celui-ci, créancier originaire, possédait en vertu de l'article 46 de la loi maritime contre la défenderesse dont l'arrêt reconnaît qu'elle était tenue in solidum envers lui de la réparation des dégâts causé par l'unité de poussage aux portes de l'écluse; qu'en écartant ce recours au motif "que ne peut suffire à (l')expliquer la subrogation légale de celui qui, tenu avec d'autres, a effectué le payement au créancier" alors qu'il n'était pas dénié qu'il était limité à une somme inférieure à celle que l'Office de la Navigation, dont les demanderesses exerçaient les droits, aurait pu réc
lamer à la défenderesse eu égard à la faculté d'abandon découlant pour elle des articles 46 et 273 de la loi maritime, l'arrêt méconnaît la notion et les effets desdites subrogations légales (violation des articles 1251, 3°, du Code civil, et 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances en général) et pour autant que de besoin la règle de la responsabilité plurale visée à l'article 46 de la loi maritime rendue applicable en l'espèce par l'article 273 visé au moyen;
Quant à la deuxième branche :
Attendu que l'arrêt considère qu'il est justifié "qu'à l'égard des tiers, en l'espèce l'Office de la navigation, le propriétaire de la barge, ici (la défenderesse), et le propriétaire du pousseur, ici la première (demanderesse), soient tenus in solidum de la réparation des dégâts causés par l'unité de poussage aux portes intérieures de l'écluse";
Que l'arrêt décide que les demanderesses, qui ont indemnisé l'Office de la navigation, sont "sans droit pour répéter à charge de la (défenderesse) partie de l'indemnité versée à la partie préjudiciée", aux motifs, d'une part, que "la subrogation légale de celui qui, tenu avec d'autres, a effectué le payement au créancier" ne peut suffire à expliquer le fondement du recours des demanderesses et, d'autre part, "qu'aucun grief n'est formulé à l'égard de (la défenderesse)" quant à "des fautes et manquements de son personnel ainsi (qu'à) des vices du matériel mis en oeuvre";
Attendu que l'article 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances prévoit que l'assureur qui a payé le dommage est subrogé à tous les droits de l'assuré contre le tiers du chef de ce dommage;
Qu'en vertu de l'article 1251, 3°, du Code civil, la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui-ci qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au payement de la dette, avait intérêt de l'acquitter;
Qu'il résulte de ces dispositions que le dommage ayant été totalement réparé par les demanderesses, celles-ci sont subrogées dans les droits de la victime contre la défenderesse;
Que dès lors qu'elle avait retenu la responsabilité in solidum des propriétaires de la barge et du bateau-pousseur sans constater que dans leurs rapports mutuels elles avaient dérogé à l'article 1251, 3° du Code civil, la cour d'appel ne pouvait décider que dans ces rapports l'une d'elles ne supporterait aucune partie du dommage;
Que le moyen, en cette branche, est fondé;
Par ces motifs, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres branches du moyen qui ne saurait entraîner une cassation plus étendue, casse l'arrêt attaqué, sauf en tant qu'il statue sur la recevabilité de l'appel; ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé; réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond; renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Bruxelles.
Vu l'ordonnance du 29 novembre 1991 du premier président renvoyant la cause devant la troisième chambre;
Sur le moyen pris de la violation des articles 1134, 1135, 1251, 3°, 1382 et 1384, alinéa 3, du Code civil, 807 et 1138, 2°, du Code judiciaire, 46, spécialement paragraphe 1er, et 273 de la loi maritime (Livre II, titre II et titre X du Code de commerce contenant ces textes avant leur modification par la loi du 11 avril 1989), 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances en général, du principe général du droit de l'autorité de la chose jugée en matière répressive consacré par l'article 4 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale, du principe général du droit dit principe dispositif, du principe général du droit du respect des droits de la défense et de l'article 97 de la Constitution,
en ce que, pour rejeter l'action des demanderesses tendant au payement par la défenderesse de la différence entre l'indemnité versée par elles (la seconde demanderesse étant l'assureur de la responsabilité civile de la première) à la victime de l'accident en réparation de son entier dommage et la valeur d'abandon du bateau-pousseur, l'arrêt attaqué estime d'une part que "les considérations émises par les (demanderesses) justifient qu'à l'égard des tiers, en l'espèce l'Office de la navigation, le propriétaire de la barge, ici (la défenderesse), et le propriétaire du pousseur, ici la première (demanderesse), soient tenus in solidum de la réparation des dégâts causés par l'unité de poussage aux portes intérieures de l'écluse Nord à Genk", et, après avoir constaté que "la (défenderesse), qui admet ce principe à l'égard des tiers, conteste aux (demanderesses) qui ont indemnisé l'Office de la Navigation le droit de lui réclamer le remboursement de la part de l'indemnité excédant la valeur d'abandon du pousseur alors qu'elle est exempte de toute faute", décide "qu'il convient de rechercher quel peut être le fondement de ce recours que ne peut suffire à expliquer la subrogation légale de celui qui, tenu avec d'autres, a effectué le payement aux créancier"; que l'arrêt, après avoir écarté les articles 1213 et suivants du Code civil qui ne concernent que la subrogation conventionnelle, estime d'autre part que la contribution à la dette entre les parties litigantes, tenues à l'égard des tiers à la réparation intégrale, doit être déterminée en fonction du contrat de poussage avenu entre elles, et après avoir constaté "que le dossier répressif, clôturé par un jugement du tribunal de police de Tongres, démontre que (l'accident du 20 février 1978 est survenu) à la suite d'une défaillance humaine de l'équipage ou d'une défaillance mécanique du pousseur" et "qu'aucun grief n'est formulé à l'égard de (la défenderesse)", rejette le recours des demanderesses pour le motif que "l'article 46, paragraphe 1er, de la loi maritime applicable à la navigation intérieure, aux termes duquel le propriétaire du navire est civilement responsable des faits du capitaine, de l'équipage et des préposés qui en font office dans l'exercice de l
eurs fonctions, n'a pas pour effet à la suite de la conclusion du contrat de poussage de faire de l'un des propriétaires, ou de son équipage, le préposé de l'autre; que chaque partie reste à l'égard de l'autre responsable des fautes et manquements de son personnel ainsi que des vices du matériel mis en oeuvre",
alors que,
deuxième branche, les considérations émises par les demanderesses, approuvées par l'arrêt comme justifiant que la défenderesse et la première demanderesse, parties au contrat de poussage en tant que propriétaires respectivement de la barge et du pousseur, étaient tenues in solidum de la réparation de l'entier dommage causé à l'Office de la navigation, sont, aux termes des conclusions régulièrement prises par les demanderesses dans l'instance d'appel, que le principe de l'unité du convoi implique l'unité de l'équipage mis au service de l'ensemble barge-pousseur, que l'article 46, paragraphe 1er, de la loi maritime, applicable à la navigation intérieure en vertu de l'article 273, rend tous les participants à "l'aventure commune" civilement responsables des faits de l'équipage et "qu'ainsi, eu égard au principe de la solidarité, la valeur d'abandon d'une unité isolée du convoi poussé n'a aucune incidence sur l'exigibilité de la créance entière"; que l'obligation in solidum admise par l'arrêt, qu'il déclare expressément être un principe également admis par la défenderesse "à l'égard des tiers", se rattache à la responsabilité plurale qui existe lorsque plusieurs personnes, ici les parties au contrat de poussage et au convoi formé en exécution de ce contrat par l'ensemble constitué par la barge "CO 24" de la défenderesse et le pousseur "Jean" de la première demanderesse, ont causé un dommage; que lorsque la personne, tenue avec d'autres in solidum, acquitte la totalité de la dette et indemnise le créancier, elle est légalement et de plein droit subrogée dans les droits de ce dernier puisqu'elle acquitte non seulement sa dette personnelle mais libère en même temps par ce payement le codébiteur de l'obligation à la réparation du dommage (article 1251, 3°, du Code civil); que par ailleurs "l'assureur qui a payé le dommage est subrogé à tous les droits de l'assuré contre les tiers du chef de ce dommage" (article 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances en général); qu'ainsi, par l'effet de ces subrogations légales dont l'arrêt ne constate pas qu'elles auraient été conventionnellement écartées par les parties, les demanderesses, après avoir réparé l'entier dommage de l'Office de la Navigation, avaient acquis les droits que celui-ci, créancier originaire, possédait en vertu de l'article 46 de la loi maritime contre la défenderesse dont l'arrêt reconnaît qu'elle était tenue in solidum envers lui de la réparation des dégâts causé par l'unité de poussage aux portes de l'écluse; qu'en écartant ce recours au motif "que ne peut suffire à (l')expliquer la subrogation légale de celui qui, tenu avec d'autres, a effectué le payement au créancier" alors qu'il n'était pas dénié qu'il était limité à une somme inférieure à celle que l'Office de la Navigation, dont les demanderesses exerçaient les droits, aurait pu réc
lamer à la défenderesse eu égard à la faculté d'abandon découlant pour elle des articles 46 et 273 de la loi maritime, l'arrêt méconnaît la notion et les effets desdites subrogations légales (violation des articles 1251, 3°, du Code civil, et 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances en général) et pour autant que de besoin la règle de la responsabilité plurale visée à l'article 46 de la loi maritime rendue applicable en l'espèce par l'article 273 visé au moyen;
Quant à la deuxième branche :
Attendu que l'arrêt considère qu'il est justifié "qu'à l'égard des tiers, en l'espèce l'Office de la navigation, le propriétaire de la barge, ici (la défenderesse), et le propriétaire du pousseur, ici la première (demanderesse), soient tenus in solidum de la réparation des dégâts causés par l'unité de poussage aux portes intérieures de l'écluse";
Que l'arrêt décide que les demanderesses, qui ont indemnisé l'Office de la navigation, sont "sans droit pour répéter à charge de la (défenderesse) partie de l'indemnité versée à la partie préjudiciée", aux motifs, d'une part, que "la subrogation légale de celui qui, tenu avec d'autres, a effectué le payement au créancier" ne peut suffire à expliquer le fondement du recours des demanderesses et, d'autre part, "qu'aucun grief n'est formulé à l'égard de (la défenderesse)" quant à "des fautes et manquements de son personnel ainsi (qu'à) des vices du matériel mis en oeuvre";
Attendu que l'article 22 de la loi du 11 juin 1874 sur les assurances prévoit que l'assureur qui a payé le dommage est subrogé à tous les droits de l'assuré contre le tiers du chef de ce dommage;
Qu'en vertu de l'article 1251, 3°, du Code civil, la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui-ci qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au payement de la dette, avait intérêt de l'acquitter;
Qu'il résulte de ces dispositions que le dommage ayant été totalement réparé par les demanderesses, celles-ci sont subrogées dans les droits de la victime contre la défenderesse;
Que dès lors qu'elle avait retenu la responsabilité in solidum des propriétaires de la barge et du bateau-pousseur sans constater que dans leurs rapports mutuels elles avaient dérogé à l'article 1251, 3° du Code civil, la cour d'appel ne pouvait décider que dans ces rapports l'une d'elles ne supporterait aucune partie du dommage;
Que le moyen, en cette branche, est fondé;
Par ces motifs, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres branches du moyen qui ne saurait entraîner une cassation plus étendue, casse l'arrêt attaqué, sauf en tant qu'il statue sur la recevabilité de l'appel; ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé; réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond; renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Bruxelles.