Arrêt de la Cour d'appel de Liège dd. 28.02.2003

Date :
28-02-2003
Langue :
Français Néerlandais
Taille :
6 pages
Section :
Régulation
Type :
Belgian justice
Sous-domaine :
Fiscal Discipline

Résumé :

Avis rectificatif,Envoi aux conjoints,Location professionnelle,Ventilation,Bail enregistré

Texte original :

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Arrêt de la Cour d'appel de Liège dd. 28.02.2003
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Document type : Belgian justice
Title : Arrêt de la Cour d'appel de Liège dd. 28.02.2003
Tax year : 2005
Document date : 28/02/2003
Document language : FR
Name : L 03/14
Version : 1
Court : appeal

ARRET L 03/14


Arrêt de la Cour d'appel de Liège dd. 28.02.2003



Avis rectificatif - Envoi aux conjoints - Location professionnelle - Ventilation - Bail enregistré

    Quant à la nature de la décision directoriale, la Cour rappelle les jurisprudences des Cours d'arbitrage et de cassation (C.A. n° 107/2001, M.B. 27.10.2001 ; Cass., 28.02.2000, Pas., p.145) pour confirmer, d'une part, qu'il importe peu que le législateur prévoit aujourd'hui deux recours juridictionnels puisque le double degré de juridiction n'est pas un principe général de droit, et d'autre part, que l'article 98 de la loi du 15.03.1999 relative au contentieux en matière fiscale est une disposition interprétative qui pose le caractère purement administratif de la décision directoriale, et qui s'impose en tant que telle aux tribunaux (cf. l'article 7 du Code judiciaire).

    Quant à la saisine de la Cour, constatant que la décision directoriale et le recours ne portent que sur une cotisation de l'exercice d'imposition 1994, et n'étant pas informée du contenu de la lettre évoquée dans les conclusions des requérants qui concernerait l'exercice 1995, la Cour limite sa saisine à l'exercice d'imposition 1994 et précise en outre que l'article 807, C.J., n'est pas applicable à l'extension de la saisine à un autre exercice.

    Quant au soi-disant vice de procédure reposant sur l'envoi de l'avis rectificatif au seul requérant, la Cour le rejette en constatant que la requérante (qui est une épouse cohabitante) a démontré par les renseignements qu'elle a pu fournir en son temps qu'elle avait eu la connaissance nécessaire de la proposition de taxation, conformément à l'enseignement de la Cour de Cassation sur le sujet ( Cass., 03.01.1997, Pas., p. 17).

    Quant au fond, la Cour rappelle qu'une affectation des lieux, même partielle, à l'exercice de l'activité professionnelle du locataire entraîne dans le chef du bailleur l'imposition du montant net total des loyers et des avantages locatifs (sans que ce montant puisse être inférieur au RC revalorisé) sauf si, conformément à l'article 8, CIR 92, un bail enregistré ventile expressément les quotités professionnelle et privée du loyer et des avantages locatifs.

    En l'occurrence, constatant que l'acte portant renouvellement du bail ne fait pas une telle ventilation, se limitant à mettre à charge le précompte immobilier ventilé par moitié, la Cour décide que seul le régime légal général (c'est-à-dire l'imposition du montant net total) est d'application, les conditions relatives à l'exception (art. 8, CIR 92) n'étant pas remplies.

    La Cour rappelle à ce propos que le législateur a entendu strictement limiter le régime d'exception en prévoyant des conditions très précises pour éviter toute tentative de fraude; et qu'en l'occurrence, rien n'empêchait les parties de préciser dans l'acte de renouvellement la ventilation de tous les avantages locatifs, comme le requiert la loi; et pas seulement celle du précompte immobilier; qu'il est vain d'invoquer l'esprit de la loi sans en respecter auparavant la lettre formelle.

    En outre, à l'appui de la jurisprudence de la Cour de Cassation, la Cour confirme la primauté du principe de l'annualité de l'impôt et de la légalité sur celui de la bonne administration et de la sécurité juridique, alors que les requérants ne peuvent faire valoir le moindre accord individuel ou le moindre comportement administratif, qui soit en réalité illégal et qui aurait pu en l'espèce renverser une telle primauté.



NEUVIEME CHAMBRE

ARRET

Rôle n° : 1998/FI/88

EN CAUSE :

Monsieur E.B. et Madame M.B., domicilié à……

REQUERANTS représentés par Maître P.P.H., loco Maître L.F., avocats à …..

CONTRE :

L'ETAT BELGE, représenté par le Ministre des Finances, poursuites et diligences du Directeur régional de l'administration des contributions directes de la province de LIEGE,
représenté par Maître I.T., avocat à ……

APRES DELIBERATION

Vu le recours déposé au greffe de la Cour de céans le 4 mars 1998 avec l'original e sa signification du même jour à l'administration et dirigé contre la décision du fonctionnaire délégué par le directeur des contributions directes de la province de Liège en date du 23 janvier 1998 relative à la cotisation à l'impôt des personnes physiques et à la taxe additionnelle correspondante à l'exercice 1994 reprise sous l'article n° 766657274 des rôles formés pour la commune de Liège;

Attendu que ce recours est régulier en la forme et qu'il respecte le délai légal;

Attendu que la cotisation litigieuse a été établie à la suite de l'envoi d'un avis de rectification (pièce n° VII/8 du dossier administratif);

Qu'elle concerne le régime de taxation d'un immeuble donné en location par les requérants utilisé par le locataire à la fois à titre professionnel et privé;

Que l'immeuble est occupé depuis 1954 et affecté à un commerce;

Qu'il sert également d'habitation privée aux exploitants locataires (voir pièce n° IX/17 du dossier administratif);

Que le bail initial a fait l'objet de divers renouvellements;

Que la charge du précompte immobilier a été ainsi progressivement reportée sur les locataires (voir pièce n° IX/21 et IX/22 du dossier administratif);

Que le renouvellement du 18 juin 1982 a précisé que la prise en charge du précompte immobilier par le locataire à la décharge du propriétaire se rapportait à concurrence de 50 % à la partie privée et de 50 % à titre professionnel (voir pièce n° IX/22 du dossier administratif);

Attendu que l'avis de rectification porte donc sur le régime de taxation des revenus immobiliers afférents à la location;

Que les requérants souhaitent voir ventiler entre la partie professionnelle de l'immeuble occupé par les locataires et la partie privée puisque ces revenus sont dans les conditions définies par la loi, soumises à des régimes distincts;

Attendu qu'il y a lieu d'examiner successivement les arguments développés par les requérants;

1. Quant à la prétendue nullité de la décision directoriale :

Attendu que l'argumentation des requérants procède de l'idée que le directeur accomplit un acte de fonction juridictionnelle lorsqu'il statue sur une réclamation;

Que cette conception est périmée et ne trouve aucun appui dans la jurisprudence la plus récente et notamment celle de la cour de cassation, laquelle a précisément posé à la cour d'arbitrage une question préjudicielle en cette matière (Cass. 28 février 2000 FJF/NO 2000, I, p. 145);

Attendu que la cour de cassation a ainsi relevé : "Aux termes de l'article 98 de la loi du 15 mars 1999, devenu obligatoire le 6 avril 1999, le directeur des Contributions ou le fonctionnaire délégué par lui statue sur les réclamations en tant qu'autorité administrative";

"Que cette disposition légale tend, en ce qui concerne les litiges relatifs aux exercices d'imposition antérieurs à l'exercice 1999, à prévenir les griefs déduits de la violation de la Constitution constatée par l'arrêt de la Cour d'arbitrage du 10 juin 1998 (arrêt n° 67/98 (J.T. 1998, p. 674); qui pourraient être dirigés contre les décisions des directeurs des Contributions et de leurs délégués si leur mission était qualifiée de juridictionnelle"…

"Que cette disposition légale a une portée interprétative";

Que compte tenu de cette précision, la cour de cassation a posé à la Cour d'arbitrage la question préjudicielle suivante : "Dès lors que le directeur régional des Contributions ou le fonctionnaire délégué par lui qui statue sur une réclamation en matière d'impôts sur les revenus par application des articles 267 à 276 du CIR 1992 agit en tant qu'autorité administrative, les articles 278 à 292 de ce code violent-ils les articles 10 et 11 de la Constitution en raison du fait que ces dispositions privent le contribuable à l'impôt des personnes physiques du double degré de juridiction de plein exercice dont bénéficient tant les redevables d'impôts d'une importance économique analogue que les justiciables faisant l'objet d'actes administratifs d'un autre type, quant aux conséquences patrimoniales de ceux-ci ?";

Que la cour d'arbitrage a, à la suite de cette jurisprudence déclaré que la disposition de la loi déclarée interprétative par la cour de cassation n'est pas inconstitutionnelle;

Que le directeur statue donc en tant qu'autorité administrative et non comme autorité juridictionnelle (arrêt n° 107/2001, Mon.27 octobre 2001, p. 37.402);

Qu'en conséquence la décision directoriale ne peut être qualifiée de viciée en raison de l'appartenance du directeur à l'administration fiscale; que cette décision ne peut être annulée et qu'en conséquence la procédure organisée par les articles anciens du code, dont l'application a été maintenue par le législateur dans le cadre des dispositions transitoires de la loi nouvelle continue à s'appliquer sans que la constitution soit violée;

Qu'il importe donc peu que le législateur ait décidé d'organiser aujourd'hui deux recours juridictionnels devant le tribunal d'abord puis devant la cour, puisque le double degré de juridiction n'est pas un principe général de droit;

Qu'en résumé les requérants ne développent aucun argument pertinent qui justifierait l'annulation de la décision directoriale;

2. Quant à l'étendue de la saisine de la cour :

Attendu que les requérants relèvent que si formellement la décision directoriale ne vise que la cotisation de l'exercice 1994, elle se réfère également dans son intitulé à la lettre du 18 octobre 1996, laquelle contiendrait réclamation contre la cotisation de l'exercice 1995 portant sur le même objet (voir conclusions de synthèse des requérants p.4);

Que la cour constate cependant que le recours ne vise expressément que la cotisation de l'exercice 1994 et que dans la décision directoriale le n° de cotisation de l'exercice 1995 n'est pas indiqué.

Que par ailleurs la cour n'est nullement informée du contenu de la lettre du 18 octobre 1996, laquelle pourrait contenir d'autres griefs que ceux actuellement développés et dont elle n'est pas saisie;

Qu'il faut donc en conclure que le recours introduit par les requérants et qui ne vise expressément que la cotisation de l'exercice 1994 ne vise que ce seul exercice;

Que la jurisprudence invoquée par les requérants n'est pas pertinente, celle-ci indiquant que l'article 807 du code judiciaire n'est pas applicable en l'espèce (Cass. 16 septembre 1976, Pas. 1977, I, 51);

3. Quant à la procédure :

Attendu que les requérants soutiennent encore que l'avis rectificatif a été adressé au seul requérant et non aux deux époux et qu'ils prétendent en tirer un vice de procédure qui vicierait la cotisation;

Que cette prétention est dépourvue de pertinence;

Qu'il s'avère que l'épouse cohabitante a été également informée de l'avis de rectification puisque dans son courrier du 19 juin 1996 (pièce n° VIII/10) le requérant a expressément indiqué que son épouse avait été avertie de l'avis puisqu'elle avait fourni les renseignements souhaitables;

Qu'en pareilles circonstances de taxation collective, il ne peut être tiré aucun vice de procédure du fait que l'avis de rectification n'a été formellement adressé qu'à l'époux et non à l'épouse, qui en a eu connaissance (v. Cassation 3 janvier 1997, Pas. 1997, p.17);

4. Quant au fond :

Attendu que le texte légal en cause est l'article 8 du code des impôts sur les revenus 1992;

Attendu que le régime légal a été conçu en matière telle que l'affectation même partielle de l'immeuble à l'exercice de l'activité professionnelle du locataire entraîne l'imposition, dans le chef du bailleur, du montant total des loyers et avantages locatifs, sauf s'il existe, conformément à l'article 8 du CIR 1992, un bail enregistré qui mentionne distinctement la partie professionnelle et la partie privée du loyer et des avantages locatifs;

Que le Ministre des Finances a précisé que, dans ce cas, il faut tenir compte de la valeur économique des différents éléments et qu'une répartition en pour-cent sur base du nombre de mètres carrés ou de mètres cubes est insuffisante (Bull. Q.R., Sén., 21 janvier 1986, p. 111);

Qu'ainsi en vertu du régime légal, s'il n'existe un bail enregistré et s'il ne précise pas la partie professionnelle et la partie privée du loyer et des avantages locatifs, c'est la règle générale qui s'applique, c'est-à-dire que l'imposition s'effectue sur le montant net du loyer et des avantages locatifs, sans que ce montant puisse être inférieur au revenu cadastral revalorisé (voyez Gand, 26 mai 1992, Bull.contr. n° 791, p, 1930; Anvers, 1er mars 1993, Bull.contr., n° 744, p. 2864; Bruxelles, 24 sept. 1993, J.T., 1995, p. 163);

Qu'en la présente espèce l'acte portant renouvellement du bail ne comporte pas de ventilation du loyer et des charges locatives supportées par les preneurs conformément au texte de l'article 8, puisqu'il n'y a pas de précision sur la ventilation du loyer dans le renouvellement, celui-ci se limitant à la prise en charge du précompte immobilier qui ventile par moitié;

Que c'est donc le régime légal général qui s'applique toutes les dispositions prévoyant l'application de l'exception n'étant pas remplies;

Qu'il faut se souvenir que le législateur a entendu limiter l'application du régime d'exception et qu'afin d'éviter toute tentative de fraude, il a soumis l'application du régime d'exception à des conditions très précises en ce compris l'enregistrement de l'acte opérant la ventilation du loyer et des charges locatives;

Qu'il a précisé à l'époque de l'adoption de la loi nouvelle dans l'article 50 de la loi du 19 juillet 1979 que, pour l'exécution de l'article 8 du CIR (1992), les conventions de bail en vigueur au 1er janvier 1980 pourraient, à la demande de chacune des parties, être complétées par une clause précisant la quote-part du loyer et des charges locatives afférentes à la partie de l'immeuble affectée à l'exercice de l'activité professionnelle du locataire et qu'à défaut d'accord entre les parties, le litige est tranché par le juge de paix à la demande de la partie la plus diligente (v. Com.I.R./1992, n° 8/2);

Que la cour constate que rien n'empêchait les parties d'établir dans leur acte de renouvellement la ventilation requise par la loi relativement à l'ensemble des avantages locatifs revenant au bailleur par l'effet du bail et que le bailleur n'a pris aucune disposition pour se placer dans le cadre de l'application du régime d'exception;

Que dans ces circonstances c'est en vain que les requérants invoquent l'esprit du texte (conclusions de synthèse, p.6) alors que la lettre formelle du texte leur imposait de procéder à une ventilation de tous les avantages locatifs (loyer et autres charges locatives assumées par le locataire à la décharge du propriétaire, dont le précompte immobilier);

Que pour le surplus c'est en vain que les requérants invoquent le principe de bonne administration et de sécurité juridique alors que l'administration, qui peut se fonder sur le principe de l'annualité de l'impôt et son caractère d'ordre public, ne fait qu'appliquer la législation à laquelle elle est tenue en vertu de la mission qui lui est dévolue (en ce sens Cass. 14 juin 2002 Nr F.000054F; Cass. 26 octobre 2001 Nr. F000034F);

Que les requérants ne peuvent faire valoir en l'espèce aucun accord individuel qui serait contraire à la loi, ni une soi-disant croyance légitime dans la légalité du comportement de l'administration face à la lettre du texte (en ce sens v. Cass. 26 octobre 2001 Nr. F000034F; Cass. 6 novembre 2000, n° 598);

PAR CES MOTIFS
ET CEUX DE LA DECISION QUERELLEE


Vu l'article 24 bis de la loi du 15 juin 1935;

La Cour,

Statuant contradictoirement,

Reçoit le recours,

Le dit non fondé,

En déboute les requérants avec charges des frais.

Ainsi prononcé en langue française, au palais de justice de Liège, à l'audience publique de la NEUVIEME CHAMBRE de la cour d'appel séant à Liège, du VINGT-HUIT FEVRIER DEUX MILLE TROIS.

Présents :
G.S., Conseiller ff. de Président,
J-P.A., Conseiller,
M.D., Conseiller,
assistés du greffier A.L.