Arrêt de la Cour de Cassation dd. 07.11.2003

Date :
07-11-2003
Langue :
Français Néerlandais
Taille :
6 pages
Section :
Régulation
Type :
Belgian justice
Sous-domaine :
Fiscal Discipline

Résumé :

Options sur actions,Moment d'imposabilité,Octroi de l'option

Texte original :

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Arrêt de la Cour de Cassation dd. 07.11.2003
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Document type : Belgian justice
Title : Arrêt de la Cour de Cassation dd. 07.11.2003
Tax year : 2005
Document date : 07/11/2003
Document language : FR
Modification date : 22/06/2005 15:24:49
Name : C 03/19
Version : 1
Court : cassation

ARRET C 03/19


Arrêt de la Cour de Cassation dd. 07.11.2003



FJF 2004/258

L'arrêt attaqué: Cour d'appel de Bruxelles dd. 07.06.2001

Options sur actions - Moment d'imposabilité - Octroi de l'option

    Il résulte des travaux préparatoires de la loi du 27 décembre 1984 portant des dispositions fiscales que le législateur n'a pas entendu se prononcer sur la question de savoir si l'avantage découlant de la levée d'une option sur actions, option accordée par un employeur à un salarié, était ou non taxable mais qu'il a seulement défini les conditions auxquelles l'avantage obtenu par un salarié en raison ou à l'occasion de la levée de l'option serait exonéré d'impôt. Pour déterminer si le salarié reçoit un avantage de toute nature imposable, au sens de l'article 26 du CIR, il y a lieu de se placer au moment de l'attribution de l'option. Les gains éventuels obtenus par le salarié au moment où il lève l'option sont la conséquence des fluctuations de la valeur des actions, et non le produit du travail au service de son employeur ou un avantage acquis en vertu du contrat de travail.



Président de section: M. P.
Conseillers: M. B., M. F., Mme M., M. G.
Avocat général: Me H.
Avocats: Me K., Me T'K.

T.C.; M.H.
contre
L'Etat belge, représenté par le ministre des Finances

I. La décision attaquée

Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 7 juin 2002 par la cour d'appel de Bruxelles.

II. La procédure devant la Cour

Le président de section Claude Parmentier a fait rapport.
L'avocat général A. H. a conclu.

III. Le moyen de cassation

Les demandeurs présentent un moyen libellé dans les termes suivants:

Dispositions légales violées

- articles 26 (tel que cet article a été modifié en dernier lieu par la loi du 8 août 1980), 67, 1° , (tel que cet article a été modifié en dernier lieu par la loi du 3 novembre 1976) et 183, alinéa  1er, du Code des impôts sur les revenus coordonné par arrêté royal du 26 février 1964;
- article 45, spécialement § 3, de la loi du 27 décembre 1984 portant des dispositions fiscales.

Décisions et motifs critiqués

Après avoir constaté, en substance, que le demandeur, directeur d'une société belge dépendant d'une société de droit américain, s'est vu attribuer en septembre 1983 une option d'achat portant sur des actions de cette société américaine; que cette option était représentée par un certificat permettant au demandeur «d'acheter les actions à un certain prix»; que le demandeur a levé cette option sur une partie des actions en 1987 et une autre partie en 1989; que les demandeurs ont été imposés à l'impôt des personnes physiques des exercices d'imposition 1988 et 1990 sur des avantages en nature constitutifs de rémunérations du demandeur et s'élevant respectivement à 2.839.122 francs et 2.312.516 francs; que ces avantages en nature ont été fixés par l'administration à la différence entre la moyenne des cours boursiers des actions au moment de chaque levée de l'option et le prix de l'option payé par le demandeur pour acquérir les actions; que le demandeur soutient que c'est au moment où l'option a été consentie (1983) et non aux moments où elle a été levée (1987 et 1989) qu'il faut se placer pour déterminer l'avantage taxable, l'arrêt rejette cette thèse et le recours des demandeurs.
L'arrêt fonde cette décision essentiellement sur les motifs suivants:
«L'article 45, § 3, de la loi du 27 décembre 1984 dispose que «si, en raison ou à l'occasion de la levée d'option sur action, un avantage imposable au sens de l'article 26, alinéa 2, 2° , du même code est obtenu, cet avantage est exonéré [...]». L'article 45, § 4, de la loi de 1984 énumère les conditions qui doivent être remplies pour que l'avantage imposable visé par l'article 45, § 3, soit exonéré. Il n'est pas contesté que les conditions de l'article 45, § 4, ne sont pas remplies en l'espèce.
[...] En l'espèce la levée de l'option accordée par le certificat de 1983 a permis au demandeur d'obtenir un avantage imposable au sens de l'article 26, alinéa 2, 2° , étant la plus-value litigieuse.
La juxtaposition des textes de l'article 26, alinéa 2, 2° , du Code des impôts sur les revenus (1964) et de l'article 45, § 3, de la loi de 1984 indique que le fait imposable est la levée d'option révélant la plus-value et non le certificat permettant au bénéficiaire d'acheter les actions à un certain prix, bien que ce certificat en soit une condition nécessaire.
La logique interne de l'article 45, § 3, exclut l'attribution du certificat [ou de la convention d'option] comme fait imposable, puisqu'au jour de cette attribution l'assiette de l'impôt, telle qu'elle est définie par la loi, ne peut pas encore être déterminée; l'assiette de l'impôt est en effet la plus-value légale à la différence entre la valeur vénale des actions à la date de la levée de l'option et le prix garanti aux bénéficiaires de l'option pur acquérir ces mêmes actions lors de la levée de l'option.
Le demandeur donne une interprétation de l'article 45, § 3, qui est inconciliable avec le texte de la loi, lorsqu'il soutient que, par l'usage de la conjonction «si» dans la phrase «si, en raison ou à l'occasion de la levée d'une option sur actions, un avantage imposable [...] est obtenu par un travailleur, cet avantage est exonéré [...]», le législateur aurait mis au conditionnel non seulement l'existence de l'avantage mais également le caractère de rémunération imposable de cet avantage au sens de l'article 26 alinéa 2, 2° .
Seule est mise au conditionnel par le législateur la naissance d'une plus-value sujette aux lois du marché. Les travaux préparatoires de la loi de 1984 dissipent toute possibilité de doute quant au caractère de rémunération imposable en principe de l'avantage acquis, au moment de la levée de l'option (Exposé des motifs, Chambre, Session 1984-1985 n°  1010/1 page 12; Commission du Sénat, Session 1984-85 n°  780/2 pages 34 et 36)».

Griefs

(1) Aux termes de l'article 26 du Code des impôts sur les revenus (1964), dans sa version applicable aux exercices d'imposition 1988 et 1993, les rémunérations des travailleurs régies par la législation relative aux contrats de louage de travail sont «toutes celles qui constituent pour le travailleur le produit du travail au service d'un employeur» et comprennent notamment: «2°  les avantages de toute nature que le travailleur obtient en raison ou à l'occasion de l'exercice de son activité professionnelle». Il ressort de l'article 183 du Code des impôts sur les revenus (1964) que les rémunérations précitées sont imposables au moment du paiement ou de l'attribution de celles-ci.
Lorsque l'employeur attribue au travailleur une option d'achat sur des actions, conférant le droit d'acheter, au cours d'une période imposable ultérieure, des actions à un prix déterminé, il y a lieu, pour déterminer si le travailleur reçoit un avantage en nature imposable au titre de rémunération, de se placer au moment de l'attribution de l'option. En effet, c'est à ce moment qu'entre dans le patrimoine du travailleur, en raison ou à l'occasion de son emploi, un droit susceptible d'évaluation. Certes, pareil avantage en nature présente un caractère aléatoire, de sorte que l'évaluation de l'avantage est susceptible de prêter à discussion, spécialement lorsqu'il s'agit d'options non cotées en bourse ou incessibles. Pareille difficulté d'évaluation ne permet pas de contester l'existence même de l'avantage en nature, pas plus que ne serait contestable l'existence d'un avantage en nature en cas d'octroi au travailleur d'un billet d'une loterie dont le tirage, aurait lieu au cours d'un exercice ultérieur.
En revanche, l'achat ultérieur par le travailleur des actions faisant l'objet de l'option au prix fixé par celle-ci constitue l'exercice d'un droit qui, depuis l'attribution de l'option, fait partie du patrimoine privé du travailleur. L'exercice de ce droit constitue un acte de gestion normale du patrimoine privé du travailleur, en sorte que l'enrichissement qui en résulte sort du champ d'application de l'impôt des personnes physiques en vertu de l'article 67, 1° , du Code des impôts sur les revenus (1964), tel qu'il était applicable au cours des exercices d'imposition 1988 et 1990.
Cet enrichissement ne peut en tout cas être considéré comme une rémunération imposable en vertu de l'article 26 précité.
(2) Contrairement à ce que décide l'arrêt attaqué, l'article 45 de la loi précitée du 27 décembre 1984 ne déroge nullement aux principes exposés supra (1).
Après avoir défini, en son paragraphe 1er, les notions d'«un option sur actions», de «convention d'option sur actions» et de «levée d'une option sur actions», cet article dispose, en son paragraphe 3: «si, en raison ou à l'occasion de la levée d'une option sur actions, un avantage imposable au sens de l'article 26, alinéa 2, 2° , du Code des impôts sur les revenus (1964), est obtenu par un travailleur, cet avantage est exonéré de l'impôt sur les personnes physiques... à concurrence du montant constitué par l'excédent que présente la valeur des actions ou parts revenant au travailleur lors de la levée d'une option sur actions par rapport au prix de l'option».
Il ressort tant de ce texte que des travaux préparatoires de la loi du 27 décembre 1984 que la proposition conditionnelle qui introduit cette disposition signifie que les auteurs de cette loi n'ont pas entendu se prononcer sur la question de savoir si l'avantage résultant de la levée de l'option était susceptible d'être soumis à l'impôt des personnes physiques au titre de rémunération et ont voulu laisser cette question sous l'empire de l'article 26, alinéa 2, 2° , du Code des impôt sur les revenus (1964). En effet, suivant le texte initial du projet de loi, l'article 41 du projet (correspondant à l'article 45 de la loi) disposait, en son paragraphe 3: «l'avantage obtenu par un travailleur en raison ou à l'occasion de la levée d'une option sur actions est exonéré de l'impôt des personnes physiques... à concurrence du montant constitue par l'excédent que présente la valeur des actions ou parts revenant au travailleur lors de la levée d'une option sur actions par rapport au prix de l'option» (Doc., Chambre, 1984-1985, n°  1010-1, p. 41). C'est à ce texte initial du projet de loi que se rapporte le passage de l'exposé des motifs reproduit par l'arrêt attaqué.
Le texte de l'article 45, § 3, de la loi est toutefois issu d'un amendement n°  86 déposé devant la commission de la Chambre, aux termes duquel les mots «l'avantage obtenu par le travailleur, en raison ou à l'occasion de la levée d'une option sur actions est exonéré» sont remplacés par les mots «si, en raison ou à l'occasion de la levée d'une option sur actions, un avantage imposable au sens de l'article 26, alinéa 2, 2° , du même code, est obtenu par un travailleur, cet avantage est exonéré». D'après la justification de l'amendement, le but de celui-ci était d'«éviter que la mesure proposée ait un effet induit sur le caractère taxable ou non des opérations de l'espèce qui ne répondraient pas aux conditions pour en bénéficier (lire: «pour bénéficier de la mesure»] (Doc., Chambre, 1984-1985, n°  1010-11, point 5). Cet amendement a été appuyé par plusieurs membres de la commission de la Chambre dans les termes suivants: «Si l'intention est de créer un avantage fiscal, le danger n'en est pas moins réel de voir se constituer une nouvelle matière imposable. Ce serait une erreur de croire qu'il s'agit d'un avantage de toute nature ... en toute occasion où une option sur actions est offerte aux travailleurs, en se basant sur le seul fait que les conditions d'octroi de l'exonération ne seraient pas remplies. Comment pourrait-il être question d'un avantage de toute nature dans le cas d'une lus-value réalisée lors de la levée d'une option d'achat constatée selon les règles de droit commun? Cette plus-value n'a en effet aucun rapport avec l'activité professionnelle du travailleur. L'obtention éventuelle d'une plus-value à la levée d'une option constitue un avantage recueilli non pas sur la base de l'activité professionnelle mais compte tenu de l'évolution du marché. Il faut considérer la plus-value comme «un avantage découlant d'un contrat aléatoire au sens de l'article 1964 du Code civil» (rapport, Doc., Chambre, 1984-1985, n°  1010-13, p. 103). Le ministre des Finances a répondu qu'à la suite de l'amendement précité au texte de l'article 41, § 3, du projet (qui deviendra l'article 45, § 3, de la loi), «la question de savoir s'il s'agit ou non d'un avantage imposable n'est donc pas résolue (par cette disposition). Les règles et les interprétations qui étaient en vigueur en la matière resteront d'application. L'administration des contributions défend l'idée qu'il y a avantage imposable lorsque la société elle-même a dû racheter des actions, mais cette thèse peut toujours être contestée, qu'il y ait l'article 41 ou non» (ibidem, p. 107).
(3) Dès lors, en décidant qu'en vertu de l'article 45, § 3, de la loi du 27 décembre 1984 précitée, la plus-value réalisée par le demandeur à l'occasion de la levée, en 1987 et en 1989, de l'option d'achat qui lui avait été attribuée en 1983, est imposable au titre de revenu professionnel des périodes imposables 1987 et 1989, l'arrêt viole ladite disposition légale et les dispositions du Code des impôts sur les revenus (1964) visées en tête du moyen.

IV. La décision de la Cour

Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen par le défendeur et déduite de ce que l'arrêt est légalement justifié par des considérations non critiquées:

Attendu que le moyen ne critique pas les motifs de l'arrêt sur le fondement desquels il décide que l'avantage découlant de l'attribution d'une option d'achat d'actions est taxable, mais sans se prononcer sur la période imposable à laquelle cet avantage doit être rattaché;
Qu'il critique seulement la décision de l'arrêt suivant laquelle l'avantage en question est imposable au moment où l'option d'achat est levée;
Que la fin de non-recevoir ne peut être accueillie;
Sur le moyen

Attendu que l'arrêt constate qu'en 1983, la société qui employait le demandeur lui a accordé par convention une option d'achat portant sur des actions de cette société et que le demandeur a levé l'option en 1987 et 1989;

Attendu que l'article 26, alinéa 1 er, du Code des impôts sur les revenus (1964) dispose que les rémunérations des salariés sont, quels qu'en soient le débiteur, la qualification et les modalités de détermination et d'octroi, toutes celles qui constituent, pour le travailleur, le produit du travail au service d'un employeur; qu'aux termes de l'alinéa 2, 2°, de cette même disposition, les rémunérations comprennent les avantages de toute nature que le travailleur obtient en raison ou à l'occasion de l'exercice de son activité professionnelle;

Attendu que l'article 45, § 3, de la loi du 27 décembre 1984 portant des dispositions fiscales prévoit que si, en raison ou à l'occasion de la levée d'une option sur actions, un avantage imposable au sens de l'article 26, alinéa 2, 2°, du Code des impôts sur les revenus (1964), est obtenu par un travailleur, cet avantage est exonéré de l'impôt des personnes physiques ou de l'impôt des non-résidents à concurrence du montant constitué par l'excédent que présente la valeur des actions ou parts revenant au travailleur lors de la levée d'une option sur actions par rapport au prix de l'option; que le paragraphe 4 énumère les conditions auxquelles cette exonération est soumise;
Qu'il résulte des travaux préparatoires de cette loi que le législateur de 1984 n'a pas entendu se prononcer sur la question de savoir si l'avantage découlant de la levée de l'option était ou non taxable mais qu'il a seulement défini les conditions auxquelles l'avantage obtenu par un salarié en raison ou à l'occasion de la levée de l'option serait exonéré d'impôt;

Attendu que, pour déterminer si le salarié reçoit un avantage de toute nature imposable, au sens de l'article 26 précité, il y a lieu de se placer au moment de l'attribution de l'option;
Que les gains éventuels obtenus par le salarié au moment où il lève l'option sont la conséquence des fluctuations de la valeur des actions, et non le produit du travail au service de son employeur ou un avantage acquis en vertu du contrat de travail;

Attendu que l'arrêt ne décide pas légalement que la plus-value réalisée par le demandeur à l'occasion de la levée, en 1987 et 1989, de l'option d'achat qui lui avait été attribuée en 1983 est imposable au titre de revenu professionnel des années 1987 et 1989;
Que le moyen est fondé;

Par ces motifs,
La Cour
Casse l'arrêt attaqué;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond;
Renvoie la cause devant la cour d'appel de Mons.