Commentaire de l'art. 358, CIR 92
- Section :
- Régulation
- Type :
- Comments
- Sous-domaine :
- Fiscal Discipline
Résumé :
impôt sur les revenus - établissement de l'impôt - établissement de la cotisation - délai d'imposition - délai spécial d'impositio
Texte original :
Fisconet
plus Version 5.9.23
Service Public Federal Finances |
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Commentaire de l'art. 358, CIR 92
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Document type : Comments Title : Commentaire de l'art. 358, CIR 92 Document date : 17/11/2015 Keywords : impôt sur les revenus / établissement de l'impôt / établissement de la cotisation / délai d'imposition / délai spécial d'imposition Document language : FR Name : Commentaire de l'art. 358, CIR 92 Version : 1
Art. 358, CIR 92
Numéro 358/0
Art. 358. - § 1er. L'impôt ou le supplément d'impôt peut être établi, même après l'expiration du délai prévu à l'article 354, dans les cas où :
1° un contrôle ou une enquête se rapportant à l'application des impôts sur les revenus dans le chef d'un contribuable déterminé font apparaître que ce contribuable a contrevenu aux dispositions du présent Code ou des arrêtés pris pour son exécution en matière de précomptes mobilier ou professionnel, au cours d'une des cinq années qui précèdent celle de la constatation de l'infraction ;
2° un contrôle ou une enquête effectués par les autorités compétentes d'un pays avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de la double imposition et se rapportant à un impôt visé par cette convention, font apparaître que des revenus imposables n'ont pas été déclarés en Belgique au cours d'une des cinq années qui précèdent celle pendant laquelle les résultats de ce contrôle ou de cette enquête sont venus à la connaissance de l'administration belge ;
3° une action judiciaire fait apparaître que des revenus imposables n'ont pas été déclarés au cours d'une des cinq années qui précèdent celle de l'intentement de l'action ;
4° des éléments probants font apparaître que des revenus imposables n'ont pas été déclarés au cours d'une des cinq années qui précèdent celle pendant laquelle ces éléments probants sont venus à la connaissance de l'administration.
§ 2. - Dans ces cas, l'impôt ou le supplément d'impôt doit être établi dans les douze mois à compter de la date à laquelle :
1° l'infraction visée au § 1er, 1°, a été constatée ;
2° les résultats du contrôle ou de l'enquête visés au § 1er, 2°, sont venus à la connaissance de l'administration belge ;
3° la décision dont l'action judiciaire visée au § 1er, 3°, a fait l'objet, n'est plus susceptible d'opposition ou de recours ;
4° les éléments probants visés au § 1er, 4°, sont venus à la connaissance de l'administration.
Numéro 358/1
L'art. 358, CIR 92, donne à l'administration la possibilité, dans quatre cas bien spécifiques (voir 358/6), d'établir l'impôt ou le supplément d'impôt dans les douze mois à compter d'une date bien déterminée (voir 358/9), même après l'expiration du délai d'imposition prévu à l'art. 354, CIR 92.
Numéro 358/2
Il résulte des termes "même après l'expiration du délai prévu à l'art. 354, CIR 92" , qu'il peut être fait usage du pouvoir de taxation conféré par l'art. 358, CIR 92, aussi bien durant les délais ordinaire et extraordinaires d'imposition (art. 353 et 354, CIR 92) qu'après (voir QP n° 333 de M. Coveliers, Bull.QR n° 1, Chambre, session ordinaire 1987-1988, p. 10, Bull. 672, p. 883).
Numéro 358/3
L'art. 358, CIR 92, ne doit pas être interprété en ce sens que dans tous les cas, même lorsque le délai extraordinaire de trois ou cinq ans n'est pas expiré, l'imposition afférente aux revenus en cause doit nécessairement être établie dans les douze mois à compter de la date visée au 358/9. En effet, cette disposition est indépendante de l'art. 354, CIR 92 ; elle y ajoute un droit exorbitant qui permet à l'administration d'établir les impositions en dehors du délai prévu par ce dernier article.
Numéro 358/4
Il est à noter que l'"administration" visée à l'art. 358, CIR 92, ne peut être que l'Administration des contributions directes (ou l'Administration de l'inspection spéciale des impôts agissant en matière de contributions directes), de sorte qu'on ne peut considérer que cette administration a eu connaissance de l'enquête, de l'action judiciaire ou des éléments probants, lorsque seule une administration fiscale autre que la précitée en a été informée.
Numéro 358/5
La notion d'"impôt", dont il est question in limine de l'art. 358, CIR 92, englobe les mêmes impôts que ceux visés à l'art. 354, al. 1er, CIR 92, c.-à-d. l'IPP, l'ISoc., l'INR et l'IPM, ainsi que le Pr.M et le Pr.P (voir renvois de l'art. 354, CIR 92, aux art. 307 à 312, CIR 92).
Par contre, le Pr.I est établi sur la base du RC qui est communiqué par l'Administration du cadastre (art. 255, CIR 92), et non pas sur la base d'une déclaration du RC à souscrire par le contribuable.
Les déclarations visées aux art. 473 et 474, CIR 92, ne sont pas des déclarations d'un revenu mais d'événements qui doivent permettre de déterminer ou de modifier le RC.
Comme le contribuable ne doit déclarer en l'espèce aucun revenu imposable, on ne peut faire usage des dispositions de l'art. 358, § 1er, CIR 92, pour l'établissement du Pr.I.
B. CAS D'APPLICATION DE L'Art. 358, CIR 92
Numéro 358/6
Cette disposition est d'application dans les cas suivants :
- le contribuable a contrevenu aux dispositions du CIR 92 ou des arrêtés pris pour son exécution en matière de Pr.M ou de Pr.P, au cours d'une des 5 années qui précèdent celle de la constatation de l'infraction ;
- des informations ont été envoyées par un pays avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de double imposition, informations qui font apparaître que des revenus imposables n'ont pas été déclarés en Belgique au cours d'une des 5 années qui précèdent celle durant laquelle elles ont été communiquées à l'administration belge ;
- une action judiciaire fait apparaître que des revenus imposables n'ont pas été déclarés au cours d'une des 5 années précédant celle de l'intentement de l'action ;
- des éléments probants font apparaître que des revenus imposables n'ont pas été déclarés au cours d'une des cinq années qui précèdent celle pendant laquelle ces éléments probants sont venus à la connaissance de l'administration.
Numéro 358/7
Pour l'application de l'art. 358, CIR 92, il est nécessaire mais suffisant que les revenus révélés par le contrôle ou l'enquête, par l'action judiciaire ou par des éléments probants, n'aient pas été déclarés. La loi n'exige en effet pas qu'il s'agisse de revenus que l'administration n'aurait pu découvrir, même en utilisant tous les moyens de contrôle mis à sa disposition (Cass., 28.10.1988, Vervullens, Bull. 692, p. 719).
De même, il est sans relevance que les revenus non déclarés résultant du contrôle ou de l'enquête, de l'action judiciaire ou des éléments probants, avaient déjà été obtenus pendant les délais visés à l'art. 354, CIR 92, pour autant que le délai de 12 mois ait été respecté.
C. ANNEES AUXQUELLES S'APPLIQUE LE DELAI D'IMPOSITION DE L'ART. 358, CIR 92
Numéro 358/8
Il résulte du texte de l'art. 358, § 1er, 1° à 4°, CIR 92, que l'administration est habilitée à établir des impôts sur les revenus révélés par un contrôle ou une enquête, par une action judiciaire ou par des éléments probants, que le contribuable concerné n'a pas déclarés dans une déclaration qu'il devait souscrire au cours d'une des cinq années qui précèdent celle pendant laquelle s'est produit le fait rendant possible l'application de l'art. 358, CIR 92 (QP n° 325 de M. Capoen, Bull.QR n° 31, Sénat, session 1985-1986, p. 1776, Bull. 657, p. 172).
Les faits visés ci-dessus sont :
- la constatation visée à l'art. 358, § 1er, 1°, CIR 92, de l'infraction en matière de Pr.M ou de Pr.P ;
- la réception de l'information visée à l'art. 358, § 1er, 2°, CIR 92, du contrôle ou de l'enquête par l'autorité étrangère compétente ;
- l'intentement de l'action judiciaire visé à l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92 ;
- la réception de l'information visée à l'art. 358, § 1er, 4°, CIR 92, concernant des éléments probants.
Le délai spécial d'imposition n'est par contre pas applicable aux revenus révélés par un contrôle ou une enquête, une action judiciaire ou des éléments probants, en ce qui concerne l'année qui précède celle au cours de laquelle les faits précités se sont produits. Ces revenus doivent être imposés dans les délais extraordinaires de 3 ou 5 ans (art. 354, CIR 92).
1. Date de début
Numéro 358/9
La date de début du délai spécial d'imposition de 12 mois est :
- en ce qui concerne l'art. 358, § 1er, 1°, CIR 92, la date à laquelle l'infraction en matière de Pr.M ou de Pr.P a été constatée à l'occasion d'un contrôle ou d'une enquête se rapportant à l'application des impôts sur les revenus dans le chef d'un contribuable déterminé ;
- en ce qui concerne l'art. 358, § 1er, 2°, CIR 92, la date à laquelle l'administration belge a eu connaissance des résultats d'un contrôle ou d'une enquête par les autorités compétentes d'un pays avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de la double imposition et se rapportant à un impôt visé par cette convention ;
- en ce qui concerne l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92, la date à laquelle la décision judiciaire, statuant sur l'action qui a révélé les revenus éludés, devient définitive, ou la date à laquelle l'affaire a été classée après une enquête préliminaire (voir 358/25). Qu'une affaire puisse être classée par le Ministère Public au terme d'une enquête préliminaire n'enlève rien au fait qu'une action judiciaire pouvant révéler des revenus non déclarés ou dissimulés a été intentée ;
- en ce qui concerne l'art. 358, § 1er, 4°, CIR 92, la date à laquelle l'administration a eu connaissance des éléments probants.
Numéro 358/10
C'est à l'administration qu'il appartient de prouver la date de début. Les services de taxation doivent mentionner cette date sur un document figurant au dossier, soit :
- dans le premier cas, un document établi par le fonctionnaire qui a constaté l'infraction ;
- dans le second cas, la communication faite par l'administration fiscale étrangère (lorsque la communication parvient via l'administration centrale, la date de réception figure sur les pièces communiquées - voir QP n°233 de M. Van Hooland, Bull.QR n°42, Sénat, session 1990-1991, p. 1796, Bull. 710, p. 2674) ;
- dans le troisième cas, une copie de la décision judiciaire définitive ou d'une quelconque information à caractère officiel ;
- dans le quatrième cas, un document rédigé par le fonctionnaire qui a eu connaissance des éléments probants.
Numéro 358/11
Il a été jugé que :
- si l'administration, à qui incombe en la matière le fardeau de la preuve, ne peut produire un tel document, elle reste en défaut de fournir la preuve que l'imposition contestée a été établie dans les délais (voir Anvers, 9.9.1991, A.W.) ;
- si, même devant la Cour, l'administration n'invoque aucune circonstance qui aurait pu donner lieu à l'application d'un des cas prévus à l'art. 358, CIR 92, et qu'en outre aucun élément ne permet de déterminer la date initiale d'établissement d'une cotisation complémentaire et que rien ne démontre qu'il a été fait application de l'art. 354, al. 2, CIR 92, la cotisation y relative doit être déclarée nulle pour cause de prescription (Gand, 12.6.1990, R. De Gomme, Bull. 710, p. 2606).
Numéro 358/12
L'avis de rectification de la déclaration ou la notification d'imposition d'office doit faire mention de la circonstance qui donne lieu à l'application de l'art. 358, CIR 92, ainsi que la date visée au 358/8 et 9.
L'absence de cette communication ne constitue pas une violation de l'art. 358, CIR 92 (voir QP n° 216 de M. Capoen, Bull.QR n° 36, Sénat, session 1988-1989, p. 1835, Bull. 691, p. 452), mais elle peut cependant entraîner la nullité de l'imposition pour violation des art. 346 et 351 , CIR 92 (absence de motivation).
2. Calcul du délai
Numéro 358/13
Le délai de douze mois doit être calculé depuis le lendemain du jour visé au 358/9 (art. 52, CJ) et il se compte de quantième à veille de quantième (art. 54, CJ). Le rôle comprenant la cotisation doit être rendu exécutoire au plus tard le dernier jour utile du délai.
3. Particularités
Numéro 358/14
En déterminant le délai dans lequel l'administration peut user du droit d'établir une cotisation sur base des éléments révélés par une action judiciaire, l'art. 358, § 2, 3°, CIR 92, fixe la date extrême avant laquelle la cotisation doit être établie, mais n'interdit nullement à l'administration d'enrôler ladite cotisation dès le moment où les éléments de l'action judiciaire font apparaître l'existence de revenus non déclarés ou dissimulés, ce qui peut même se produire avant que le délai fixé ait commencé à courir (Cass., 17.10.1985, Malolepszy, Bull. 653, p. 1859 ; voir par analogie 355/35).
La cotisation doit en tout cas être établie dans le délai de douze mois à compter de la date à laquelle la décision judiciaire n'est plus susceptible d'opposition ou de recours, ou, en d'autres termes, à partir de la date à laquelle la décision judiciaire est coulée en force de chose jugée.
La force de chose jugée qui s'attache à une décision judiciaire est régie par l'art. 28, CJ, suivant lequel : "Toute décision passe en force de chose jugée dès qu'elle n'est plus susceptible d'opposition ou d'appel, sauf les exceptions prévues par la loi et sans préjudice des effets des recours extraordinaires".
Les arrêts de Cours d'appel passent donc en force de chose jugée le jour même de leur prononcé, à moins qu'ils ne soient rendus par défaut.
En ce qui concerne plus particulièrement les arrêts en matière pénale, il faut considérer que l'art. 373, al. 4, du Code d'Instruction criminelle, en vertu duquel il est sursis à l'exécution de l'arrêt d'appel contre lequel il y a recours en cassation jusqu'à réception de l'arrêt de la Cour de cassation, est étranger aux dispositions relatives à la force de chose jugée dont traite l'art. 28, CJ.
Numéro 358/15
Il se peut que l'appréciation du premier juge quant à un montant de revenus soit infirmée par le juge d'appel. Aussi convient-il, avant d'établir une cotisation, d'attendre que la décision judiciaire ait acquis force de chose jugée, c.-à-d. que soient écoulés les délais d'opposition et de pourvoi ou que soient vidés les appels ou les recours.
Si un pourvoi en cassation est introduit, la cotisation sera établie sans attendre l'arrêt, mais le contribuable sera invité à introduire une réclamation contre cette cotisation, afin de sauvegarder ses droits en cas de cassation totale ou partielle de l'arrêt d'appel.
E. POUVOIR D'INVESTIGATION ET DE CONTROLE DE L'ADMINISTRATION
Numéro 358/16
Lorsqu'un contrôle ou une enquête, ou une action judiciaire ou encore des documents probants révèle(nt) qu'au cours des 5 années antérieures des revenus imposables déterminés n'ont pas été déclarés, cela n'implique pas que la situation fiscale de l'intéressé puisse être revue dans son ensemble, après l'expiration des délais extraordinaires visés à l'art. 354, CIR 92. La révision doit, au contraire, être limitée aux éléments qui sont apparus par suite de ce contrôle ou de cette enquête, de cette action judiciaire ou de ces documents, étant cependant entendu que si ces éléments sont constitutifs de signes ou indices d'une aisance supérieure à celle qu'attestent les revenus antérieurement déclarés ou imposés, l'administration a le droit d'utiliser ces signes et indices pour réévaluer les revenus imposables.
Numéro 358/17
C'est ainsi par exemple, que dans les cas où une action judiciaire ferait apparaître que des revenus mobiliers n'ont pas été déclarés, les capitaux productifs de ces revenus pourraient être utilisés comme signes et indices pour redresser les revenus professionnels antérieurement déclarés ou imposés, dans la mesure où la provenance de ces capitaux ne pourrait être justifiée à suffisance de droit par le contribuable intéressé.
Par contre, dans l'exemple susvisé, la découverte de revenus mobiliers non déclarés ne pourrait pas être invoquée pour provoquer la révision de certains éléments constitutifs des revenus professionnels, tels que les amortissements antérieurement pratiqués et admis, les frais de locaux professionnels antérieurement déduits et admis, etc. (Rapport fait au nom de la Commission du Budget, Doc.parl., Chambre, Session 1975-1976, n° 680/10, p. 34).
Numéro 358/18
La limitation de la révision dont il est question au 358/16 est une conséquence du fait que, pour l'application de l'art. 358, CIR 92, il n'est pas prévu d'extension du délai d'investigation de l'art. 333, CIR 92.
L'obligation d'effectuer une enquête avant d'établir une cotisation signifierait que les revenus non déclarés découverts n'ont pas été révélés par l'enquête ou le contrôle, l'action judiciaire ou les éléments probants mêmes.
Il a été jugé en ce sens que le fait qu'aucun article de loi ne permet à l'administration, lorsqu'il est fait application de l'art. 358, CIR 92, de demander des renseignements au contribuable en vertu de l'art. 316, CIR 92, confirme le principe que l'action judiciaire doit permettre par elle-même l'établissement des cotisations (Gand, 11.10.1985, N.D., Bull. 656, p. 2575).
III. INFRACTIONS EN MATIERE DE PR.M ET DE PR.P
Numéro 358/19
Le contrôle ou l'enquête relatif à l'application des impôts sur les revenus, dont il est question à l'art. 358, § 1er, 1°, CIR 92, ne peut être que celui réalisé à l'initiative de l'Administration des contributions directes qui, conformément à l'art. 297, CIR 92, désigne les fonctionnaires ou les services chargés de recevoir et de vérifier les déclarations et de procéder à l'établissement et au recouvrement des impôts, et cela à l'exclusion de toute autre administration du Ministère des Finances.
A noter que l'Administration de l'inspection spéciale des impôts est assimilée à l'Administration des contributions directes.
Est non fondé le grief par lequel le requérant fait valoir que les cotisations contestées ont été établies en dehors du délai de 12 mois prévu à l'art. 358, § 2, 1°, CIR 92, au motif que la convention de location du droit de chasse ayant été dûment enregistrée au moment de l'adjudication, l'administration devait en avoir connaissance (Liège, 17.2.1988, Hermann Pierre, Bull. 678, p. 2012).
IV. REVENUS REVELES PAR UNE ENQUETE D'UNE ADMINISTRATION FISCALE ETRANGERE
Numéro 358/20
L'art. 358, § 1er, 2°, CIR 92, peut être appliqué dans le cas où un contrôle ou une enquête des autorités compétentes d'un pays avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de la double imposition, qui concerne un impôt visé par cette convention, fait apparaître que des revenus imposables n'ont pas été déclarés en Belgique au cours d'une des cinq années qui précèdent celle pendant laquelle les résultats de ce contrôle ou de cette enquête sont venus à la connaissance de l'administration belge.
Si le contrôle ou l'enquête se rapporte à un impôt qui n'est pas visé par cette convention, ou s'il a été effectué dans un pays qui n'a pas conclu une telle convention avec la Belgique, ces résultats peuvent constituer des éléments probants autorisant le recours au délai visé à l'art. 358, § 1er, 4°, CIR 92 (QP n° 233 de M. Van Hooland, Bull.QR n° 42, Sénat, session 1990-1991, p. 1796, Bull. 710, p. 2674).
Numéro 358/21
Bien que l'art. 358, CIR 92, n'exige pas que les informations de l'étranger doivent avant tout être communiquées à l'Administration centrale des contributions directes, il est néanmoins prescrit administrativement que l'échange de renseignements entre deux pays ayant conclu une convention préventive de la double imposition doit se faire via les administrations centrales respectives (ibidem).
V. REVENUS REVELES PAR UNE ACTION JUDICIAIRE
A. INCIDENCE DE L'Art. 327, § 1er, AL. 2, ET § 4, CIR 92
Numéro 358/22
La disposition de l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92, est étroitement liée à l'art. 327, § 1er, al. 2, et § 4, CIR 92, qui permet à l'administration de consulter les dossiers des affaires judiciaires susceptibles de lui fournir des éléments utiles pour l'établissement ou le recouvrement des impôts et qui impose même aux officiers du ministère public de l'informer de l'existence des affaires pénales dont l'examen fait apparaître des indices sérieux de fraude fiscale.
Pour que la collaboration ainsi instaurée entre les parquets et l'administration produise ses pleins effets, il est indispensable que l'administration ait le droit d'établir valablement, même en dehors des délais normaux d'imposition, les impôts éludés par les contribuables au sujet desquels elle a recueilli des informations utiles dans les dossiers judiciaires.
Numéro 358/23
L'existence de revenus supérieurs à ceux qui ont été soumis aux impôts sur les revenus pourra être révélée notamment dans une procédure en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, dans un procès en dommages et intérêts sur base de la responsabilité civile dans une contestation sur la durée d'un préavis dans un contrat d'emploi, dans un litige concernant la liquidation d'une succession, etc.
Dans ces différents cas, les décisions des tribunaux sont généralement établies en fonction de revenus justifiés par les intéressés.
Numéro 358/24
A noter qu'un dossier judiciaire ne peut être consulté qu'après l'autorisation préalable dont il est question à l'art. 327, § 1er, al. 2, CIR 92 (voir 327/14). Il ne s'agit dans cet article que de consultation, de sorte que l'on peut admettre que la prise d'une copie n'est considérée que comme une modalité de la possibilité de consultation (Anvers, 29.6.1992, Wouters-Parthoens).
Numéro 358/25
C'est l'action judiciaire et non la décision judiciaire qui doit révéler l'existence de revenus imposables non déclarés ou dissimulés. Il a été jugé, à cet égard, que l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92, est applicable dès le moment où les éléments de l'action judiciaire - information, instruction, expertise ou autres - font apparaître l'existence de tels revenus (Liège, 23.5.1969, Valkenberg, C., Bull. 477, p. 1384).
Par ailleurs, le texte de l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92, ayant une portée générale, vise toute action judiciaire, qu'elle relève de la compétence des juridictions civiles ou répressives ou de celle des tribunaux de commerce et des conseils de prud'hommes et qu'elle ait n'importe quel objet.
Il a été jugé à cet égard :
- que l'art. 358, CIR 92, ne fait aucune distinction entre une action civile ou une action pénale, ni entre juridiction d'instruction et juridiction de jugement, mais se borne à exiger que l'action judiciaire ait été intentée dans les cinq années qui suivent la dissimulation des revenus (Bruxelles, 11.1.1964, Peeters-Vervoort ; voir aussi Gand, 11.10.1985, N.D., Bull. 656, p. 2575) ;
- que, lorsque le Procureur du Roi, qui a requis une enquête pénale contre le contribuable, et la police judiciaire, qui a effectué l'enquête, ont déposé des conclusions lors des délibérations de l'affaire devant le tribunal correctionnel et que le tribunal a constaté la prescription à la demande des prévenus, il existait dès lors incontestablement une action judiciaire et que la demanderesse soutient à tort que la plainte a été classée par le parquet (Gand, 30.10.1990, NV I.V.B.).
L'action pénale, et par conséquent l'action judiciaire au sens de l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92, est entamée par l'enquête préliminaire ou par le réquisitoire du juge d'instruction.
Le Ministère public, qui exerce aussi le plus souvent - et plus précisément en la personne du Procureur du Roi - les prérogatives de la police judiciaire, procédera à une enquête préliminaire lorsque les éléments disponibles au dossier ne suffisent pas à permettre de décider d'emblée de l'opportunité des poursuites, dans les cas où il n'apparait pas nécessaire ou souhaitable de charger le juge d'instruction d'une enquête. Les fonctionnaires du Ministère public agissent en ce cas en leur qualité d'officiers de la police judiciaire. En règle, la conduite d'une enquête préliminaire ne fait pas démarrer l'action pénale puisque, à la fin de l'enquête préliminaire, le Ministère public peut toujours décider de ne pas entamer l'action judiciaire ou, en d'autres termes, de classer l'affaire (voir toutefois 358/9).
On parle cependant d'enquête judiciaire lorsque le Ministère public, en la personne du Procureur du Roi, requiert le juge d'instruction. Ceci sera le plus souvent le cas pour les affaires difficiles et délicates pour lesquelles les éléments disponibles ne suffisent pas et qui requièrent des recherches étendues, l'audition de prévenus, de témoins, et assimilés. L'action pénale est effectivement entamée par le biais de la réquisition du juge d'instruction. Le Ministère public ne peut plus classer l'affaire de sa propre autorité et seul le juge d'instruction peut décider de la poursuite de l'affaire.
C. MODE D'INTENTEMENT DE L'ACTION JUDICIAIRE
Numéro 358/26
L'intentement de l'action judiciaire se fait habituellement par acte d'huissier au moyen duquel l'action est mise en mouvement. Cet acte porte généralement le nom de citation (voir art. 700 à 705, CJ).
L'introduction d'une action peut cependant aussi avoir lieu :
- par requête (voir art. 1025 à 1034, CJ) ;
- par comparution volontaire (voir art. 706, CJ).
Numéro 358/27
En matière pénale, c'est la mise en mouvement de l'action publique qui constitue l'intentement de l'action judiciaire. Le réquisitoire aux fins d'information émanant du Procureur du Roi met l'action publique en mouvement (Bruxelles, 11.1.1964, Peeters-Vervoort). Par "réquisitoire aux fins d'information émanant du Procureur du Roi", il faut entendre, selon le cas, la demande d'enquête préliminaire ou la demande d'enquête judiciaire (voir 358/25).
D. ANNEE DE L'INTENTEMENT DE L'ACTION JUDICIAIRE
Numéro 358/28
Aucune difficulté ne pourra surgir quant à l'année de l'intentement de l'action, attendu que généralement les actes, jugements ou arrêts font mention de la date de l'introduction de l'affaire en justice.
E. PERSONNES MISES EN CAUSE PAR L'ACTION JUDICIAIRE
Numéro 358/29
Le délai spécial d'établissement des impôts éludés est applicable, non seulement à l'égard des contribuables directement impliqués dans l'affaire, mais aussi à l'égard de tous autres contribuables dans le chef desquels l'action judiciaire révèle une dissimulation de revenus imposables.
C'est ainsi, par exemple, que dans le cas où une action pénale est intentée à charge d'un agent d'affaires, pour avoir établi ou utilisé des documents comptables inexacts au profit de ses clients, les impôts éludés à la faveur de ces manoeuvres pourront être établis à charge de ces clients, même après expiration des délais normaux d'imposition et même si les contribuables dont il s'agit ne peuvent normalement pas être - ou ne sont pas - personnellement poursuivis ou sanctionnés sur le plan pénal.
F. BENEFICES NON ADMIS PAR LE JUGE
Numéro 358/30
Il ne peut être question de considérer comme revenus imposables les revenus invoqués par une partie en litige mais qui, en l'absence de preuves suffisantes, ne seraient pas admis par le juge.
G. MOYENS DE PREUVE DE L'ADMINISTRATION
Numéro 358/31
Lorsque le législateur utilise, dans l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92, les termes "dans les cas où une action judiciaire fait apparaître" et non, par exemple, "lorsqu'une action judiciaire apporte la preuve ... ou renferme la preuve ...", cela implique que l'administration peut, en ce qui concerne la formation de la preuve, utiliser tous les moyens de preuve mis à sadisposition (Chapitre IV du Titre VII du CIR 92 - art. 339 à 345, CIR 92) (Anvers, 15.4.1980, Van De Voorde, Bull. 604, p. 476 ; Anvers, 7.11.1983, Y., Bull. 637, p. 460).
VI. REVENUS REVELES PAR DES ELEMENTS PROBANTS
A. NOTION D'"ELEMENTS PROBANTS"
Numéro 358/32
L'art. 358, § 1er, 4°, CIR 92, est rédigé en termes généraux de sorte que tous les éléments dont l'administration a eu connaissance légalement peuvent être utilisés comme éléments probants. Il est cependant exigé que ces éléments soient suffisamment probants en soi puisque le délai d'investigation de l'art. 333, CIR 92, n'est pas prolongé (QP n° 349 de M. Draps, Bull.QR n° 4, Chambre, session ordinaire 1987-1988, p. 160, Bull. 673, p. 1052 ; voir également 358/16 à 18 au sujet du délai d'investigation).
Les termes "suffisamment probant" signifient en outre que ces éléments doivent former, à l'égard du contribuable, la preuve irréfutable du fait que des revenus imposables n'ont pas été déclarés au cours des cinq années visées (QP n° 139 de M. Féaux, Bull.QR n° 22, Chambre, session ordinaire 1986-1987, p. 2268, Bull. 666, p. 2266).
Numéro 358/33
L'Exposé des motifs de la L 22.12.1977 relative aux propositions budgétaires 1977-1978, par laquelle le 4° a été ajouté aux §§ 1 et 2 de l'art. 358, CIR 92, mentionne à titre d'exemple ce qui peut être considéré comme éléments probants, à savoir les résultats d'un contrôle, d'une enquête, d'une expertise, d'un arbitrage, d'un arrangement amiable, etc., auxquels le contribuable concerné a acquiescé (voir Doc.parl., Chambre, session 1977-1978, n° 113/1, p. 17).
Numéro 358/34
Lorsque, à l'occasion d'une vérification effectuée au cours de l'instruction d'une réclamation, l'administration a connaissance d'éléments probants, l'impôt ou le supplément d'impôt peut être établi dans le délai de l'art. 358, § 1er, 4°, CIR 92 (QP n° 234 de M. L. Vansteenkiste, Bull.QR n° 41, Chambre, session 1977-1978, p. 3107, Bull. 566, p. 1661).
Numéro 358/35
L'attention est cependant appelée sur le fait que l'élément probant au sens de l'art. 358, § 1er, 4°, CIR 92, ne peut résulter de l'évaluation des revenus par application de l'art. 342, CIR 92 (comparaison individuelle ou bases forfaitaires de taxation).
1. Eléments probants
Numéro 358/36
Peuvent être considérés comme éléments probants :
- constatations précises faites par les services de recherche des contributions directes portant l'aveu du contribuable ;
- résultats d'enquêtes effectuées par d'autres administrations et auxquels le contribuable concerné a acquiescé (QP n° 191 de M. Vansteenkiste, Bull.QR n° 23, Chambre, session ordinaire 1982-1983, p. 1844, Bull. 619, p. 1734).
Ainsi le "bordereau de régularisation" établi en matière de TVA en conclusion d'un contrôle portant sur l'application de cette taxe, a indiscutablement le caractère d'élément probant lorsque le contribuable en cause s'y est rallié, soit explicitement en marquant son accord sur son contenu, soit tacitement en régularisant sa situation en matière de TVA.
Par contre, si le contribuable conteste le bien-fondé du "bordereau de régularisation" qui lui est adressé en matière de TVA et fait usage de ses droits de recours, le "bordereau de régularisation" contesté ne constitue un élément probant utilisable en matière d'impôts sur les revenus que dans l'éventualité et dans la mesure où il est maintenu, c'est-à-dire dans l'éventualité et dans la mesure où les redressements opérés en matière de TVA ont acquis un caractère définitif et sont opposables au contribuable.
A cet égard, on ne perdra pas de vue que, dans le cas où un litige en matière de TVA est définitivement tranché au niveau judiciaire, les dispositions faisant actuellement l'objet de l'art. 358, § 1er, 3°, CIR 92, permettent également de redresser la situation en matière d'impôts sur les revenus après l'expiration des délais ordinaires et extraordinaires d'imposition (voir Doc.parl., Chambre, session 1977-1978, n° 113/11, pp. 25 et 26).
Il a cependant été jugé qu'un bordereau de régularisation en matière de TVA, dont le bien-fondé est contesté, peut néanmoins être considéré comme un élément probant, lorsque l'Administration de la TVA, qui prend à son niveau une décision définitive en cette affaire, établit un redressement en matière de TVA sur la base de ce bordereau ; il a été jugé qu'une telle décision était opposable au contribuable qui, aussi bien sur le plan de la TVA que sur celui des contributions directes, avait la possibilité d'introduire un recours à l'encontre de cette décision (Liège, 9.1.1991, SA Entreprises A.D.
- à remarquer que le contribuable s'était désisté de son recours devant le tribunal) ;
- un acte sous seing privé demeuré inconnu jusqu'au moment de sa découverte (Bruxelles, 4.11.1986, C.A., Bull. 663, p. 1482) ;
- l'existence conjuguée d'un compte bancaire (qui n'était pas acté dans la comptabilité contrôlée et sur lequel des chèques ont été émis pour l'achat de beurre, sans qu'une facture de vente ait été délivrée) et des mentions qui s'y rapportent figurant au journal financier de la société (Liège, 9.11.1988, P.M., Bull. 689, p. 2432) ;
- les résultats d'un contrôle ou d'une enquête, qui se rapporte à un impôt qui n'est pas visé par une convention préventive de la double imposition ou qui a été effectué dans un pays qui n'a pas conclu une telle convention avec la Belgique (voir 358/20, al. 2).
2. Eléments qui ne répondent pas à la notion d'"éléments probants"
Numéro 358/37
Ne peuvent être considérés comme éléments qui répondent à la notion d'"éléments probants" :
- de simples renseignements tels que des constatations relevées sur la voie publique, des données recueillies dans un dossier judiciaire faisant apparaître des indices de fraude fiscale mais n'étant pas elles-mêmes révélatrices de revenus non déclarés. Ces renseignements ne peuvent être que le point de départ à un examen, pour autant que les dispositions de l'art. 333, CIR 92, le permettent ;
- des renseignements repris sur une fiche 281.00 (QP n° 99 de M. Vandenhove, Bull.QR n° 16, Sénat, session 1984-1985, p. 670, Bull. 639, p. 1076) ;
- les communications à un collègue d'une constatation opérée au cours de l'examen d'un dossier fiscal, sans transmission des éléments probants sur lesquels repose cette constatation (voir Anvers, 9.9.1991, A.W.) ;
- un excédent d'une balance d'avoirs déterminé par signes et indices qui a été établi pour d'autres années (Liège, 29.6.1988, R. M.-K.) ;
- une acquisition de bons de caisse, lorsque l'acquisition ne fournit pas par elle-même la preuve de l'existence de revenus non déclarés et qu'il n'apparaît pas que le contribuable aurait effectué l'acquisition au moyen de revenus imposables acquis entre le 1.1 de la période imposable et la date d'acquisition et surtout lorsque l'imposition primitive n'a pas été réalisée sur la base de signes et indices (Gand, 15.5.1990, J.S.) ;
- des renseignements obtenus en violation de l'art. 333, CIR 92 (Gand, 12.3.1991, J.D.-C.B., Bull. 717, p. 1565).
Numéro 358/38
Des accroissements d'impôts peuvent être appliqués sur les impositions établies conformément à l'art. 358, CIR 92.
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