Cour d'appel: Arrêt du 1 décembre 2005 (Liège). RG 2005/RG/1030

Date :
01-12-2005
Langue :
Français
Taille :
3 pages
Section :
Jurisprudence
Source :
Justel F-20051201-9
Numéro de rôle :
2005/RG/1030

Résumé :

L'arrêt de la Cour d'appel de Liège infirme le jugement rendu en instance par le Tribunal de Commerce de Verviers déclarant le failli non excusable.

Arrêt :

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N° d'ordre : 2188 Répertoire n° 6540

COUR D'APPEL DE LIÉGE

SEPTIEME CHAMBRE

ARRÊT du 01 décembre 2005

2005/RG/1 030

EN CAUSE:

SG

domicilié à XX

Partie appelante, présente personnellement assistée de Maître PIRON Jacques, avocat à 4800 VERVIERS, rue des Déportés, 82.

CONTRE :

GRONDAL Albert, avocat à 4800 VERVIERS, place Général Jacques, 20,agissant en qualité de curateur à la faillite de Monsieur GS

Intimé, présent qualitate qua.

Vu les feuilles d'audiences des 8 septembre, 20 octobre

3 novembre 2005 et de ce jour.

N° d'ordre : 2189

APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ :

Vu l'appel du jugement rendu le 2 juin 2005 par le tribunal de commerce de Verviers interjeté le 19 juillet 2005 par GS ;

Attendu que par jugement rendu le 22 avril 2004, le tribunal de commerce de Verviers a déclaré closes par liquidation les opérations de la faillite de GS déclarée sur aveu le 17 juin 1999 et dit le failli inexcusable aux motifs que « le dossier révèle que (celui-ci) n'a pas répondu ponctuellement aux convocations qui lui ont été adressées par le curateur; qu'il n'a pas déclaré spontanément tous ses actifs, n'a pas fourni les renseignements demandés, n'a pas remis tous les documents réclamés et n'a apporté aucune collaboration à la curatelle » ;

Que statuant sur l'opposition introduite par procès - verbal de comparution volontaire en date du 10 février 2005, le tribunal a dit l'opposition recevable mais non fondée aux motifs « que les explications formulées par le failli n'énervent en rien les motifs énoncés dans le jugement dont opposition () ; que le curateur a confirmé dans le cadre de la présente opposition l'attitude désinvolte du failli lors de la procédure de liquidation ; qu'il s'est soustrait systématiquement aux convocations du curateur et du juge-commissaire et n'a pas spontanément déclaré un actif immobilier ; qu'il s'agit là de circonstances tout à fait particulières excluant toute bonne foi dans le chef de l'opposant » ;

Attendu que l'article 80 alinéa 2 de la loi du 8 août 1997 sur les faillites qui n'ouvrait au failli qu'un délai d'un mois à compter de la notification du jugement de clôture pour former tierce opposition a été modifié par la loi de réparation du 4 septembre 2002 ; que depuis lors, pour ce qui concerne le failli, les règles de recours sont celles du Code judiciaire ;

Attendu que GS n'ayant pas informé le greffe du tribunal de commerce, pas plus que le curateur, de son changement de domicile intervenu le 30 janvier 2004, il a été régulièrement convoqué par pli judiciaire du 19 février 2004 à son ancienne adresse ; qu'il n'a pas comparu à l'audience du 11 mars 2004 à laquelle a été évoquée la question de son excusabilité ; que le jugement rendu le 22 avril 2004 ne lui ayant pas été signifié, l'opposition introduite par procès - verbal de comparution volontaire du 10 février 2005 était donc recevable ratione temporis ; que la loi du 4 septembre 2002 ayant consacré que « le failli et le curateur (sont) tous deux parties au

N° d'ordre : 2690

litige » (Verougstraete, Manuel de la faillite et du concordat, édition 2003, n° 1 055, p. 620), le curateur avait bien qualité pour signer le procès - verbal de comparution volontaire ; que le jugement entrepris doit donc être approuvé en ce qu'il s'écarte de l'avis du Ministère Public et déclare recevable l'opposition formée par GS ;

Attendu que l'article 80 alinéa 2 de la loi sur les faillites tel que modifié par la loi du 4 septembre 2002 et non modifié sur ce point par la loi du 20 juillet 2005 a fait de l'excusabilité un droit dont le failli malheureux et de bonne foi bénéficie sauf circonstances graves et spécialement motivées ;

« Attendu que l'excusabilité est devenue la règle, le législateur ayant cherché à encourager les anciens faillis qui peuvent encore travailler à ne pas se cantonner dans une activité clandestine leur permettant d'échapper aux poursuites des créanciers ;

Que ce droit est retiré au débiteur qui n'est pas malheureux et de bonne foi, à celui qui a adopté un comportement frauduleux et a organisé de manière artificielle son insolvabilité, mettant hors de portée de ses créanciers des sommes dont il peut encore disposer de manière indirecte » (Liège, 7ème ch., 30.06.2005, 2004/RG/1458, en cause Pierre GOHY contre le Procureur Général et Vincent Troxquet q.q.) ;

Attendu que l'appelant exerce la profession de chauffeur routier international ; qu'il n'a aucune formation particulière, ce dont il doit être tenu compte dès lors qu'il s'agit d'apprécier son comportement; que dans son avis déposé au dossier de la procédure d'instance, le juge commissaire écrivait: «monsieur S n'aurait jamais dû travailler comme indépendant. Manque flagrant de connaissance de gestion et de calcul de prix de revient. Situation défavorable du marché » (dossier de la procédure, p.20) ;

Attendu qu'à aucun moment dans le dossier de la faillite, il n'est question de la moindre malhonnêteté qui pourrait être reprochée à l'appelant sauf celle dont il sera question plus loin; qu'ayant clairement tiré les leçons de son échec, G S a cherché à continuer à exercer en tant que travailleur salarié la seule activité qu'il maîtrise à savoir celle de conducteur de poids lourds et pour laquelle il a pu être engagé à l'étranger par des contrats successifs à durée déterminée de façon à pouvoir continuer à vivre de manière décente ; qu'il est tout à fait exact que préoccupé avant tout par la nécessité de

N° d'ordre : 2191

trouver un travail et d'assurer sa subsistance puisqu'il ne peut bénéficier d'allocations de chômage, il s'est désintéressé des opérations de la faillite et n'a pas répondu aux convocations du curateur auquel il avait communiqué un numéro de téléphone mobile, seul moyen de l'atteindre en raison de ses déplacements ; que cette seule circonstance ne saurait toutefois justifier que le bénéfice de l'excusabilité lui soit retiré ;

Attendu que le curateur et le tribunal font grand cas de ce que le failli aurait dissimulé qu'il possédait un quart en pleine propriété de l'immeuble que son vieux père occupait seul depuis le décès de sa mère survenu le 4 février 1984 ; qu'il est permis sur ce point de s'en référer à l'avis du Ministère Public qui indique que « Vu le temps écoulé, on peut supposer plausible que le failli, non juriste de formation ait perdu de vue la nature des droits qu'il avait conservés dans l'intervalle sur l'immeuble » ;

Attendu qu'il n'existait dans le chef de l'appelant aucune volonté de soustraire ces biens aux poursuites de ses créanciers ;

Qu'il est important de noter en effet que la part de GS dans l'immeuble modeste occupé par son père qui fut réalisé pour le prix de 2.350.000 BEF, avait fait l'objet de diverses inscriptions prises avant la faillite par les administrations fiscales à concurrence de 2.164.206 BEF de sorte que l'appelant ne pouvait raisonnablement espérer que celui-ci échappe à ses créanciers ;

Que la bonne foi de l'appelant est sur cette question certaine ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement

Vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire,

Après avoir entendu monsieur Thierry Piraprez, substitut du procureur général, en son avis conforme donné à l'audience du 3 novembre 2005,

Reçoit l'appel,

N° d'ordre : 2192

Réformant le jugement entrepris, prononce l'excusabilité de GS, né à Bres soux le 13 février 1946, anciennement domicilié à 4850 Plombières, Vosheydt 28, inscrit au registre de commerce de Verviers sous le n° 64.852 pour une entreprise de transport et actuellement domicilié à 4920 Aywaille rue de Trois Ponts 40 B;

Ordonne qu'en exécution de l'article 80 alinéa 7 de la loi sur les faillites un avis reproduisant le présent dispositif soit publié au Moniteur Belge.

Délaisse à l'appelant les dépens des deux instances.

Ainsi prononcé, en langue française, à l'audience publique de la SEPTIÈME chambre de la cour d'appel de Liège, palais de justice, place Saint-Lambert 16 à Liège, le 01 décembre 2005, où sont présents

Raoul de FRANCQUEN, Président, Michel LIGOT, Conseiller,

Ariane JACQUEMIN, Conseiller, Jean-Jacques BOUSSA, Greffier.